Ce livre, conseillé par un ami (dont je ne partage d’ailleurs pas souvent les goûts...) m’a étonné, secoué, frappé, entraîné.
Vieux lecteur de littératures en tous genres, plutôt mauvais coucheur, on ne m’embarque pourtant pas facilement d’habitude !
C’est à la fois impeccablement maîtrisé (on se sent pris dans une machine rythmique impitoyable) et d’une désinvolture grisante. Immobile, engorgé (vide ?), et sans cesse à l’attaque. Asphyxié dans Lalangue, asphyxié dans Lemonde, et respirant à pleins poumons Salangue, Sonmonde.
J’aime que tout parte, ici, de l’objet et du mot « cocotier », ridicule cela va (presque) sans dire. Ça nous change des fixations liminaires sur Monentrejambes et sur Mamortindividuelle. On y arrive bien sûr (peut-on y échapper ?), mais après un parcours, un décentrement savoureux.
Sublimation cocomique !
Il y a beaucoup de sensualité, d’humour, de détresse, de bêtise, de sauvagerie et d’intelligence dans ce Cri répété.
Décentrement : la poésie, la France, Paris, la langue française. Mais sans la naïveté de se recentrer sur un autre Réel (toujours construit de toute façon), le khmer, ou un quelconque patois des origines.
REcentrement plutôt sur un faux centre, avec un faux rythme.
J’aime aussi quand l’auteur déboule brutalement au milieu de ce théâtre, par des indications biographiques assez crues (je ne comprends pas tout – avine ? – mais ça me plaît )
Surtout, on a sans arrêt l’impression que ce Christophe Macquet, prophète englouti, ironique, révulsé, nous emporte où il veut. Il a une façon bien à lui de vous prendre au débotté et de vous emmener faire un tour, sans vos bottes, en se ménageant constamment une longueur d’avance...
Marque des bons, des très bons, à mon avis.
http://www.lelibraire.com/din/tit.php?Id=58311
Henri27 - Paris - 75 ans - 28 avril 2008 |