Venises
de Paul Morand

critiqué par Sahkti, le 31 janvier 2008
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Venises pour la vie
"J'ai repris le chemin de Venise. Venise n'est que le fil d'un discours interrompu par de longs silences, où, de temps à autre, divers pays l'emportent, comme ils m'ont emporté"

Venises au pluriel car elles sont plusieurs, les facettes de la ville à avoir séduit Paul Morand entre 1906 et 1971. A travers la Cité des Doges à laquelle il voue un rapport d'amour parfois proche de la haine, c'est lui que Morand décrit dans ce recueil mi-journal mi-autobiographie à la langue poétique.
La ville est dépeinte dans sa splendeur et ses misères à travers des réflexions disséminées ci et là, des fragments, des textes qui évoquent non seulement son histoire mais également l'époque qui l'abrite, la première et la seconde guerres, la culture, la société des années 20-30-40-50..., les amis auteurs et les nombreux voyages.
Un livre très personnel dont le lecteur pourrait se sentir écarté si il ne ressent que peu ou guère d'empathie pour Venise, si la vie de Paul Morand lui échappe et tout le reste aussi. Texte sur le ton de la confidentialité, récit intimiste, il se dégage de l'ensemble une torpeur bien agréable qui donne envie de voyager et puis, aussi, d'aimer cette ville, malgré ses défauts.
Rêveries et fantasmes à propos de Venise 7 étoiles

Le passé trouble de l'auteur sous l'Occupation m'a détourné de son oeuvre ; néanmoins, passionné de Venise, je ne pouvais que finir par me tourner vers ce livre, afin de me confronter à une nouvelle vision personnelle de cette ville et de compléter la mosaïque de représentations dont elle fait l'objet.
Aussi le pluriel du titre invite-t-il à ce genre de logique ; et une suite de rêveries et fantasmes nous est bien livrée ici, tant les siennes pendant les trois premiers quarts du XXème siècle que ceux de ses contemporains ou de plus anciens. Morand décrit sa perception personnelle, parfois déformée par le souvenir et les propos rapportés par d'autres, comme Proust, Nietzsche ou Cocteau, notamment. Il y montre ce qui est remarquable, beaucoup plus prosaïque, et en constitue une sorte d'attirance-répulsion étonnante, d'autant que ce livre est condensé de manière synthétique en de cours fragments. Partiel, transfiguré, il reste intéressant.

Veneziano - Paris - 46 ans - 2 avril 2018