Catalogue exposition : Au Tibet avec Tintin
de Hergé

critiqué par Shelton, le 22 avril 2008
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
Que vive librement le Tibet !
Non, il ne s’agit pas là de reparler, encore et toujours, d’un des meilleurs albums des aventures de Tintin signés Hergé, mais bien de tourner notre regard sur ce pays malmené aujourd’hui par la Chine, le Tibet.
C’est en 1994 qu’est sorti ce catalogue d’exposition, au moment où la Fondation Hergé a décidé de consacrer une grande exposition au thème : Au Tibet avec Tintin. Il faut dire que si Hergé avait consacré un album aux aventures de son personnage Tintin à la fin des années cinquante, l’histoire plus récente avait donné un éclairage particulier à cette terre des grandes hauteurs : le 5 mars 1989, la capitale Lhassa se retrouvait en feu et en pleine guerre civile (si on considère que les Tibétains sont des Chinois) ; le 10 décembre 1989, le quatorzième Dalaï-Lama recevait le prix Nobel de la Paix ; en 1992, Amnesty Internationnal dénonçait la poursuite de la répression chinoise au Tibet ; enfin, en 1994, j’avais le plaisir de visiter cette remarquable exposition à l’Arche de la Fraternité, à la Défense. Cette exposition a été aussi installée aux musées royaux d’Art et d’Histoire de Bruxelles et au centre de congrès et d’expositions de Montreux.
L’ouvrage de présentation de l’exposition a une introduction de Fanny Rodwell, la seconde épouse de Hergé qui donne le ton et surtout ce que représentait le Tibet pour Hergé. Elle termine sa petite préface par ces mots : En hommage à Hergé et au peuple tibétain. Oui, c’est bien le peuple tibétain qui est au cœur de cette parution et qui portait l’exposition entière. Les dessins de Hergé provenant de Tintin au Tibet, album préféré de l’auteur selon sa femme, ne sont là que pour accompagner des textes et des réflexions beaucoup plus fortes.
Ne sous-estimons pas le regard de Hergé sur le Tibet car il était très attaché à ce pays et surtout à ses habitants. Le bouddhisme était pour lui une bonne solution pour pouvoir vivre, s’accepter… Ce n’est pas étonnant de voir cet album arriver au moment où prend fin sa psychanalyse, c’est à dire le moment où il change de vie. Les albums deviendront plus rares, il change d’épouse, se consacre plus à la peinture, la sienne et celle des autres, cherche à retrouver son ami « Tchang », à découvrir les véritables valeurs de la vie…
Michel Serres et Benoît Peeters nous montrent avec beaucoup de finesse que cet album Tintin au Tibet n’est pas un simple voyage mais bien un retour sur soi de l’auteur et qu’il a donc une puissance humaine incomparable avec celle des autres épisodes dont certains peuvent être lus comme de simples voyages (Congo, Amérique, Oreille cassée).
Toutes les photos de l’exposition sur le Tibet et ses habitants sont là pour présenter le Tibet comme autre chose qu’un mythe ou un musée. C’est un pays vivant avec des femmes et des hommes qui ne cherchent qu’à vivre, à trouver, eux-aussi, comme Hergé en son temps, le bonheur…
Œuvre d’art, témoignage, preuve d’humanisme et de solidarité, je ne sais pas si vous aurez la chance de trouver encore un de ces exemplaires du catalogue, d’occasion ou chez un soldeur, mais si tel était le cas, n’hésitez pas un seul instant et partez pour un voyage profond et fort en compagnie de Hergé, de Tintin ou des Tibétains (enfin, des trois si vous voulez).