Le tambour du Bief
de Bernard Clavel

critiqué par Otbest, le 6 octobre 2001
(Bruxelles - 68 ans)


La note:  étoiles
Criant de vérité.
Au même titre que Zola, Sartre, Malraux..., Bernard Clavel doit appartenir à cette catégorie non plus d'écrivains mais de maître à penser.
J'espère vraiment que certains enseignants connaissent, apprécient et sont d'accord avec moi car spécifiquement "Le tambour du Bief" est vraiment une oeuvre qui mêle une série de sentiments qui aujourd'hui sont bien trop banalisés.
Je parle tout simplement de l'amour, de l'amitié et du respect de l'autre. Cette histoire met un homme face à sa conscience. Cet homme est "infirmier" ou plutôt garde-malades dans un hôpital. Tous les matins et soirs, il va cependant donner la piqûre à la belle-mère de son ami. Cet ami, père d'une famille de six enfants, a fait de la prison pour braconnage et se retrouve avec une étiquette dans le dos si bien qu'il lui est impossible de trouver du travail dans les environs proches. Partir avec sa famille: impossible. La belle-mère attend la mort qui ne veut pas venir. Et la famille, c'est la famille. Cet homme finira par demander à son ami infirmier s'il n'existe pas de possibilité d'aider la grand-mère.
On aborde le thème de l'euthanasie avec une phrase très simple mais pleine de questions: on aide bien les animaux à mourir lorsque l'issue est fatale et la souffrance trop forte. L'homme est donc au pied du mur d'autant plus que son ami finira par trouver du travail ailleurs mais cela nécessitera le déménagement. Et la réponse d'acceptation ou non de cette embauche doit être rapide. Il faut également savoir que notre "infirmier" est le chef tambour d'une petite société nautique dans une petite ville et il est donc connu et apprécié. Il sentira sur lui les regards des autres quoi qu'il fasse. Quelle sera sa décision et pourquoi ...?
Lisez le livre, très agréable à la lecture, il est vraiment plein d'émotions.
Pour qui sonne le glas. 8 étoiles

Clavel comme à son habitude met en scène une galerie de personnages ancrés dans leur terroir, à la personnalité marquée, dans une histoire qui pourrait arriver à chacun de nous.
Il développe au travers d'Antoine la question hautement sensible de l'euthanasie.
Clavel a l'élégance de ne pas écrire à charge ou à décharge, il nous laisse avec notre libre arbitre.
Il aborde de front les réalités de la souffrance physique au travers de la grand-mère, également de par les malades dont il a la charge au sein de son hospice, deux types de souffrances, deux issues, l'une institutionnelle et l'autre hors la loi.
Pas de jugement ici, pas de grande théorie, pas d'humanisme mondain, de la réalité brute où quand la mort inéluctable libère les âmes et les familles.
Antoine agent létal ou sauveur et bienfaiteur ?
Il endosse seul la responsabilité de cet acte humain, en a-t-il le droit ? Le devoir ?
Cela sous l'oeil de l'oncle incarnant la tradition patriarcal, gardien de la coutume, du colosse plein d'énergie qui ronge son frein à défaut d'utiliser sa force pour nourrir les siens.
Un bon roman de Clavel qui comme d'habitude use d'une écriture lente, interrogative pour nous montrer toutes les facettes d'un problème qui aujourd'hui fait débat.
Ce livre a été écrit en 1968, il aurait pu l'être aujourd'hui, rien n'a changé, 45 ans de débat pour accoucher d'une souris.
C'est là le gage d'un écrivain de talent, aborder de front les problèmes de société qui finalement n'ont jamais vraiment été réglé et laissés en suspens, comme une patate chaude que tout le monde se refile.

A lire.

Hexagone - - 53 ans - 1 mars 2013