Cri & Co
de Christophe Macquet

critiqué par Sahkti, le 27 mars 2008
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Z'avez perdu le "E"?
L'auteur précise en début de volume que l'utilisation de "oeu" peut désarçonner au premier abord. L'oeil et l'oreille n'y sont pas habitués et pourtant, ce n'est jamais qu'un "e" qui se prononce, mais peut-être pas là où on l'attend. De quoi donner à la lanque de Christophe Macquet un supplément de naturel et de spontanéité qui apporte beaucoup de charme au récit, à condition de pousser la porte sans retenue pour pénétrer pleinement dans les textes.

Une poésie étonnante, peu conventionnelle, des vers en roue libre et une structure qui ne répond à aucune norme. Construction audacieuse et utilisation d'un langage décomplexé qui donnent à cette poésie un air musical. Je n'ai pu m'empêcher de fredonner en lisant ces textes poétiques, le rythme est dynamique et empli d'une certaine gaieté.
Les "e" se font la malle, les élisions sont nombreuses, les phrases sont courtes et percutantes... bref, c'est vif à souhait et ça met de bonne humeur, même lorsque le propos est plus sérieux ou grave. C'est peut-être d'ailleurs là un moyen d'aborder certains sujets, en y mettant les formes (au sens premier du terme ici), ça démystifie l'ensemble.


"Nux noctis (extrait)

la noix loeu sabloeu des nuits
la vit la prend dans ses ruin's
la noix la lun' albumin'
l'avin' et la fait finir
coaguloeu son désir
loeu piroeu crèm' opal'
son eau très pur' amoral'
qu'écaloeu cèl' en doeudans"
(page 30)


http://www.legrandos.com/
Radical 10 étoiles

Radicale, cette entreprise, et jubilatoire à la lecture. On a envie de l'avoir en bouche.

Feint - - 61 ans - 3 septembre 2009


Rature Rimbaud ! 10 étoiles

Ce livre, conseillé par un ami (dont je ne partage d’ailleurs pas souvent les goûts...) m’a étonné, secoué, frappé, entraîné.
Vieux lecteur de littératures en tous genres, plutôt mauvais coucheur, on ne m’embarque pourtant pas facilement d’habitude !
C’est à la fois impeccablement maîtrisé (on se sent pris dans une machine rythmique impitoyable) et d’une désinvolture grisante. Immobile, engorgé (vide ?), et sans cesse à l’attaque. Asphyxié dans Lalangue, asphyxié dans Lemonde, et respirant à pleins poumons Salangue, Sonmonde.
J’aime que tout parte, ici, de l’objet et du mot « cocotier », ridicule cela va (presque) sans dire. Ça nous change des fixations liminaires sur Monentrejambes et sur Mamortindividuelle. On y arrive bien sûr (peut-on y échapper ?), mais après un parcours, un décentrement savoureux.
Sublimation cocomique !
Il y a beaucoup de sensualité, d’humour, de détresse, de bêtise, de sauvagerie et d’intelligence dans ce Cri répété.
Décentrement : la poésie, la France, Paris, la langue française. Mais sans la naïveté de se recentrer sur un autre Réel (toujours construit de toute façon), le khmer, ou un quelconque patois des origines.
REcentrement plutôt sur un faux centre, avec un faux rythme.
J’aime aussi quand l’auteur déboule brutalement au milieu de ce théâtre, par des indications biographiques assez crues (je ne comprends pas tout – avine ? – mais ça me plaît )
Surtout, on a sans arrêt l’impression que ce Christophe Macquet, prophète englouti, ironique, révulsé, nous emporte où il veut. Il a une façon bien à lui de vous prendre au débotté et de vous emmener faire un tour, sans vos bottes, en se ménageant constamment une longueur d’avance...
Marque des bons, des très bons, à mon avis.


http://www.lelibraire.com/din/tit.php?Id=58311

Henri27 - Paris - 74 ans - 28 avril 2008