Verticale de fureur
de Stéphanie Marchais

critiqué par Sahkti, le 30 mai 2008
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Comprendre ou ne pas comprendre
Dieter Lerhbach ou Milan Brasov, deux identités pour un même homme, un tortionnaire allemand d'origine hongroise qui a dénoncé et fait souffrir les juifs pendant la guerre. Non pas pour des questions idéologiques ou politiques, même si il avoue "ne pas aimer ce peuple", mais pour une basse vengeance familiale personnelle. Milan Brasov aurait voulu plaire à son père, qui l'a rejeté enfant parce que le gamin ne faisait preuve d'aucun talent; alors tant qu'à avoir du talent, un jour, autant que celui-ci soit exceptionnel...
En ce jour de confession, Brasov se confie à une tombe dans un cimetière juif, il explique son combat et son parcours. Avant l'assaut final.

Stéphanie Marchais nous offre ici un curieux personnage, unique narrateur d'un récit qui se voudrait de rédemption et a des allures d'acte d'accusation. Tout en se confessant, Brasov tente d'attirer les sympathies du lecteur mais y arrive-t-il vraiment? Pas si sûr, car loin d'assumer ses actes et de faire preuve d'une certaine forme de courage, même au profit d'une cause laide, le bonhomme préfère s'apitoyer sur son sort au fil des pages et c'est ce qui empêche, sans doute, de s'y attacher. Toutefois, reconnaissons-le, l'empathie est là, malgré tout.

Le procédé de la confession-pardon-annonce de vengeance marche plutôt bien, d'autant plus que l'écriture de Stéphanie Marchais est vive et agréable à lire.
Brasov est un monstre qui ne demande pas pardon mais tente de se pardonner à lui-même, sous l'oeil d'une tombe muette, symbole de toutes ces victimes juives pendant le conflit. Avec des digressions, des retours en arrière et des justifications à outrance, il entraîne le lecteur avec lui car, tôt ou tard, survient la réflexion "Le comprenons-nous?". Et ça, c'est tout de même dérangeant! C'est là que réside un des tours de force du livre, dans cette façon de repousser les limites de notre humanité.

A découvrir!