Marie-Antoinette
de Stefan Zweig

critiqué par Miss teigne, le 29 octobre 2008
( - 43 ans)


La note:  étoiles
Chronique d'une mort annoncée
C’est sans concession que Stephan Zweig commence à brosser le portrait de l’étourdie Reine de France qu’était Marie-Antoinette. Il la décrit comme l’histoire s’en souvient : oisive, frivole et dépensière. Pourtant, Zweig y ajoute une touche d’humanité aidée par une étude psychologique intéressante du personnage.

Plutôt que de la charger de tous les maux que connaissaient la France de l’époque, Zweig nous présente une archiduchesse d’Autriche, futur dauphine de France, expatriée à 14 ans et mariée à l’inconnu qu’est pour elle le futur Louis XVI, qui s’avèrera faible, indécis, timide et maladroit.

Une longue partie consacrée à la soif des plaisirs et la frivolité d’une jeune sotte, dont les vices soigneusement entretenus ont trouvé à s’épanouir grâce à un entourage envieux et malveillant, est certes divertissante. L’instant où tout bascule n’est pas clairement défini. L’insouciance est maîtresse jusqu’à ce que les mots terribles soient prononcés : "C’est une révolte ? Non, Sire, c’est une révolution".

Et commence alors le moment le plus intéressant, le plus poignant, qui révèle la femme dans toute sa profondeur. Une femme qui d’abord, refuse fièrement de s’incliner devant la Révolution pour l’honneur de la noblesse (qui se détournera lâchement d’elle) et ensuite pour que son fils soit reconnu comme héritier légitime du trône de France. Réputée pour son manque de curiosité et son manque d’intelligence, elle se révèlera pourtant d’un courage exemplaire et d’une subtilité étonnante face à tous les évènements qui aboutiront à la conduire devant ses juges pour qui elle était déjà condamnée.

On se prend de sympathie pour cette femme qui, après avoir connu et abusé de tous les privilèges que lui conférait son statut de souveraine, a essuyé ensuite toutes les avanies et mortifications au nom d’une Liberté et d’une Justice qui ont brillé par leur violence et leur iniquité. En voulant décapiter la Reine de France, ni la femme ni la mère n’auront été épargnées par des accusations aberrantes qui ont pourtant eu leur poids dans la balance de la culpabilité. Car, on le comprend clairement, le but de cette exécution était moins de "couper" tout lien avec le dernier vestige de la monarchie que de se débarrasser d’une otage encombrante. Marie-Antoinette, ex-Reine de France aura été jugée et condamnée à mort dans un procès de façade et malhonnête.

Enfin, Stefan Zweig justifie ainsi son approche humaine du personnage : "Nos idées relatives aux droits humains et moraux de la femme, le hasard l’eût-il faite reine, étant beaucoup plus large aujourd’hui qu’hier, nous sommes plus sincères et la vérité psychologique nous fait moins peur ; nous ne croyons plus, comme la génération précédente, que pour qu’on s’intéresse à un personnage historique il soit nécessaire de l’idéaliser à tout prix, d’en faire un héros sentimental ou autre, d’estomper les traits essentiels de son caractère et d’en exalter d’autres jusqu’au tragique. La loi suprême de toute psychologie créatrice n’est pas de diviniser mais de rendre humainement compréhensible ; la tâche qui incombe n’est pas d’excuser avec des arguties mais d’expliquer. Cette tâche a été tentée ici sur un être moyen qui ne doit son rayonnement en dehors du temps qu’à une destinée incomparable, sa grandeur intérieure qu’à l’excès de son malheur, et qui, je l’espère du moins, sans qu’il soit besoin de l’exalter, peut mériter, en raison même de son caractère terrestre, l’intérêt et la compréhension du présent." Ces lignes ayant été rédigées dans les années 30.

Objectif atteint en ce qui me concerne : Marie-Antoinette, ni ange ni démon… Seulement un être humain pétri d’ombre et de lumière. Un destin tragique et passionnant écrit de façon magistrale.
Moitié-moitié 7 étoiles

Cette biographie m’a légèrement déçu. Je finissais tout juste celle de Joseph Fouché qui m’avait emballé au point que je me propose de la relire un jour. Celle-ci je ne la relirai probablement jamais. Ce n’est pas qu’elle soit mauvaise mais il y a trop de longueurs et de répétitions surtout dans la première partie quand Marie-Antoinette est à Versailles puis à Trianon. On se demande pourquoi l’auteur se croit obligé de répéter à toutes les pages que Marie-Antoinette est frivole, écervelée et dépensière. Que vous l’écriviez deux fois, Monsieur Stephan Zweig – on a dû vous dire qu’il y aurait des Belges parmi vos lecteurs – passe encore ! Mais le dire dix fois, vingt fois, cent fois, pour finir, c’est un peu redondant !

Stephan Zweig ne trouve aucune excuse au comportement de la jeune Marie-Antoinette, et moi – sans avoir la prétention de le contredire – je lui en trouve quelques-unes : cette gamine de quatorze ans était auréolée du charme des jeunes adolescentes, elle était ravissante et on la condamnait à mourir d’ennui dans cette horrible cour de Versailles, peuplée de vieux messieurs tristes et snobs comme des pots de chambre ; elle était accaparée par ses tantes, les trois vieilles filles acariâtres de Louis XV, dont elle devait subir les radotages à longueur de temps et elle aurait dû faire la révérence devant la du Barry, cette poissarde entretenue par le Roi ! C’en était trop !
On la condamnait à s’éteindre dans les galeries de Versailles et, avec son joyeux Trianon, elle avait choisi la vie. On peut la comprendre. Bien sûr, elle aurait dû écouter les conseils de sa digne mère, l’Impératrice Marie-Thérèse d’Autriche, qui lui recommandait d’être moins frivole et, surtout, moins dépensière, mais à mon avis, son jeune âge pouvait expliquer son étourderie.

Et puis je pense que, dans cette biographie, Louis XVI est méchamment caricaturé : certes, il devait manquer de caractère et d’esprit de décision. Mais je ne crois pas que c’était l’imbécile décrit par Stephan Zweig et, là aussi, sans soucis de le répéter à chaque fois qu’il parle de lui. Par contre le double jeu joué par ses frères, les futurs Louis XVIII et Charles X, est très bien expliqué et très révélateur de ce nid de vipères où vivaient les Bourbon.

Après Versailles et Trianon, quand le couple royal est ramené de force à Paris, la biographie prend de la hauteur ; Marie-Antoinette, devient un modèle d’abnégation et se trouve bientôt portée à l’héroïsme. Mais nous sommes déjà à la moitié du livre.
On ne peut pas dire qu’on s’est ennuyé jusque là, il y a eu des passages remarquablement bien racontés ; par exemple, l’arrivée de Marie-Antoinette en France, l’affaire du collier et le grand amour de Fersen… mais cette première partie ressemble un peu trop aux cancans des magazines des familles royales que lisent nos belles-mères les longues soirées d’hiver.

Quelques personnages intéressants passent dans le récit : Necker, Mirabeau, La Fayette, Desmoulins, Danton… mais, à mon goût, ils passent trop vite.
Stephan Zweig a choisi de raconter tous les événements de la Révolution à travers le regard de Marie-Antoinette. Personnellement j’aurais préféré qu’il remette Marie-Antoinette dans les événements de la Révolution, comme il l’a si bien fait pour Joseph Fouché. C’eut été une biographie moins psychologique mais plus historique.  

En résumé, ce livre a des longueurs et des redondances mais il n’est jamais ennuyeux. Certains passages sont des morceaux d’anthologie comme seul Stephan Zweig peut les raconter. Finalement, avec cette biographie, les amateurs de psychologie seront comblés ; pour les amateurs d’Histoire, ce sera moitié-moitié.

Saint Jean-Baptiste - Ottignies - 88 ans - 30 juillet 2017


absolument génial 10 étoiles

Une plongée formidable dans ce temps si trouble de la fin du XVIIIe siècle, en suivant l'histoire si particulière de cette reine, le tout sous la plume du génie qu'est Zweig : un vrai régal.

Je conseille de poursuivre cette lecture avec la biographie de Fouché, du même auteur.

Krys - France-Suisse - - ans - 21 mai 2017


Passionnant du début à la fin 10 étoiles

Le principal atout de cette biographie écrite par Stefan Zweig est de nous donner envie d'en savoir plus sur la période révolutionnaire ... L'envie de savoir provoquée par un grand maître de la littérature !

Bebern - - 65 ans - 11 juillet 2016


Un peu déçu... 6 étoiles

Tenté par toutes les excellentes critiques je l'ai lu, mais je suis finalement un peu déçu. Non par le style toujours impeccable de Zweig, mais plus par ses partis pris et ses jugements sur les personnages.

Vigneric - - 55 ans - 23 septembre 2014


Et l'histoire 7 étoiles

Ce livre est un exemple typique. La qualité littéraire du texte, sa construction, la prose de Stefan Zweig suscitent à juste titre l'admiration de ses lecteurs. Il reste cependant un problème: celui de la vérité historique. Celle-ci est joyeusement travestie par Zweig qui, pour des raisons que j'ignore, a choisi de faire de Marie-Antoinette une idole. En revanche rien n'est épargné au personnage de Louis XVI, présenté comme un quasi-demeuré, balourd, pleutre et mollasson. Il est vrai que le texte est ancien et que l'historiographie a fait depuis de nombreux progrès. Il n'empêche, Stefan Zweig savait et il a voulu délibérément dessiner ainsi son héroïne, et son immense talent a fait le reste. Le tout est de ne pas nous laisser prendre à la qualité aux dépens de la vérité, comme en témoigne le forum dédié sur ce site à cet ouvrage.

Falgo - Lentilly - 85 ans - 16 juillet 2014


Un livre indispensable. 10 étoiles

Immense chef-d'oeuvre, voici ce qu'est cette biographie de Marie-Antoinette, la dernière reine de France. Le destin de cette jeune Autrichienne, pratiquement tout le monde le connaît, mais cette biographie est écrite avec tellement de grâce qu'on a plus l'impression de lire un roman qu'une biographie. L'étude psychologique de Zweig est si poussée qu'on a l'impression qu'il a connu personnellement la reine, grâce à cette volonté d'humanisation d'une figure historique archi-connue et qu'on réduit trop souvent à des stéréotypes. Un destin exceptionnel, sûrement l'un des plus tragiques de l'Histoire, racontée avec une élégance rare.

Sotelo - Sèvres - 41 ans - 15 juillet 2014


Là où le romancier rencontre l'écrivain 9 étoiles

Un livre très intéressant où on apprend beaucoup sur Marie-Antoinette, personnalité beaucoup plus riche et complexe que n'en a retenu la légende populaire.
Ni hagiographie ni pamphlet, le livre est assez équilibré sur le personnage, ne ménageant pas les critiques sur sa frivolité mais rendant hommage à sa forte personnalité et sa dignité confrontée à la chute de la royauté. Néanmoins on sent tout de même poindre la bienveillance affichée par l'auteur vis à vis de la reine déchue.

Stefan Zweig a réalisé un impressionnant travail d'historien, c'est une évidence! Malgré tout, il s'agit d'une biographie très largement romancée, où les sentiments -réels ou supposés - prennent largement le pas sur les faits historiques.
Ainsi, il n'hésite pas à proclamer que l'aspect psychologique doit prendre le pas sur l'absence de preuves historiques... Un peu gonflé pour des supputations pas toujours bien étayées non?

Florian1981 - - 43 ans - 12 mars 2013


Un superbe livre. 10 étoiles

Une superbe biographie sous l'extraordinaire plume de Stefan Zweig (je suis un incinditionnel!). Bien que je sois un fervent républicain, je n'ai pu rester indifférent aux immenses souffrances endurées par la reine déchue avant le supplice final de sa décapitation. Un excellent livre, qui m'a beaucoup appris et dont la compassion et l'humanité m'ont profondément touché.

Alexis - - 47 ans - 3 août 2012


passionnant 9 étoiles

très belle biographie de Marie Antoinette, on rentre vite dedans et on se passionne pour cette destinée tragique. Zweig reste assez objectif, offre un regard très juste sur la révolution et son style est magnifique.

Livin on a prayer - - 41 ans - 31 mai 2012


Frivole et digne 9 étoiles

J'ai déjà lu plusieurs biographies de Marie-Antoinette ayant une véritable fascination pour son destin qui me fait penser à une tragédie antique.
J'ai eu récemment les biographies écrites par Stefan Zweig : "Marie-Antoinette" et "Marie Stuart".
J'ai d'abord été étonnée de la précision du portrait de la reine puis je me suis prise de sympathie pour son pauvre mari, Louis XVI, représenté comme faible, balourd et peu intelligent. Louis XVI est quelqu'un de plus nuancé mais Zweig l'a dépeint comme coupable de son échec conjugal. Mis à part ça, la dernière partie reste la plus passionnante, celle où Marie-Antoinette se révèle, se dévoile telle qu'elle est. Son courage n'aura d'égal que sa dignité et c'est avec courage et dignité également qu'elle affrontera la mort, peut-être comme une délivrance.

Emira17 - / - 27 ans - 9 janvier 2012


Portrait d'une femme 10 étoiles

De Marie-Antoinette, reine de France, je n’avais qu’une perception étriquée, ne retenant de ce personnage que ce qui m’avait été rapporté scolairement ou par des productions littéraires ou cinématographiques sujettes à caution. Alors quoi ? Marie-Antoinette ne serait pas qu’une reine décapitée, parce que futile, dépensière et comploteuse ? Il m’aura fallu l’excellente biographie de Stefan Zweig pour enfin découvrir un personnage sortant des peintures convenues et des idées reçues. A tel point que le drame qui l’a emporté s’avère en ma conscience être un crime injustifiable et insensé. Et pourtant, l’auteur ne tombe jamais dans les turpitudes d’un parti-pris, jamais dans la polémique.
Stefan Zweig nous fait un portrait de Marie-Antoinette en toute objectivité, brossant une période d’insouciance dont son désintérêt pour les choses de l’Etat accentue la légèreté de la reine jusqu’au point de la présenter frivole et cupide. Une jeunesse éclairée par les fastes de la couronne, auprès d’un mari, Louis XVI, inconsistant mais qui lui passe tout, fera de Marie-Antoinette dans les esprits de ses sujets, une débauchée dépensière quant elle ne sera pas taxée des vices les plus ignobles. Stefan Zweig nous rapporte ici l’opinion d’un peuple, pas sa vision propre.
Et puis il y a cette femme, cette mère de famille assagie qui finit par se dresser, mais tardivement, quand le destin décidera de son sort misérable. Elle aura subi les affronts les plus durs, l’ignominie la plus totale, jusqu’au supplice. L’éradication des symboles monarchiques nécessitait-il le martyre d’une femme ? Loin de se complaire dans un révisionnisme du procès, Zweig tire des conclusions par une étude psychologique qui efface à elle seule l’image d’une gorgone qu’il fallait bien abattre. Marie-Antoinette devient alors une de ces trop nombreuses victimes d’une révolution dont l’idéal se forgeait par l’horreur et l’inhumanité.
Marie-Antoinette sortirait-elle grandie dans nos livres d’histoire sans cette fin tragique ? Sans doute non. Elle ne fut certainement pas la reine appropriée pour élever son roi, timide en décisions, presque contraint de régner. Elle fut futile et linotte, dénigrant ses responsabilités, mais courageuse et battante quand l’ombre de la guillotine s’est étendue vers elle.
Ce livre est une référence et la patte de Stefan Zweig toujours autant précise.

Hamilcar - PARIS - 69 ans - 12 décembre 2011


Un couple à contre-emploi 10 étoiles

Les couples royaux ne sont pas sélectionnés, celui de Louis XVI et Marie-Antoinette en a bien apporté la preuve, entre un Roi tétanisé par toute prise de décision et une épouse oisive, futile, qui exècre la politique, comme toute chose sérieuse, et qui ne se ressaisit qu'in extremis, quand sa disgrâce populaire menace son intégrité, en se montrant pleine de répliques et de bons sens.
Manipulée par un entourage malveillant, elle oriente, sans le chercher pleinement, un époux faible et couard.

Est ici dressé un portrait aussi long et précis qui a dû demander un temps impressionnant de recherches. Le résultat ne s'en avère pas moins objectif et d'une grande analyse psychologique, ce qui constitue une qualité sans faille de Stefan Zweig, comme en témoignent ses nouvelles et la biographie de Marie Stuart.
Le lecteur rentre à Versailles et a l'impression de côtoyer la Reine. Cette oeuvre est brillante et passionnante.

Merci à Miss Teigne qui m'a définitivement convaincu de m'y plonger, alors que j'étais déjà inconditionnel de l'auteur, dont j'en suis à la quatrième biographie, après avoir découvert nombre de ses nouvelles.

Veneziano - Paris - 46 ans - 23 octobre 2009


très bonne précision 9 étoiles

Le sujet est déjà très intéressant mais Stéphan Zweig a su par son objectivité le rendre passionnant. J'ai donc lu ce livre avec le plus grand intérêt, j'ai pourtant été quelque peu déçue quant à ses conclusions un peu trop psychologiques au sujet de la soi- disant liaison avec le Comte. Ceci n'altère en rien mon admiration pour ce livre, excellent et à lire absolument.

Lys10 - - 31 ans - 27 septembre 2009


Passionnant! 8 étoiles

Étant une fervente admiratrice de Stefan Zweig, surtout pour ses biographies, j'ai vraiment apprécié celle de Marie Antoinette. L'analyse psychologique que nous présente Zweig est tout à fait juste, précise, sans subjectivité mal placée. Un excellent livre qui nous montre toute l'humanité des monarques.

Rouchka1344 - - 34 ans - 31 août 2009