Les Brumes du passé
de Leonardo Padura

critiqué par Tistou, le 24 février 2009
( - 68 ans)


La note:  étoiles
L'amour des livres
Mario Conde, l'emblématique commissaire de La Havane, et héros récurrent de Leonardo Padura, est bien là. Pour autant il ne s'agit pas vraiment d'un polar.

D'abord, Mario Conde, il a quitté la police. Faudrait voir à ne pas l'oublier! Il est vieux, se sent vieux, vit relativement misérablement d'achat et revente de livres anciens et se satisfait de la compagnie de ses vieux amis, aussi misérables que lui – mais qui n'est pas misérable à Cuba et à La Havane en particulier (notre histoire se situe en 2003)?
Donc, les livres. Les livres anciens. Achat au petit bonheur, au coup de chance, à l'intox et revente … pareil, à l'intox, au coup de chance et au petit bonheur. En tout cas à la sauvette.

“A mesure qu'il s'enfonçait dans les mystères du métier, Mario Conde découvrit qu'il préférait l'exercice de l'achat à celui de la revente. Vendre des livres sous un porche, sur le banc d'un parc, à un coin de rue prometteur, rongeait les restes de son orgueil dévasté et lui causait surtout l'insatisfaction d'avoir à se défaire d'un livre qu'il aurait souvent préféré garder. C'est pourquoi, même si ses revenus en souffraient, il avait adopté une stratégie qui faisait de lui un simple pisteur, chargé d'alimenter les stocks des autres bouquinistes. Dès lors, au cours des prospections destinées à découvrir des mines de livres, le Conde, comme tous ses collègues de la ville, avait adopté trois techniques complémentaires et d'une certaine façon antagoniques ...”

Et puis il y a cette bâtisse du Vedado, vieille maison coloniale en voie de décrépitude où Mario Conde rencontre Dionisio et Amalia, un frère et une soeur déjà vieux, qui survivent dans la maison … familiale (?), gardiens en quelque sorte de trésors de livres comme un revendeur de livres n'oserait en rêver. Mais, bien entendu, Mario Conde n'est pas un revendeur de livres comme les autres. Surtout, il n'est pas vénal, et, atavisme d'ancien commissaire oblige, il flaire un mystère, une tension attachée à cette maison et ses deux habitants.

Se greffe là-dessus, car notre homme n'est pas cubain pour rien -il est sentimental, une affaire “d'envoûtement” à une voix écoutée et réécoutée sur un 45 tours d'une chanteuse quasi inconnue qui se révèle avoir des liens avec … la maison, ses occupants, voire Mario Conde. Ce n'est donc pas qu'une affaire de livres.

Mais c'est d'abord une affaire de livres et quelque part “Les brumes du passé” m'ont fait penser à “L'ombre du vent” de Carlos Ruiz Zafon, en moins baroque, en plus “réel”, mais avec cette même démarche de partir des livres, d'un livre, pour y revenir.

Leonardo Padura traite là de Cuba, de sa misère, de ses joies aussi, et de l'amour des livres.

Son écriture est très agréable. Il écrit des polars, mais pas que. Il y a bien d'autres sentiments qu'une simple quête ou enquête dans ces «brumes du passé».
Très belle rencontre 9 étoiles

Je viens de terminer ce roman et j'en suis encore toute retournée.
Quelle découverte !!!
Les personnages sont très bien travaillés, on arrive à s’imprégner de l'atmosphère lourde de ce pays aux recoins très dangereux.
Et quelle plume, j'ai adoré toutes les images que fait ressortir cette écriture.
Une chose est certaine je vais aller un peu plus loin à la découverte de cet auteur et de son "Condé".
Si j'enlève 0.5 étoiles c'est qu'à un moment je me suis un peu perdue dans le détail des livres de la bibliothèque, c'était un peu trop.

LesieG - CANTARON - 58 ans - 11 mai 2015