La femme de l'analyste
de Bruno Tessarech

critiqué par Kinbote, le 1 mars 2008
(Jumet - 65 ans)


La note:  étoiles
Chercher la femme
Le narrateur, qui est un écrivain en panne (« Ecrire, c’est tragique, mais ne plus écrire, c’est dramatique »), entreprend une analyse. Au fil de sa thérapie, il se prend de curiosité pour la femme de l’analyste, sans l’avoir vue, après avoir seulement appris son nom et deviné sa présence à quelques signes, parmi lesquels un vélo attaché à la rampe d’escalier de l’immeuble où se trouve le cabinet du psy. Mais avant qu’il pousse plus avant ses recherches, il apprend que son analyste divorce et, bientôt, que son ex-femme a quitté le domicile commun. Au cours de son enquête, il a appris qu’elle était Hollandaise. Il déniche bientôt sa nouvelle adresse, aux Pays-Bas, où elle est retournée vivre. Il décide finalement de s’y rendre pour la rencontrer…
Au terme de son périple, qui se passera autrement que prévu, il reprend goût à l’écriture et se met à écrire l’histoire qu’on est en train de lire…

L’écrivain s’attache aux détails, du mobilier, du décor, des trajets (celui le menant chez l’analyste, celui le menant chez la femme de l’analyste) s’intéressant plus aux aléas du voyage qu’à son but.
Le périple dans l’île hollandaise où il est censé rencontré la femme de l’analyste m’a fait penser à un épisode du Voyeur de Robbe-Grillet.
Même si le style rappelle davantage un Morand, auteur fétiche avoué du narrateur (à l’occasion, il signale ce superbe roman de Morand, « Hécate et ses chiens ») qu’au « pape du Nouveau roman », nombre de figures (les blancs du récit, l’impasse faite sur certaines parties du récit, les personnages esquissés) semblent inspirés du Nouveau roman ou d’un auteur situé dans sa lignée comme Christian Oster. Pour les rapports patient/analyste, on pense évidemment à Woody Allen, référence d’ailleurs citée. La « chute », inavouable à un futur lecteur du roman, est ce qui fait la singularité de ce livre. A vous de la découvrir !

L’extrait :
« - Rassure-moi ; tu n’es pas amoureux ?
La question me rendit muet pendant deux ou trois secondes. un seul mot sur la femme de l’analyste et tout partait à vau-l’eau. En un éclair j’entrevis les larmes, la crise, les serments modérément crédibles, car enfin, devoir juger, sortir l’artillerie lourde en somme, n’est jamais signe de paix conjugale. Je trouvai la parade.
- Oh que si ! Et amoureux comme jamais. De mon roman.
Elle me regarda d’un air morne. Je savais ce qu’elle pensait. Vaut-il mieux vivre avec un écrivain angoissé de ne pas écrire, ou avec un écrivain angoissant parce qu’il écrit ? Je connaissais la réponse : mieux vaut ne pas vivre du tout avec un écrivain. J’en savais quelque chose, même si je commençais à me dissocier de cette partie profonde de moi-même qui prétendait écrire. J’allais là-bas pour trouver la femme de l’analyste, un point c’est tout. Le titre du livre, les poses face à l’éditeur, c’était du flan. »
Passage à vide 6 étoiles

La lecture de ce petit livre est rapide. L’histoire, nombriliste, est celle d’un manque passager d’inspiration, angoissant parce qu’il se prolonge.

Comme le narrateur n’arrive plus à écrire, il se rend chez un psychanalyste, comme certains de ses amis, pour résoudre son problème. Il procède, en explorateur, à une sorte d’anatomie de l’appartement de son analyste et imagine la propriétaire d’un vélo robuste, bien attaché à la rambarde d’escalier. Il fantasme sur cette femme, dont il a vu le nom sur les boites à lettres, et se demande si elle est de la famille du célèbre faussaire de Vermeer.

IF-0714-4247

Isad - - - ans - 13 juillet 2014