God's Pocket
de Pete Dexter

critiqué par El grillo, le 18 octobre 2008
(val d'oise - 50 ans)


La note:  étoiles
Encore un bon Dexter
Présentation de l'éditeur
Philadelphie. Quartier de God's Pocket. Leon Hubbard meurt sur un chantier. Un peu trop vantard, la lame de rasoir toujours à portée de main, il a provoqué une fois de trop un de ses collègues. Version officielle : accident du travail. Mais sa mère et d'autres gens du coin veulent en savoir plus. L'affaire prend de l'ampleur, la mafia s'en mêle et Richard Shellburn, journaliste spécialisé dans les faits divers, est envoyé par son rédacteur en chef pour mener sa propre enquête.



Dexter installe l'histoire. On ne peut pas dire qu'il ne prend pas son temps. La mise en place, c'est son truc, les personnages aussi. Il y tient tellement qu'il en passe du temps à nous les décrire, descriptifs physiques, psychologiques, on a même droit à l'anecdote propre à l'histoire de chacun. Et Dexter aime l'anecdote, il s'amuse avec un fait divers qui va progressivement changer le cours de la vie des personnes gravitant autour. Effet papillon à travers ce quartier de Philadelphie, avec ses habitants, ses habitudes...

Autant Train, du même auteur, avait un rythme plutôt decrescendo, autant God's pocket prend son allure de trot après la 150è page. Alternant les situations tragi-comiques et les dialogues du cru, l'histoire mêle habilement tous les protagonistes dans un mic mac jubilatoire. Mickey, merveilleux looser, Jeanie, touchante, Old Lucy, Shellburn, tous ont un charisme qui les rend automatiquement dignes d'intérêt. J'aime la capacité de l'auteur à nous parler de sujets graves de façon légère et d'anecdotes légères plombées au maximum. (La partie de jambes en l'air dans les champs, j'en pleure encore de rire)

God's pocket est le premier roman de Pete Dexter, mais le dernier traduit par chez nous.
Relations humaines dans un quartier, un chantier, un journal 8 étoiles

L’histoire est intéressante avec des passages tragico-rocambolesques. Il s’en dégage une tonalité faite de simplicité, de nostalgie et de fatalisme accepté.

C’est la vie attachante de tous les jours de ceux qui ne sont pas des héros. Il s’agit ici des seconds rôles indispensables, des travailleurs manuels (honnêtes ou pas) qui font tourner le monde. Les personnages sont décrits avec toute leur ambivalence : les espoirs, les déceptions, le consentement assumé à la réalité, le chauvinisme de quartier, les manipulations pour se débarrasser de quelqu’un.

On est parfois un peu surpris des comportements et des petites trahisons mais, entre personnes qui se connaissent si bien, on peut tout se faire il parait !

« D’après son expérience, ce qui poussait les gens à superviser les autres, c’était de ne plus devoir mouiller leur chemise. Pas seulement dans le bâtiment, c’était partout pareil. Le vrai boulot, personne ne voulait le faire, tout le monde voulait le surveiller ». (p. 57)

IF-0611-3739

Isad - - - ans - 10 juin 2011


Ah, la scène à la tronçonneuse… 7 étoiles

Au départ ça sonne juste, deux premiers chapitres noirs, charpentés, élégants. La tension est palpable : chroniques de la folie ordinaire. Mais la deuxième moitié tourne à vide. Il y manque le regard sociologique, les tics et les détails qui font le délice des premières pages.

Béatrice - Paris - - ans - 23 février 2010


Très bon. plus socio-professionnel que thriller. 9 étoiles

Un cas d’école, exemple pour étudiant en littérature. Pete Dexter entame son premier roman comme s’il craquait une allumette, toujours bon signe.

S’imposent ensuite, et peut-être sa “patte“ , la construction du récit, les croquis forts des personnages et l’utilisation croisée de l’imparfait et du présent qui donne un rythme tonique à l’histoire.

Le tout servi et pimenté par le cadre “ouvrier mafieux“. Le bouquin que vous êtes sûr de terminer, surtout quand vous arrivez page 221.

Les environnements chantier, boucherie, policiers, journalistes, pompes funèbres, transporteurs et quartier populaire, en font plus un roman socio-professionnel qu’un thriller. N’est d’ailleurs pas édité dans une collection thriller.

Ciceron - Toulouse - 75 ans - 7 décembre 2008


Savoureux ! 8 étoiles

Un roman savoureux,
où l’action se concentre en quelques jours dans un quartier qui contrairement à ce que son nom laisserait supposer n’est pas une enclave où règne la paix du seigneur,

qui présente une gamme étendue de personnages, dont certains sont rares dans le roman noir : enfants et vieillards, avec mention particulière aux personnages de la vieille tante Sophie et aux belles sœurs éplorées…..,

qui mêle allégrement violence et légèreté, tragique et burlesque, situations tendues et dialogues cocasses ou décalés ,

et offre même parfois le luxe de présenter une même situation sous deux points de vue totalement opposés .

Alma - - - ans - 25 novembre 2008


Noir roman social 5 étoiles

A Philadelphie, dans le quartier misérable de God’s Pocket, Leon Hubbard, jeune ouvrier vantard et provocateur meurt sur un chantier de construction, officiellement suite à un accident, mais en réalité d’un coup de tuyau de cuivre sur le crâne asséné par un collègue excédé de ses menaces et de ses insultes. Sa mère et quelques personnes du coin ne se satisfont pas de la thèse officielle. L’affaire s’envenime rapidement quand la mafia locale puis les médias s’en mêlent d’autant plus qu’Hubbard se retrouve tué une seconde fois dans un accident de la route…
Sur un thème original et qui aurait pu donner lieu à une histoire à suspens et rebondissements en cascade, Dexter se contente de nous dépeindre une vie de quartier américain fort peu attrayante : boulots ingrats et mal payés, loisirs réduits au sinistre décor d’un bar crasseux où chacun cherche l’oubli dans la bière et l’alcool et Mafia omniprésente. Il ne se passe pas grand-chose d’intéressant dans ce livre si ce n’est la description de quelques séquences du quotidien de personnages minables tels Mickey qui détourne un camion frigorifique rempli de viande et qui n’arrive pas à la refourguer, deux petites frappes de la Mafia locale qui se font rosser par un chef de chantier costaud et un receleur un peu louche qui part se cacher en Floride après que sa vieille tante fleuriste ait abattu deux autres gangsters. A part coucher avec la mère du jeune ouvrier, le brillant journaliste chargé de l’enquête ne trouve rien, les flics non plus et le maçon coupable du meurtre reprend son boulot comme si de rien n’était. Roman noir, social, agréablement écrit et traduit, mais qui a pour unique mérite de nous montrer qu’aux Etats-Unis, il y a aussi des banlieues à problèmes !

CC.RIDER - - 66 ans - 24 novembre 2008


Des débuts en grande pompe 10 étoiles

J'ai aussi lu God's Pocket après Train, et ce sont là deux romans absoluments prenants, bien que très différents. God's Pocket fourmille. De personnages, de péripéties, d'humour noir, de violence et de dialogues savoureux. C'est, à mon avis, un très grand roman. Il marque l'entrée en littérature de Dexter et je m'imagine, parfois, tomber comme ça en temps réel (et non 25 ans plus tard) sur le premier roman d'un auteur si fort et le suivre au fil des parutions... Ça ne m'est encore jamais arrivé.

Pour la petite histoire, il peut-être bon de savoir qu'avant d'écrire des romans, Dexter était - à l'image de Richard Shellburn dans ce roman - un journaliste vedette à Philadelphie. Il avait sa colonne quotidienne dans le Philadelphia Daily News et publiait des textes tordants et inspirés sur les petits crimes, sur les ouvriers de la ville, ou sur sa femme, sa fille, ses animaux (Paper Trails, une collection de ses meilleurs textes de journalismes, est absolument fascinant).

Mais suite à un texte qui ne fit pas l'unanimité, Dexter fut enjoint par le frère de la victime à quelques explications. Le journaliste se rendit directement au bar où travaillait l'homme en question, dans le quartier de Devil's Pocket, et en ressortit le nez fracassé par une bouteille. Dexter, qui pratiquait la boxe, y retourna avec un ami, boxeur pressenti pour les championnat poids lourd. Les deux hommes furent accueillis par une vingtaine d'hommes armés de battes de base-ball et de barres de fer.
Les lecteurs du livre s'y retrouveront.

Dexter dût subir de nombreuses interventions chirurgicales pour retrouver un visage, et il arrêta le journalisme pour se consacrer à l'écriture de fiction. Ainsi, God's pocket est le résultat d'une sévère convalescence. Nul doute qu'il soit motivé par un certain désir de violence (la fin du deuxième chapitre est un sommet de fine violence).

Et pour ce qui est de l'ami, il n'a jamais reboxé de sa vie.

Grass - montréal - 46 ans - 24 octobre 2008