Les eaux de Mortelune, l'intégrale
de Patrick Cothias (Scénario), Philippe Adamov (Dessin)

critiqué par Blue Boy, le 4 octobre 2008
(Saint-Denis - - ans)


La note:  étoiles
Une épopée sombre et visionnaire
(Cette intégrale comprend les tomes 1 à 5)

L’action se situe dans un futur pas si lointain, dans un Paris dévasté par une catastrophe écologique et rongé par les pluies acides. Ses habitants sont réduits à l’état d’animaux errants dans un monde où règne la loi du plus fort. Le Prince Jérôme de Mortelune règne depuis sa forteresse des Halles, peu soucieux du sort de ses sujets et davantage préoccupé par la conservation de sa beauté que lui confère un élixir secret de jeunesse absorbé quotidiennement.

L’eau, devenue une denrée rare, est l’objet d’une guerre larvée entre Jérôme et le cruel duc Malik, qui guette la première occasion pour s’emparer du pouvoir.

Parmi les personnages de l’histoire, il y a un enfant, Nicolas, fils de l’horrible boucher Pancrasse, qui voit ce que personne ne voit, le seul à avoir un rêve dans ce monde de cauchemars, un rêve si puissant qu’il peut les faire partager aux autres. Il ne cesse d’imaginer la mer qu’il n’a jamais vue, un rêve qui a pris sa source au beau milieu d’un monde aride et déshumanisé. Et c’est vers ce rêve mais surtout leur propre déchéance qu’il entraînera tous les personnages principaux de l’histoire, sans que ceux-ci en soient jamais conscients.

« Les Eaux de Mortelune » est un pur chef d’œuvre de la bande dessinée française de science-fiction. Une épopée très audacieuse, baroque et décadente qui nous saute à la gorge et distille le malaise, tel un miroir de nos sociétés prédatrices et peu soucieuses de l’avenir du monde. Le trait est acéré, les couleurs sont blafardes. Le message est profondément pessimiste avec seulement une vague lueur d’espoir à la fin, autorisée seulement par le rêve de Nicolas. C’est donc bien une mise en garde sévère que nous adressent là les talentueux Cothias et Adamov. Il ne faut rater à aucun prix ce plaidoyer écologique face à la folie des hommes, qui plaira autant à l’amateur d’aventure qu’au citoyen inquiet de l’avenir de la planète.