La traversée du Mozambique par temps calme
de Patrice Pluyette

critiqué par Dinama, le 25 novembre 2008
( - 53 ans)


La note:  étoiles
D’une lecture ennuyeuse et de troublantes similitudes.
Fort de critiques plutôt élogieuses, je me suis procuré le roman de Patrice Pluyette « La traversée du Mozambique par temps calme ». Bien mal m’en a pris ! Cette traversée, pour moi du moins, s’est vite muée en grand calme plat dans les plus mornes des sargasses. Pour le dire platement, je ne me souviens pas de m’être emmerdée à ce point durant une lecture. Un salmigondis de péripéties gratuites, faux coups de théâtre téléphonés, descriptions et narrations foireuses entrecoupées de platitudes pseudo-philosophiques. Malgré de louables tentatives de créer l’écriture à géométrie variable que requiert ce genre d’ouvrage, pas un seul instant la magie du verbe n'agit. L’auteur lui-même a dû se barber à rédiger ce balourd pensum, qu’un tapage médiatique voudrait nous faire prendre pour une divertissante parodie du roman d’aventures mais qui nous assène dès les premières pages la juxtaposition de cerises insipides sur un bâton informe. Je l’imagine poussant un « Ouf ! » de soulagement à l'écriture du mot "Fin". « Yes, I could ! ».
Bien sûr, puisque c'est paru chez un « grand », les thuriféraires appointés ne manquent pas de coller à ce magma informe le qualificatif tellement galvaudé, d’"initiatique". Je les engage à relire London, Melville et Swift pour retrouver, s’ils en sont capables, le sens de ce terme associé au roman d’aventures, réelles ou fantastiques. Pour une fervente de lectures, c’est un crève-cœur de constater dans quel bourbier mercantile patauge aujourd'hui une édition française – pardon, un book-bizness parisien – qui nous a donné Chateaubriand, Hugo, Balzac, Zola, Proust, pour ne citer que de grands anciens…

Mais il y a pire : dès les premières pages, m’a envahie un sentiment de déjà-lu. Et un titre m’est revenu à l’esprit : « Mes Grandvoyages à travers le vaste monde », de Françoise Pirart, paru en 2000 aux éditions Luce Wilquin. J’ai repris l’ouvrage et des similitudes aussi nombreuses qu’étonnantes m’ont sauté aux yeux. Passons sur les anachronismes voulus, un mélange de primitivisme et de modernité, les villes abracadabrantes, les précisions géographiques fantaisistes, les peuplades aux mœurs grotesques pastichant les nôtres, les noms locaux rappelant notre quotidien technologique, le passage sans transition des banquises aux forêts tropicales, des incendies aux inondations, plus tous les moyens de transport imaginables, y compris montgolfière et radeau : ils font partie de la panoplie inhérente à ce genre d’ouvrage, et leur ressemblance peut être l’effet du hasard (quoique, avec une telle accumulation… !)
Par contre, la proximité de certains personnages sidère. Le capitaine Belalcazar de Pluyette évoque l'Onc' de Pirart, la Fontaine de l’un les accompagnatrices de l’autre… Chez les deux, des personnages apparaissent et disparaissent sans raison pour reparaître plus tard de façon tout aussi aléatoire (mais, avec chez Pirart, une cohérence interne du récit qui fait défaut à Pluyette). Surtout, le Jean-Philippe de “La traversée” est une copie conforme du Gâlafron mâtinée du Comte des “Grandvoyages” : changements de taille, tantôt “bon” et tantôt “méchant”, cadavre transporté qui ressuscite de but en blanc, découverte de sa propre voie en fin de périple…
Interpellent également la construction identique, parodique « à l’ancienne », en chapitres avec leurs titres pseudo-descriptifs souvent loufoques, les digressions, les discours pseudo-scientifiques, les ruptures stylistiques, les énumérations… Jusqu’à une énigme avec solution à l'envers, comme dans les revues pour jeunes, que l’on trouve à la page 85 des “Grandvoyages”, à la page 247 de la “Traversée”.
Mais alors que les changements perpétuels de style, chez Pirart, collent parfaitement au côté pataphysicien de son road-movie, avec une unité d’inspiration jouissive, sans que jamais l'idée de "gratuité" ne vienne à l'esprit, tout me semble aléatoire et fabriqué chez Pluyette, comme s'il devait trouver n'importe quoi pour faire avancer le schmilblick jusqu'au terme des trois cents pages fixées, sans la moindre nécessité interne.
Bref, je suis intimement convaincue de ce que « La traversée du Mozambique par temps calme », sans être à proprement parler un plagiat de « Mes Grandvoyages à travers le vaste monde », en est à tout le moins une – mauvaise – resucée. À chacun de se faire une opinion, mais il me paraît impossible de se prononcer sur l’un sans avoir lu aussi l’autre.
Vogue la galère 3 étoiles

Impossible d'accrocher à cette caricature d'aventure. Certes, on nage en plein dedans, c'est assumé, rien de sérieux ici mais j'ai l'impression désagréable d'avoir subi une farce qui ne m'a pas fait rire. Les personnages sont vraiment trop caricaturaux, certains n'ont aucun relief (les femmes), les moments de panique sont plats, les rebondissements interviennent comme une perruque dans le bouillon (carrément), et les quelques blagues disséminées çà et là ne m'ont arraché aucun sourire, pourtant j'étais détendu, en vacances...
On est dans le pastiche de roman d'aventure, j'ai bien compris, mais alors quel est le message?

El grillo - val d'oise - 50 ans - 1 septembre 2009


Un roman fabuleux et talentueux. 10 étoiles

Je suis très étonné des autres critiques car j'ai profondément adoré ce roman de Patrice Pluyette. Je suis rentré dans l'ambiance dès la première page, l'histoire est incroyable, les protagonistes si touchants. Pour moi ce livre n'est pas plat, il est totalement en relief, ça bouge tout le temps, on rit à gorge déployée car l'humour de Pluyette est ravageur. On est dans l'autodérision permanente, c'est un livre qu'il faut lire au second degré, Pluyette se moque de ses personnages, de leurs défauts, même quelquefois de sa propre histoire. J'ai aimé l'écriture de Pluyette, c'est un homme qui SAIT écrire, et c'est rare. Je me suis senti embarqué sur cette goélette comme les personnages. Je trouve que ce livre apporte quelque chose de plus à la littérature, il va plus loin, il dépasse le réel, le sublime, tel un conte, un conte philosophique sur la quête d'un idéal inaccessible.
Bref, j'ai été séduit... et heureux que ce roman figure sur les listes des Goncourt, Médicis. Enfin un livre qui sort du lot des romans poussiéreux, il est pleinement tourné vers l'avenir.

LV - - 50 ans - 18 décembre 2008


traversée du désert? 2 étoiles

Dans un des commentaires précédents (de Dinama), il est fait allusion des curieuses coïncidences d'espaces, de tournures de phrases, de mots, dans ce roman de Pluyette, avec celui de « Mes Grandvoyages à travers le vaste monde », de Françoise Pirart, paru en 2000 aux Editions Luce Wilquin.
On peut effectivement aisément corroborer à cette critique, quand on a lu les comparaisons troublantes qui y sont mentionnées.

Est-ce un cas unique? non bien sûr!: on peut deviner que bien des romans sont des "presque copié/collé" d'autres romans, si possible d'anciens romans tant qu'à faire, pour ne pas éveiller l'esprit du lecteur, mais il arrive que parfois le "nouvel" auteur n'y a pas songé...et que le grand lecteur s'en aperçoive.
Alors là l'erreur est flagrante. Peut-on parler dans ce cas de plagiat? non, si la phrase n'est pas reproduite mot à mot, bien que... sur le plan justice je n'en suis pas si sûre que çà.
Voir aussi un lien/article paru au sujet du livre "La traversée du Mozambique par temps calme":
http://actualitte.com/dossiers/…

Béa44 - Nantes - 58 ans - 15 décembre 2008


Effectivement calme plat sur le Mozambique ... 2 étoiles

Des critiques élogieuses nous avaient guidés vers ce récit de voyage.
On aurait dû fouiller un peu plus sur le web car le voyage fut plutôt décevant.
La traversée du Mozambique par temps calme, voilà un titre peu banal.
L'écriture de Patrice Pluyette est du même tonneau. Ça foisonne, ça onirise, ça fait feu de tout bois et de n'importe quoi. Y'a de l'absurde et de la poésie, de la rêverie et du cauchemar, du surnaturel et du pas naturel, une bonne dose d'humour de potache et une pincée de Tartarin ou de Tarascon.
Une brochette de personnages peu banals s'embarquent pour le Mozambique à la recherche d'un trésor et finiront dans les neiges canadiennes ou dans les jungles amazoniennes.
Mais tout ce petit monde s'agite sous nos yeux sans qu'on n'y prenne vraiment part. Un peu comme des clowns de cirque : on regarde, on s'amuse, mais on n'est pas vraiment concernés.
[...] Les grognements se font entendre à peu près chaque nuit depuis trois jours et ça devient inquiétant; de toute évidence un animal féroce, femelle de type panthère d'Amérique, jaguar adulte ou tigre Amba, les suit à la trace. À plusieurs reprises, on a même pu sentir son souffle contre la toile de tente. En vérité, la situation n'offre pas d'échappatoire; le sort de nos aventuriers est lié au bon vouloir de cette bête affamée qui n'attendra pas éternellement que la viande soit cuite; il est probable que notre histoire s'arrête dans trois pages sans plus de personnages à notre charge que cette bête dont nous ne saurions à elle seule tirer une histoire en rapport avec le sujet de la nôtre sans ennuyer le lecteur. Nous dirons donc que les hommes et femmes composant ce récit, nonobstant le danger rôdeur, ne perdent pas leur courage, continuent chaque matin à démonter le camp pour mener à bien leur progression lente et difficile, tous les soirs à planter la tente dans un endroit différent, toutes les nuits à trembler dans leurs lits en s'obligeant à prier, à invoquer l'aide d'un dieu tout-puissant à défaut d'un car de CRS armés.
Qu'on aime ou qu'on aime moins, il reste la prouesse technique du sieur Pluyette qui manie la plume avec habileté.

BMR & MAM - Paris - 64 ans - 12 décembre 2008