La supplication, Tchernobyl, chroniques du monde après l'apocalypse
de Svetlana Alexievitch

critiqué par Stéphanie, le 7 décembre 2001
(Chevreuse - 53 ans)


La note:  étoiles
Les survivants de Tchernobyl
Le 26 avril 1986, le réacteur numéro 4 de la centrale de Tchernobyl a explosé puis pris feu laissant échapper un nuage radioactif touchant les trois-quarts de l’Europe. Basé sur des témoignages, le livre de Svetltana Alexievitch nous dévoile la vie de ceux qui ont été touchés par ce drame.
Aucun témoignage n'est plus fort qu’un autre. Chacun s'exprime à sa façon, avec ses mots et selon sa propre perception mais tous souffrent. On ne peut pas lire partiellement ce livre car sa force réside dans l’ensemble des témoignages qui sont publiés.
Ce sont les récits de l’agonie des victimes dont je me garderais de donner ici les détails sordides. Ce sont les tortures de ces parents dont les enfants naissent malformés et de ces jeunes femmes qui ne pourront jamais être mères. Ce sont les appels douloureux des habitants qui ont été évacués, quittant pour toujours leur maison, leur village, leurs animaux. Tout ce qui reste est enterré, même la terre est enterrée ! Et il y a les récits de tous ceux qui ont été envoyés sur le site de Tchernobyl pour éteindre l’incendie et décontaminer, en vain, la zone : pompiers, liquidateurs et autres héros. Protection ? Masques à gaz ? De l'iode pour éviter les cancers de la thyroïde ? Vous n’y pensez pas ! Cela aurait créé la panique générale. Alors le matériel de protection est resté enfermé dans les hangars de l'Etat. Certains scientifiques ont essayé, malgré les risques personnels que cela représentait, d'alerter la population, d’expliquer le danger et les mesures à prendre. Personne ne les a cru.
Tout ce qui était contaminé a été enterré. Mais la population affamée a déterré ces objets et les a revendus sur les marchés de Kiev et autres grandes villes contaminant ainsi des milliers de foyers à travers le pays. No comment. Mikhail Gorbatchev n’est intervenu à la télévision que 19 jours après l'incident, pardon, l'accident... Lapsus... Suite à un procès en 1987, six des responsables de la centrale ont été condamnés à des peines allant de 2 à 10 ans de prison. Aucun haut dirigeant soviétique n’a été condamné. No comment.
Tchernobyl sur la sellette 7 étoiles

A l’instar des Cercueils de zinc parus sept ans auparavant et dédiés à l’aventure russe sanglante en Afghanistan, la forme de La supplication est celle d’un recueil de témoignages, recueillis, réécrits, mis en forme et structurés par Svetlana Alexievitch herself.
Le sous-titre ; Tchernobyl, chroniques du monde après l’apocalypse, est parfaitement explicite. Il faut dire que la Biélorussie, patrie de Svetlana Alexievitch est juste de l’autre côté de la frontière nord de l’Ukraine, frontière nord où précisément est localisé Tchernobyl. Et Dieu sait que le nuage radioactif ne s’est pas arrêté à la frontière ukraino-biélorusse. Et rappelons par ailleurs qu’à l’époque de la catastrophe (Avril 1986), l’Ukraine comme la Biélorussie étaient parties intégrantes de l’URSS.
Il ressort un immense désespoir de cette somme de témoignages et un dégoût pour l’attitude des politiques qui s’avérèrent incapables de réagir à la catastrophe, mais qui surtout nièrent et minimisèrent la réalité un temps, un temps pendant lequel des milliers d’individus furent envoyés à l’abattoir ou ne prirent pas les précautions qu’ils auraient pu prendre.
Quelques remarques d’ordre général m’ont frappé. Comme celle-ci concernant l’âme slave :

»Mais nous avons toujours vécu dans l’horreur et nous savons vivre dans l’horreur. C’est notre milieu naturel. Pour cela, notre peuple est sans égal … »

ou celle-ci :

A cette époque, je travaillais à l’usine tout en suivant mes études par correspondance, à la Faculté d’Histoire. J’étais serrurier. J’ai été rappelé avec un groupe de réservistes et l’on nous a fait partir sur-le-champ, en urgence. Comme au front.
- Où va-t-on ?
- Là où on vous le dira.
- Et qu’est-ce qu’on va faire ?
- Ce qu’on vous ordonnera. Mais vous allez construire. Reconstruire.
…/…
Une commission est venue nous calmer. « Dans votre coin, tout va bien. Le fond de la radiation est normal. A quatre kilomètres d’ici, la vie est impossible, on va évacuer la population, mais chez vous, c’est calme. »
…/…
Là commencent les choses intéressantes pour vous, en tant qu’écrivain. Combien de temps croyez-vous que nous avons conservé cela en mémoire ? A peine quelques jours. Le Soviétique est incapable de penser exclusivement à lui-même, à sa propre vie, de vivre en vase clos. Nos hommes politiques sont incapables de penser à la valeur de la vie humaine, mais nous non plus. Vous comprenez ? Nous sommes organisés d’une manière particulière. Nous sommes d’une étoffe particulière. »


Quoi qu’il en soit, Svetlana Alexievitch s’est montrée remarquablement courageuse de s’être levée ainsi, contre la doxa officielle, pour essayer de rendre justice à toutes celles et ceux qui ont souffert et souffrent encore dans leur chair de la catastrophe.
La désinformation et la manipulation sont des sports indéniablement fort pratiqués en Russie (ou ex-URSS) et on en voit encore les ravages aujourd’hui. Encore en Ukraine, malheureusement pour les pauvres Ukrainiens.
Il vaut mieux être en bonne forme morale pour se lancer dans La supplication. Parce qu’il y a de quoi désespérer, sinon de l’espèce humaine au moins de « l’homo sovieticus », et puis parce que la lecture dure longtemps …

Tistou - - 68 ans - 11 août 2022


Inouï 10 étoiles

Svetlana Alexievitch a recueilli les témoignages de dizaines de témoins directs de la catastrophe de Tchernobyl. Ils sont désespérants. Si elle ne donne aucun commentaire personnel, ces récits sont souvent le fait de personnes qui expriment une pensée quasi-philosophique par rapport à l'événement, donnant à ce livre une tonalité à la fois poignante et intellectuellement lourde de pensées. Plusieurs faits me frappent. Le premier est le souvenir encore vivace de la deuxième guerre mondiale qui conduit de nombreuses personnes à entrer dans une démarche quasi-guerrière et militaire les conduisant à être volontaires pour s'occuper des conséquences de l'explosion. Avec un patriotisme bien chevillé au corps leur faisant accepter sans sourciller les ordres venus d'en haut. Et avec une ignorance totale des émanations radio-actives et de leur impact sur la santé de chacun. Ignorance partagée entre les "actifs".et les "évacués" et entretenue par les autorités civiles et militaires. Celles-ci ont donc utilisé à fond le mensonge officiel, nous en avons en France fait l'expérience pour les mêmes raisons, avec la certitude d'être crues, tant le mensonge et l'autoritarisme ont fait le système communiste. Le lecteur sent à la lecture des témoignages le reproche de mensonge fait aux autorités, parfois caché sous une critique plus ou moins directe de Gorbatchev: "on était mieux sous un vrai communisme". Ce livre permet certainement de comprendre la catastrophe (sauf les raisons techniques) et les manières par lesquelles elle a été gérée. Il jette aussi des lumières sur l'état actuel du pays.

Falgo - Lentilly - 85 ans - 18 octobre 2017


Jusqu'où ? 9 étoiles

Selon sa méthode habituelle, Svetlana Alexievitch recueille et met en forme les témoignages. Ici, Tchernobyl, après que l'apocalypse a empoisonné l'air, la terre, les corps et les esprits.
A lire, par delà la description des souffrances, des vies brisées, comme une formidable exploration de l’âme humaine et d’un système politique.
Un système où la corruption et la bassesse jouent le même rôle que dans n’importe quelle hiérarchie, mais où le règne du mensonge et l’interdiction de critiquer le régime et le parti éliminent tous les freins et tous les garde-fous. Un système qui en effaçant l’individu au détriment du collectif est prêt à sacrifier des vies humaines par milliers mais qui a su communiquer au peuple un extraordinaire amour de la patrie et un sens du sacrifice hors norme. On reste sans voix devant ces soldats qui, par mélange de bravoure et d’inconscience, sont allés à tour de rôle quelques minutes sur le toit du réacteur en feu pour évacuer les débris, là où les robots et les machines ne tenaient pas.
C’est un aspect de La supplication, mais il y a trop de choses dans ces témoignages pour en donner une idée dans une simple critique. Alors lisez pour entendre la voix des épouses qui perdent leur mari, la voix des enfants exilés, la voix des soldats qui suivaient des ordres ubuesques, la voix des médecins à qui on ordonnait de ne pas semer la panique...

Romur - Viroflay - 51 ans - 11 juin 2016


Une lecture nécessaire 10 étoiles

Pour être franche, lorsque Svetlana Alexievitch s'est vu attribuer l'année dernière (octobre 2015), le prix Nobel de littérature, je me suis interrogée sur la pertinence de ce choix concernant une œuvre que tous ses lecteurs, ici ou ailleurs, lecteurs dont je n'étais pas encore, s'accordaient à définir comme un recueil de témoignages, un travail documentaire et journalistique. S'il paraît normal qu'en regard d'un sujet aussi lourd et impactant, la question du caractère littéraire ou non de "La supplication" - puisqu'il s'agit ici plus précisément de ce titre - puisse être tenue pour bien dérisoire, je dois dire que sa lecture a levé mes doutes sur ce point.
Dans une interview accordée fin 2014 à Philosophie magazine, Svetlana Alexievitch explicite sa méthode de travail. Ne serait-ce qu'au niveau du recueil des témoignages, on est déjà loin, il me semble, de la simple interview journalistique. Ses méthodes semblent plus s'apparenter à celles d'un psy; elle se met à l'écoute, rencontrant plusieurs fois les personnes de façon à susciter leur confiance, libérer leur parole, pour mieux pénétrer leur intériorité, aller au-delà de la banalité des discours de surface. Suit un travail patient d'élagage par lequel elle ne sélectionne qu'un nombre limité de témoignages et une fraction de ceux-ci de sorte à n'en retenir que la quintessence, sa réécriture se limitant alors à un simple toilettage qui respecte l'authenticité du matériau. Vient la phase d'agencement de tous ces morceaux, la structuration de l'œuvre.
Peut-être en fait-elle plus qu'elle ne veut bien le dire mais le résultat est une œuvre polyphonique d'une rare force, dont les multiples voix se superposent, se confondent ou se répondent en un cri de vérité collectif, qui résonne longtemps après la fermeture du livre, celui du chœur souffrant des victimes de Tchernobyl.

Je ne m'attarderai pas sur le détail du contenu de ces témoignages déjà commentés précédemment. Svetlana Alexievitch s'est focalisée non sur l'évènement mais sur la manière dont ces gens - victimes passives ou acteurs - l'ont vécu, perçu, à l'époque des faits et leurs sentiments environ dix ans plus tard lorsqu'ils témoignent (le livre est paru en 1997). "Je n'écris pas l'histoire des faits, mais celle des âmes" nous dit l'auteure.
Et celle-là est infiniment triste, tour à tour émouvante, bouleversante, inconcevable, révoltante, effarante ...et parfois désarmante d’ambiguïté dans ce qu'elle nous révèle de la complexité de la nature humaine: " j'ai peur de le reconnaître, mais nous aimons Tchernobyl. Cela a donné un sens à notre vie...le sens de la souffrance. Comme la guerre. Le monde n'a appris l'existence de Biélorusses qu'à la suite de Tchernobyl (...)Nous sommes en même temps ses victimes et ses prêtres".
Honneur soit donc rendu à Madame Alexievitch pour avoir su consigner à temps cette mémoire, cette histoire à côté de l'Histoire, d'autant plus précieuse qu'aucune autre trace documentaire ne subsistait ou presque."Il n'y a pas de véritable chronique de Tchernobyl"; les rares films ou photos réalisés à l'encontre de la censure des autorités militaires étaient systématiquement détruits.

Et cette histoire prend d'autant plus de relief qu'elle restera comme le premier saut de l'humanité dans l'inconnu engendré par le nucléaire civil.
Certains se diront que les réactions des populations directement concernées ont été fortement induites à la fois par le fameux fatalisme slave et surtout l'immense foi, aveugle, en un système soviétique qui avait prouvé sa capacité à vaincre l'ennemi (le souvenir de la seconde guerre mondiale était encore très vif chez les russes) et qui exaltait l'héroïsme d'individus prêts à se dévouer à la patrie et à la communauté. Sans cela, un certain nombre de conséquences désastreuses auraient peut-être pu être minorées.
Reste que, quel que soit l'endroit et les mentalités, les "autorités", au nom d'intérêts dits "supérieurs" continueront à perpétrer le mensonge et la désinformation et que nombre de nos concitoyens préfèrent le déni plutôt que la remise en cause de notre mode de vie, espérant que la catastrophe, ce sera pour les autres.
J'ai le souvenir d'un certain nuage qui se serait, comme par enchantement, arrêté à nos frontières au cours du mois de mai 1986, et le moins que l'on puisse dire est que si nous n'en avons pas été convaincus, nous avons fait comme si...

Avant-hier: Tchernobyl; hier: Fukushima; et demain?

Lisez "La supplication"...cela nous concerne tous.

Myrco - village de l'Orne - 75 ans - 2 mars 2016


Mc Solaar chantait "Tchernobyl.Tcherno-débile." 8 étoiles

Témoignages poignants...

Celui qui restera, celui de cette femme enceinte qui aime son homme pompier tellement fort, qu'elle restera près de lui, jusqu'à la mort, lui repoussant l'estomac de la gorge pour l'enterrer dignement.

Yotoga - - - ans - 3 mai 2014


Un des plus forts témoignages traduits en langue française 10 étoiles

Dans un monde de risques calculés, de prévention, de sécurité, de planification, de prévision des quantités, des capacités, l'émotion est considérée, sans doute à juste titre, comme une erreur de jeunesse, un défaut d'anticipation, une réponse excessive à une situation locale n'échappant pas à notre contrôle global. Alors, oui, ce livre est un livre d'émotions, un recueil de cris d'affolement, l'inutile poésie des réactions individuelles devant une vie pour laquelle les gens locaux n'ont jamais été formés.

Svetlana Alexievitch maîtrise parfaitement la technique de l'Histoire orale qu'elle a employée dans d'autres livres notamment sur la Seconde Guerre Mondiale, mais, dans ce cas, elle l'applique à l'Histoire très contemporaine, à une Histoire qui, d'ailleurs, ne cesse de se faire, dans le silence olympien des médias, dans l'oubli et la déconsidération. Svetlana Alexievitch n'est pas Russe comme il est suggéré dans certains commentaires de ce livre mais Biélorusse, ce qui signifie qu'elle a une relation très différente au bilinguisme, voire au trilinguisme, comme c'est souvent le cas de ces populations mêlées : Russes, Biélorusses, Ukrainiens, Polonais et autres. Et c'est un problème bien plus significatif qu'il n'y paraît car même si, juridiquement, l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques cachait, par sa superstructure politique, chacun des pays qu'elle englobait, sauf la Russie, en vérité, il s'agissait bel et bien, et dès l'origine, d'un problème juridiquement (et, concrètement parlant) international car Tchernobyl se trouvait en bordure de la frontière Biélorusse et non loin non plus de la frontière Sud-Ouest de la Russie. C'est dans le cadre de la coopération soviétique que des Russes et des Biélorusses furent mobilisés, en plus des Ukrainiens, pour le grand nettoyage car, à coup sûr, l'état Ukrainien n'eut pu à lui tout seul faire face à cette catastrophe sans l'aide d'une superstructure internationale comme feu l'URSS. Comment l'Ukraine eut pu, à elle seule, dédommager tous les pays voisins auxquels, sans l'avoir souhaité, elle avait apporté une telle dévastation sur une telle échelle. Avec la dissolution de l'URSS, le caractère international de l'accident de Tchernobyl est mieux apparu car ce sont 20% des terres biélorusses qui, à ce jour, sont zones interdites, 20 % de terres où malgré tout, les gens vivent, existent, cultivent, mangent, boivent, dorment, se lavent, se baignent, maintiennent une vie économique et sociale. Qui s'en souvient ?

Alors, oui, une fois encore, un texte de témoignages, traduit du Russe, sait nous émouvoir aux larmes, sait nous prendre au défaut de la cuirasse, sait nous rendre minuscules devant l'immensité de la tragédie comtée. Merci aux éditeurs qui ont pris le risque de nous offrir une si poignante traduction qui sait si bien rendre une bonne partie de l'émotion originale car la littérature d'Europe de l'Est, étant tellement émotionnelle est souvent difficile à restituer dans le cadre de nos habitudes de lecture en langue française, nettement plus tamisée.

Cyrille Clément - - 55 ans - 24 avril 2011


Un livre poignant 10 étoiles

Un livre poignant, prenant, des témoignages d'une horreur à n'en plus finir, mais tellement vrais... Des jeunes pompiers brûlés jusqu'aux os par la radioactivité et dont l'espérance de vie est de 14 jours, des femmes accouchant d'enfants malformés, des vieilles retournant vivre parmi des villages fantômes et y ramassant des morceaux de césium...

Il y a tout cela dans ce magnifique livre, tout cela et bien d'autres témoignages encore, car comme toujours avec Mme. ALEXIEVITCH ce livre est avant tout un reportage de journalisme et du très grand journalisme.

Le tout par un auteur persécuté dans son pays (Biélorussie) et qui a dû s'exiler, un grand grand livre d'un très grand auteur... Messieurs de l'Académie Suédoise à quand un prix Nobel de Littérature plus que mérité...

Septularisen - - - ans - 21 juin 2005


BOUM 10 étoiles

C’était juste avant le joli moi de mai que son cœur a fait BOUM. Le soleil brillait, les oiseaux gazouillaient, la pérestroïka n’était qu’une tache rouge sur un front dégarni et… BOUM. Une grosse saloperie de réacteur nucléaire a explosé. Cela se passait en 1986 à Tchernobyl et…

… bien sûr cette saloperie d’atome que maîtrise l’homme comme il maîtrise le monde et l’univers, cette saloperie donc a pris fait BOUM, s’est volatilisée dans l’air sous la forme d’un facétieux nuage qui, au gré du vent, s’est transporté, ô merci mon Dieu, partout sauf chez nous en France, puisqu’il a contourné nos frontières comme nous l’annonçait le gouvernement de l’époque, dormez en paix braves gens, tout va bien, BOUM…

…. le sujet du livre de Svetlana Alexievitch est bien cette saloperie de centrale nucléaire qui a fait BOUM, attention, pas de souci, all is on control ma poule, l’atome civil c’est cool, ça fait de mal à personne, bon, ça chatouille un peu si ça fait BOUM, ça détache des morceaux de corps, ça brûle l’intérieur, ça file la leucémie et autres cancers croquignoles, ça fait naître des nourrissons aplasiques, aplasiques ?, c'est-à-dire à qui il manque quelques petites choses plus ou moins essentielles, qui un rein, qui un vagin ou une verge, qui un anus, qui une bouche, qui les oreilles, qui tout à la fois, mais derechef, attention, le gentil nucléaire civil est aussi un farceur quand il fait BOUM, il multiplie les doigts, les têtes, les membres, les glandes, les cellules, ah qu’est-ce qu’on se marre !...

… La supplication est un documentaire, le récit in vitro de l’apocalypse en fusion, l’auteur va chercher 10 ans après le grand BOUM en 1996 des témoignages chez les premiers intéressés, les Biélorusses, ainsi que chez tous ceux qui, encore en vie mais pas pour longtemps parce que l’atome civil est à l’image de l’homme un meurtrier sournois, ont eu à faire à Tchernobyl, les liquidateurs, les évacués, les enfants, les savants, les ivrognes, les mères, les femmes de pompiers, etc., Alexievitch interroge du regard et laisse parler, elle récolte, elle est une sorte de dosimètre humain à échelle planétaire, elle nous prévient, elle nous avertit, la bête est là qui nous guette…

… et c’est une horreur, et c’est monstrueux, une honte pour l’Homme apprenti sorcier, une tragédie préméditée, une tragédie qui à moyen terme, parce qu’il faut créer des emplois, être à la pointe de la technologie, détenir le pouvoir, s’en mettre plein les fouilles, se cacher la vérité, se prendre pour un dieu… ce qui donc à moyen terme se reproduira, ça fera…

… BOUM mes biens chers concitoyens consommateurs d’électricité pas chère, de cette électricité atomique dont la civilité va vous péter à la gueule un de ces quatre matins, et nous nous réveillerons avec de jolies taches mauves sur tout le corps, et nos enfants saigneront du nez, des oreilles, par tous les pores, ils nous regarderont avec leurs grands yeux gonflés et suppurants, ils nous demanderont pourquoi, pourquoi ?, et nous leur répondrons, perdant une ou deux dents dans l’explication, que non c’est pas de notre faute, que c’est de la faute à pas de chance, alors nous ferons une grande fête du nucléaire pour conjurer le sort, nous bouffant les moignons faute de denrées comestibles…

… mieux encore, ne va-t-on pas tout tenter, lécher un maximum de culs atomiques, pour accueillir la dernière saloperie nucléaire que nos têtes savantes ont inventée pour mieux exterminer les générations futures, une belle saloperie qui fera, qu’on le nie ou non, BOUM un de ces jours, rendez-vous compte de la manne (ou mânes ?) économique que représente cette nouvelle saloperie surgénératrice de mort, Cadarache sera bientôt le Silicon Valley du Sud, et plus tard l’Hiroshima de l’Europe, tout est une question de temps et de bêtise avant le grand BOUM…

… La supplication de Svetlana Alexievitch est un livre exemplaire qui devrait être inscrit au programme de nos chères têtes blondes (avant de devenir rousses, mauves, noires, avant que l’atome civil ne les digère et en face des morceaux de charbons) dès la classe de seconde, c’est un livre que nos décideurs devraient lire en famille, à leurs enfants en leur expliquant qu’eux, leurs pères, leur mères, sont ceux qui mettent en place le grand BOUM à venir, qu’ils en aient pour une fois dans leurs têtes plutôt que dans leurs pantalons, qu’ils disent la vérité sur cette saloperie de nucléaire, une fois n’est pas coutume qu’ils se rassurent…

… pour la vérité sur le nucléaire civil allez jeter un coup d’œil sur : www.sortirdunucleaire.org, et surtout lisez le livre de Svetlana Alexievitch, vous comprendrez que l’atome civil et plus généralement le nucléaire est une SALOPERIE.

Lamanus - Bergerac - 65 ans - 28 janvier 2005


Et ça continue !... 8 étoiles

Des centrales comme celle de Tchernobyl ils en ont encore plusieurs qui tournent toujours !... Mais ils n'ont pas les moyens, disent-ils, pour faire le nécessaire. Je n'ai rien contre les Russes, mais aussi longtemps que leurs problèmes de mafias ne seront pas résolus, ils ne s'en sortiront jamais ! (Euh??? et dans notre jardin ? A propos de mafias... Pas pareil, mais pas clean quand même...) Et puis ils ont encore leurs stocks de déchets nucléaires enterrés sous une rivière et cela pollue sur plus de 100 km parce que l'abri fuit ! Là aussi ils ont un taux record de cancers... Et nos politiciens ?... Ils nous ont dit quelque chose quant à nos risques lors de l'accident de Tchernobyl ? Ils ont fait procéder à une crémation systématique de nos légumes en cours de croissance ?...

Jules - Bruxelles - 80 ans - 10 janvier 2002


Fort et vrai. 9 étoiles

J'ai eu la chance de rencontrer la courageuse Svetlana à Bruxelles il y a un peu plus d'un an. Courageuse car la version officielle des autorités biélorusses est qu'il n'y a plus de radioactivité dans le pays. Gare à ceux qui osent prétendre le contraire! Un des plus éminents scientifiques biélorusses, directeur de la faculté de médecine de Gomel est en prison pour avoir osé dénoncer le discours officiel. J'ai moi même fait plusieurs séjours dans la région depuis 1992 et j'ai rencontré beaucoup de victimes dont la plupart sont nées bien après la catastrophe! Le taux de cancers de la thyroïde est 500 fois supérieur à la moyenne mondiale... et ce n'est qu'un exemple! J'ai visité en 1992 des villages qui avaient été évacués... cette année, j'ai pu constater qu'ils étaient de nouveau habités! Une pure folie!

Patman - Paris - 62 ans - 10 janvier 2002


Au royaume d'Ubu et de la lâcheté 8 étoiles

Les hommes politiques sont les rois pour penser aux problèmes alors que les catastrophes ont déjà éclaté ! D'accord, ils ont beaucoup à penser, mais quand-même !... On savait que cette centrale était dangereuse, on a laissé tourner encore des années une des deux turbines, tout aussi vieille, et plusieurs centrales du même type sont encore en fonctionnement !... Et que dire aussi des dizaines de sous-marins déclassés, chargés de leurs têtes nucléaires et qui pourrissent au bord des côtes en Russie... Pas d'argent pour les détruire, paraît-il !... Il n'y en aura pas plus pour soigner les malades le jour où le tout va laisser fuir les radiations ! Un autre sommet dans le genre... Plusieurs pays européens ont signé un accord avec la Russie pour pouvoir y stocker leurs déchets radioactifs. Cela devrait se faire sur un site enterré près d'une ville en Russie qui ne figure pas sur les cartes. Les Russes y ont construit un gigantesque bâtiment de béton sous une rivière. Il est déjà bourré et, sur des kilomètres au delà de cette construction, les eaux sont radioactives et on y enregistre un taux record de cancers parmi la population. Mais les Russes acceptent le contrat de milliards de dollars pour accepter nos déchets alors qu'eux, comme nous, nous savons qu'ils n'ont pas ce qu'il faut pour les stocker !... Docteur Folamour est toujours bien vivant !... Je rappelle ici le livre "Demasiado Corazon" de l'écrivain et journaliste Capucci que j'ai critiqué sur ce site. Là, c'était les Américains qui se servaient du Mexique comme poubelle, au plus grand mépris des populations locales...
Un monde de fous, d'inconscients, d'irresponsables !... Et pendant ce temps là, nous continuons à vivre comme si l'avenir était devant nous...

Jules - Bruxelles - 80 ans - 12 décembre 2001