La nouvelle guerre du sexe : L'emprise du libéralisme économique sur notre sexualité
de Elisabeth Weissman

critiqué par Stéphane Evreux, le 22 janvier 2009
( - 58 ans)


La note:  étoiles
Exposé d'une triste réalité
Une analyse pertinente, argumentée, développée, sur le conditionnement sur notre vie amoureuse et sexuelle par la société d’hyperconsommation actuelle en France, en Europe et aux Etats-Unis. Pertinent mais triste, comment ne pas reconnaître rapidement les dévoiements et exploitations économiques de notre intimité. Les codes presque imposés par les médias, le système économique, la pensée ultralibérale qui fait ses choux gras de tout, de toutes et de tous. On reconnaît clairement l’exploitation des sensibilités psychologiques du genre humain. Dans les années 80, quiconque faisait une école de commerce connaissait l’adage : « il faut créer des besoins », aujourd’hui ce terme est obsolète et Elisabeth Wissmann à mon sens en fait la démonstration. Nous devrions dire maintenant : « il faut créer des addictions ». Exploitons la misère affective et/ou sexuelle afin de faire de l’argent. La névrose a le vent en poupe chez les ultralibéraux, qui ne se privent pas de générer des profits colossaux sur le dos du psychisme humain et de ses légitimes travers. Le discours dans ce livre ne stigmatise pas la politique actuelle mais établit un parallèle très net entre profit et souffrance humaine. Le marché de la pornographie y est bien explicité avec tous les tenants et aboutissants. Des mots qui choquent au fil de la lecture : chosification, réification, femme objet (et homme objet), travailleur du sexe, déshumanisation, etc. Je regrette deux choses : 1) il est écrit dans le livre que les conditions de travail des acteurs et actrices de films pornographiques doivent être améliorées, parler de « conditions de travail » c’est déjà accepter l’exploitation des corps et cela ne dénonce pas, cela tendrait à une demande de légitimité du genre dans l’inconscient collectif par une sorte de convention collective du X, avec grille de salaires, etc. 2) un passage met en avant un genre de porno plus « light » et présenté comme plus naturel, presque romantique, l’auteur cite secondsexe.com en exemple mais après visite dudit site la page d’accueil nous expose… des sex-toys, objet très décrié par Elisabeth, non sens ou décalage entre publication et évolution de ce site ? Les films proposés sont à télécharger, les titres sont clairement grossiers, cette présentation d’une forme de romantisme dans la pornographique semble être un échec, bien que l’idée soit intéressante si elle est censée réhabiliter la notion de partage et d’amour dans la relation amoureuse, érotique et sexuelle. Un bon livre tout de même mais que je ne garderai pas dans ma bibliothèque, il sera plus utile de le revendre sur un site spécialisé dans les livres d’occasion car finalement c’est je crois diffuser une parole plus juste, plus belle, que de faire connaître ce livre et son analyse cinglante. Une lecture à recommander. Désespéré(e)s s’abstenir si en période personnelle difficile car ce livre si il éclaire est tout de même « brutal » et peut heurter certaines sensibilités. Mais mieux connaître la réalité c’est être mieux à même de faire un choix, le mien était déjà fait avant la lecture et je partage les opinions de son auteur sans réserve.

Stéphane d’Evreux