Homo Sapiens
de Collectif

critiqué par Bolcho, le 11 décembre 2008
(Bruxelles - 76 ans)


La note:  étoiles
L’homme sage ?
Un bouquin qui fourmille d’infos et d’avis en sens divers : différents spécialistes y résument leurs thèses, parfois contradictoires, qui portent sur les origines de notre espèce.

Quelques idées pourtant bien établies y prennent un sacré coup de vieux, notamment celle (dite « East Side Story ») qui veut que le berceau de l’humanité ait été l’Afrique de l’Est et qu’un événement climatique de très grande ampleur aurait poussé les préhominiens a quitté leur forêt pour parcourir la savane, la station debout devenant un avantage décisif.
Les auteurs font appel à l’archéologie, à la génétique, à l’éthologie et nous dressent un portrait contrasté de ce que nous fûmes.
Quelques exemples en passant.

Au contraire des abeilles, les grands singes vérifient que leur interlocuteur est bien en train de les regarder quand ils délivrent un message ; c’est une émission intentionnelle de signaux. Cette aptitude à prendre en compte le point de vue de l’autre est aussi décelable dans les actes d’empathie dont ils sont capables.

Savez-vous que le Y humain ne contient que 78 gènes contre 3000 à 4000 pour le X ? Le Y aura disparu dans 10 millions d’années et aura perdu toute efficacité bien avant. On sait déjà que le fœtus mâle est plus fragile, que les accidents à la naissance sont plus fréquents et qu’il y a plus de mortalité périnatale chez les garçons. Adultes, les hommes sont aussi plus vulnérables aux maladies et, de manière générale, dans les pays développés, la différence d’espérance de vie grandit en faveur des femmes (elle est passée de trois ans au début du XIXe siècle à six ou sept ans aujourd’hui. Sans compter le progrès technique qui permet d’envisager la procréation sans mâles…

Autre chose. La taille des groupes sociaux des primates croit avec celle de leur néocortex (un « meilleur » cerveau permet de gérer plus d’informations). Notre insistance à nous regrouper nombreux dans les stades ou les boîtes de nuit serait donc liée à un néocortex monstrueux : on n’aurait pas cru, hein ?

La fonction sociale de l’épouillage chez les chimpanzés est remplacée par le langage chez les humains. C’est plus efficace : on peut parler à plusieurs personnes à la fois.

Les Esquimaux Aivilik du Groenland n’ont pas de mots pour « art » ou « artiste ». L’Esquimau transmet une tradition anonyme et n’essaie jamais d’imposer son individualité : il disparaît derrière son œuvre. D’ailleurs, quand une sculpture est achevée, elle a de fortes chances d’être abandonnée sur un tas d’ordures : toute la valeur d’une représentation se situe dans l’acte et non dans le produit fini.
La plupart des ethnographes affirment que l’ « art » n’existe pas dans la plupart des cultures du monde. C’est un concept imposé par les occidentaux.

Une curiosité sur l’ « art » préhistorique. On trouve souvent le thème de l’ovale en partie divisé par une ligne médiane. On a toujours interprété cela comme des représentations de vulves. C’est aujourd’hui discuté : des empreintes de sabots ? Important, parce que cela montrerait que les Aurignaciens maîtrisaient la métonymie. Cela dit, c’est vrai aussi pour les vulves.