Balzac, le roman de sa vie
de Stefan Zweig

critiqué par Corail, le 11 mars 2008
(Ottawa - 64 ans)


La note:  étoiles
Le Monde de Balzac
Ne connaissant de Balzac que ses écrits, la découverte de ce personnage fragmenté a été un pur délice. Zweig ressuscite ici pour ses lecteurs ce grand artiste en pelant les couches visibles afin d’en dénuder le coeur.
À grands coups de plume, il asperge la page de couleurs opposées et les entrechoque mettant ainsi en relief les monts et les vallées, l’ombre et la lumière de cette personnalité aux accents schizophrènes et illuminés.
Le magma intérieur débordant de ce créateur grandiose nous est présenté comme quasi inextinguible et inépuisable.

Oublier l’auteur au profit du sujet de la bibliographie, tel est l’exploit réalisé par Zweig dans ce bouquin bien rempli sans submerger, vivant sans être criard, volumineux sans lasser.

Il expose l’homme parallèlement à l’écrivain ; génie fou qu’on souhaiterait avoir eu le privilège de connaître. « Toujours passe à travers sa vie cette ligne fine comme un souffle qui sépare la raison de la folie. » (p. 405) Quel ébahissement de sonder la profondeur d’un être à l’intelligence aussi sublime qui, par moment, peut devenir aussi rustre et insensé que n’importe quel homme ordinaire. L’auteur guide son lecteur vers la réalisation de la complexité ainsi que la collaboration étroite des forces opposées intervenant dans ce maelstrom accouchant de ces chefs-d’oeuvre extraordinaires. Avec quelle facilité, il engage nos sentiments : je souhaitais ardemment, en effet, que Balzac trouve enfin la paix et jouisse un peu de son labeur, ce qui malheureusement ne devait pas être.

Et tout comme la vie de Balzac nous laisse un peu sur notre faim, cette lecture fait de même, les derniers chapitres ayant été compilés après la mort tragique de l’écrivain sur la base de notes éparses. Curieusement et ironiquement, cette conclusion quelque peu abrégée ne jure pas mais semble plutôt appropriée de par sa symétrie et sa superposition avec son sujet.

À lire certainement !
L'incroyable roman de la vie de Balzac 9 étoiles

Pour raconter Balzac, il fallait un écrivain de grand talent et c'est bien sûr le cas avec Stefan Zweig qui signait là, je crois, son dernier ouvrage. La vie de Balzac n'a rien à envier à ses romans ni aux romans de n'importe quel écrivain. Elle est elle-même le plus étonnant de tous les romans, passionné, passionnant et, parfois, à la limite de l'invraisemblable. Zweig insiste, à juste titre, sur le dédoublement de la personnalité chez Balzac. Il y a deux Balzac. L'un est l'immortel auteur de "La Comédie Humaine", le génial créateur d'un monde, celui qui passait la plus grande partie de ses nuits et de ses jours à concevoir et à rédiger une oeuvre à nulle autre pareille. L'autre est l'homme Balzac, celui qui échoue dans tout ce qu'il entreprend, qui est criblé de dettes, sans cesse pourchassé par ses créanciers et par les huissiers, le rêveur incorrigible fasciné par les grands de ce monde, l'amant de plusieurs femmes ne songeant qu'à épouser la plus riche d'entre elles afin d'être enfin à l'abri de tous les soucis... Un géant de la littérature d'un côté, un homme faible, parfois ridicule, parfois pathétique, de l'autre. Il y a des épisodes qu'on oserait à peine glisser dans un roman à deux sous tant ils paraissent inouïs, comme l'escapade que fait en Italie un Balzac accompagné d'une de ses maîtresses déguisées en garçon, ou le voyage fou qu'il entreprend jusqu'en Sardaigne, pensant y exploiter des mines... Zweig raconte tout cela avec passion, on sent combien il aime Balzac, malgré tous les petits côtés du personnage. Et, bien sûr, on aime Balzac, nous aussi, sans la moindre réserve.

Poet75 - Paris - 68 ans - 27 janvier 2014


L'art de la démesure 10 étoiles

Eblouissante biographie, aussi riche et foisonnante que les excès dont Balzac –souvent surnommé le Napoléon des lettres- fera montre en tous domaines au cours de ses cinquante et une années passées sur cette terre.
Un train de vie dispendieux et un endettement chroniques, un rythme de travail totalement épuisant et chronophage entretenu par une consommation démesurée de café, des repas à l’extérieur littéralement pantagruéliques ; de multiples aventures sentimentales menées avec des compagnes -si possible riches et mécènes à leurs heures- en pleine maturité et immortalisant à jamais le portrait de «La femme de trente ans» ; enfin, une production titanesque d’articles et d’ouvrages tout au long desquels apparaissent et réapparaissent les 2504 personnages de sa «Comédie Humaine», son œuvre maîtresse.
Autant de détails toujours succulents, parfois cocasses, narrés ici avec beaucoup de brio qui constituent la genèse de ses romans, la réalité rejoignant ou expliquant, comme souvent, la fiction.
Pour Stefan Zweig qui fut un biographe hors pair (cf Marie-antoinette, Fouché, Magellan), la réalisation de ce «grand Balzac», comme il aimait désigner cette entreprise si ambitieuse, devait en tout cas occuper dix ans de sa vie et devenir pour lui, son œuvre capitale ; elle représente d'ailleurs, aux dires de l’éditeur qui signe la postface de ce livre, le couronnement de sa carrière d’écrivain.
Incontournable pour les amateurs de Balzac.
Au total, un grand moment de lecture agrémenté par la légèreté du style propre à Zweig et l’ampleur de son érudition.

Isis - Chaville - 79 ans - 4 avril 2011


Le Grand Balzac 8 étoiles

Quand on lit Balzac, on voit qu'il existe encore une grande littérature!
J'acquiesce les propos de 'Corail' ci-dessus.
Le monde de Balzac est lié à l'aventure, à l'Histoire des histoires et il en a fait ses romans...

Excellente idée de Stefan Zweig que d'avoir écrit ce livre ; Balzac était solide de son vivant et le reste en post-mortem!
C'est agréable de lire ce livre, et on a en France ce grand Balzac, au grand sens du terme.

Peterman - Mandelieu - 42 ans - 16 mars 2008