Bastard Battle
de Céline Minard

critiqué par Feint, le 8 novembre 2008
( - 61 ans)


La note:  étoiles
« Ouvre ce bréviaire monseigneur, belle dame. »
Elle est bien, vraiment, cette collection LaureLi des éditions Léo Scheer. C’est ma quatrième bonne pioche de lecteur avec le dernier – pardon, le nouveau – roman de Céline Minard : Bastard Battle. C’est un drôle d’objet, ce Bastard Battle : dans une langue truculente farcie de médiévismes croustillants et parée de ci de là de quelques incongrus anglicismes, Céline Minard – ou plutôt « Denisot-le-clerc, dit le Hachis et Spencer Five » – nous narre l’épopée d’une petite coalition de résistants bien typés, résistant aux violences et perfidies de l’infâme Bastard Aligot de Bourbon, auquel ils ont repris la bonne ville de Chaumont, prise d’assaut par ce dernier. Bien typés les personnages, et bien trempés les characters, pardon, les caractères ; jugez plutôt : autour de Denisot-le-clerc, se sont rassemblés le chevalier Enguerrand de Montorell, dit « à la charrette » ; le maigre Billy ; le vieux samouraï Akira qui vous sabre une puce sur la joue sans vous laisser d’égratignure ; Tartas le fort ; Dimanche-le-loup le faux-saulnier et parfait pipeur ; et la « démone » Vipère-d’une-toise, anachronique maîtresse en l’art du Kung-fu, douée de l’accent qui va avec. Vous comptez bien : c’est bien une sorte de remake made in chez nous des Sept samouraïs – voire des Sept mercenaires (Billy a même des piftolets !), que nous offre Céline Minard. Les combats y sont fameux, tantôt joutes à l’ancienne, tantôt félins et virevoltant quand menés par le petit paysan Brucelet, transcendé par l’enseignement de Vipère-d’une-toise. On s’amuse beaucoup, on s’étonne d’une telle invention ; c’est si endiablé d’un bout à l’autre qu’on se surprend tout soudain, huitième samouraï, à provoquer à haute voix le Bastard (heureusement que maman n’entend pas) : « Avoûtre, vessard, tu chies dans tes chausses ! Amène-toi qu’on en finisse ! Eh bastard ! Bastard tu es par la fendance de ta mère mais vray bastard, tu t’es fait toi-mesme ! »
Quand l'écrivain s'éclate ! 8 étoiles

Une chose dont on peut être sûr, ou quasiment, c'est que Céline Minard a dû s'éclater à l'écriture de ce livre ! Enfin, c'est un sentiment que j'ai eu, tout au long de ma lecture. A éclater de rire parfois, tant les scènes décrites sont visuelles et comiques, avec beaucoup de rouge, il est vrai, ce siècle ne faisait pas dans la dentelle ! Et ce vocabulaire tout en fusion, ce vieux Français revisité, des mots presque incompréhensibles parfois, mais ça passe ! Un rythme effréné, une cadence infernale, quelques pages pour s'habituer et nous voici entraînés dans ces combats invraisemblables.
Un bel exercice de style.

Nathafi - SAINT-SOUPLET - 57 ans - 28 janvier 2015


un ovni pop ! 8 étoiles

Attention OVNI pop ! même si l'auteur a visiblement énormément travaillé la restitution de la langue de l'époque ce qui en fait un objet assez unique à lire (pour les non spécialiste de la littérature du XVeme siècle), le véritable intérêt pour moi se situe dans le brassage hallucinant de codes du moyen âge à la sauce veroven de "la chair et le sang" et de la culture filmique HK avec sa mythologie et ses personnages truculents (dont drunken master !!)

Misso - - 60 ans - 18 janvier 2014


Chanson de (fu...ing) geste 8 étoiles

Adoncques, narrons notre Bastard battle experiment, lecture courte qui aurait gagné à l’être davantage et se résume en une question : pourquoi ?

Pourquoi Céline Minard a-t-elle pris la plume un beau matin et décidé de transposer les 7 mercenaires au moyen-âge et de raconter cela dans un sabir mêlant l’anglais à un vieux français de fantaisie ? Pourquoi y mettre autant de sang, de viols, de pendaisons ?

Certainement pas pour raconter une histoire, d’abord les écrivains ne racontent plus d’histoire et l’auteur maltraite assez cette grande clownerie de Bastard Battle pour nous faire comprendre que là n’est pas la question. Oublions portraits psychologiques et peinture sociologique historique, on est dans ce domaine au niveau d’une mauvaise fiction de Canal+ à la différence qu’ici, c’est fait exprès.

La vraie raison d’être de Bastard battle, il me semble, c’est sa langue. Sur ce point, incontestablement ce livre est réussi : le mélange de français médiéval, de français médiéval fantasmé, d’anglais et peut-être encore d’autres ingrédients non identifiés, qu’emploie l‘auteur donne rythme et musicalité au livre. On le lit comme on a l’impression que les conteurs, jadis, pouvaient déclamer leurs fabliaux. Cette langue est à la fois suffisamment proche de nous pour être compréhensible et facile à lire, et suffisamment proche du français médiéval pour qu’on soit dépaysé ; de temps en temps un « jekspirien » ou des piftolets inattendus croquent comme des grains de sel. Surprenant.

A la question du pourquoi, il faut donc se rendre à la conclusion que Bastard Battle est un exercice de style, certes réussi, mais que ce n’est guère plus. En cela, il aurait gagné à être un peu plus bref, notre appréciation de la virtuosité de dame Minard n’en aurait pas été amoindrie.

Guigomas - Valenciennes - 55 ans - 18 octobre 2013


Gore pseudo-historique 4 étoiles

En 1437, la ville de Chaumont est prise d’assaut et sauvagement pillée par le Bastard de Bourbon. Mais, au milieu des combats, apparaît un étrange adversaire, une femme-samouraï qui manie le sabre à la perfection et maîtrise au mieux le kung-fu et les techniques d’arts martiaux de l’Orient. Profitant de l’intervention d’un autre routier, Enguerrand, une poignée de combattants, las des exactions sanglantes du Bastard, réussit à reprendre la ville, à organiser sa défense et à repousser les assaillants. Cet échec ne portera pas chance au ravageur des campagnes…
Ce livre ne peut pas être considéré comme un véritable roman historique. Ce « bastard de Bourbon » semble n’être qu’un pur produit de l’imagination de l’auteur. Les seuls bâtards ayant laissé une trace dans l’histoire de l’époque, étant Jean II dit « le connétable de Bourbon », né en 1426 et Hector, archevêque de Toulouse, n’ont rien à voir avec ce monstre sanguinaire assez improbable au demeurant. Ce n’est pas non plus un roman fantastique car on ne trouve aucune fantaisie, aucune féerie et aucune poésie là-dedans. Juste un bouquin d’horreurs, très gore. Le sang coule à flot, les sévices les plus sadiques s’accumulent et Céline Minard semble s’y complaire. Une longue suite de combats, tueries et tortures sadiques qui finit très vite par lasser alors que le livre ne comporte qu’une centaine de pages. Seul intérêt : la langue utilisée. En apparence moyenâgeuse, truculente et exotique, mais en réalité un simple trompe l’œil, sorte de canada dry langagier. De plus, Minard truffe ses phrases de mots et expressions anglaises modernes aussi anachroniques et incongrues que la femme-samouraï de son histoire dont on se demande ce qu’ils viennent faire sous la plume d’un clerc de l’époque. L’écrivaine croit sans doute inaugurer un nouveau genre : le « Gore Pseudo-historique ». Les vrais amateurs d’Histoire n’y trouveront pas leur compte, seuls peut-être les lecteurs de bouquins d’horreur… et encore…

CC.RIDER - - 66 ans - 17 novembre 2008