La tournante
de Elisa Brune

critiqué par Saint-Germain-des-Prés, le 4 octobre 2001
(Liernu - 56 ans)

La note: étoiles

Un livre dur et dénonciateur

L'auteur s’est inspirée d'un fait réel (étayé par 3 articles parus dans la presse) pour écrire un texte qui laisse pantois.
Une « tournante » est un phénomène organisé de viols collectifs sur une jeune fille recrutée par l'un des violeurs.
Soumise à des intimidations, celle-ci est obligée de se présenter spontanément à date fixe dans des endroits glauques sous peine de représailles violentes sur elle et sa famille.
Marion a 14 ans.
Elle est superbe et séduisante en diable.
Intelligente, indépendante, elle s'ennuie à l’école.
Avec une copine, elle décide d'accepter une proposition : faire partie de nouveaux jeux sexuels avec des hommes inconnus et plus âgés.
Voyant là une occasion de s’émanciper, d'apprendre ce qu'est la véritable jouissance et de vivre une expérience extrême, elle fonce tête baissée.
Rapidement, elle se rend compte que la réalité n’a rien à voir avec ce qu'elle avait imaginé.
Les hommes soi-disant plus âgés sont en fait des élèves de son lycée.
et l’érotisme n'est pas leur fort.
Petit à petit, cette formule ne suffit plus à ces garçons cagoulés et ils deviennent violents.
Marion fugue.
Se fait arrêter pour vol.
Ebranle sérieusement ses parents qui ne se doutaient de rien.
Trois choses à propos de la forme du bouquin.
Premièrement, chaque chapitre est écrit à la première personne du singulier et émane des différents personnages.
C'est ainsi que l'on se glisse dans la peau de Marion, de sa maman, de la directrice d’école, de la copine, du violeur, …
Deuxièmement, le style d'Elisa Brune est parfois dérangeant tant il est cru.
Peut-être était-ce nécessaire pour traduire l’horreur de ces scènes.
L’auteur nous a habitués à un discours direct, où, parfois, la violence est quasiment palpable.
Elisa Brune n'est pas du genre à déguiser son propos sous des draperies bienséantes.
Enfin, j'ai quand même un petit regret.
Trop souvent, on a l'impression de lire une étude sur un phénomène social, quelques personnages émettant des théories sociologiques, intéressantes certes, mais il ne s'agit plus alors d'un roman plutôt d'un essai...

Sans voix...
On ouvre ce livre à sa première page … et on le lit d’une traite jusqu’à la dernière… Avant de le refermer, sous le choc ! L’auteur nous raconte l’histoire de Marion, superbe adolescente embarquée dans une « tournante ». Cette histoire nous est exposée selon le point de vue et la voix de différents personnages. Outre par les principaux protagonistes (le père, la mère, le frère, Marion), l’auteur introduit de nouveaux éléments par la voix de personnages parfois moins directement impliqués, mais dont le point de vue est néanmoins crucial. Quelques réflexions plus « philosophiques » sont intégrées dans le récit, principalement évoquées par la sœur de la mère. Pour moi ces réflexions sont importantes car tout le livre entraîne à la réflexion sur la condition de la femme, encore de nos jours, et sur l’Amour auquel j’ai beaucoup de mal, en terminant ce livre de mettre encore une majuscule.. Il est effrayant de voir combien ces valeurs peuvent être dévoyées.. L’une des qualités d’Elisa Brune dans ce roman est sans doute de nous ouvrir les yeux, à nous qui vivons bien éloignés (enfin, nous le croyons) de ces évènements. Jo - Quelque part au coeur des Ardennes - 48 ans - 5 janvier 2004

la champignonnière
Comme je viens de terminer "les Jupiters chauds" d'Elisa Brune, j'ai eu envie de lire les critiques de ses autres bouquins... "La Tournante" confirme cette tendance qu'elle amorçait déjà dans "les Jupiters chauds" à savoir des scènes sexuelles assez crues. Le titre de ma critique-éclair fait référence à ce fait divers non élucidé, à ramification "Dutroux" qui mettait en scène une ado à la recherche de sensations avec des hommes mûrs (Dutroux ??) à l'insu de ses parents, et dont l'issue sera funeste. Ce n'est qu'une version de l'affaire, éminemment contestée par l'avocat des parents. Mais les parents savent-ils toujours ce que vivent leurs enfants ? Darius - Bruxelles - - ans - 18 décembre 2002

Une société vouée à une certaine violence
Je crois que c'est ainsi que nous pourrions définir notre époque en Occident. Les tabous sexuels sont tombés les uns après les autres, le sexe est devenu une marchandise à vendre et à consommer comme une autre (sex-shop, peep show et autres...) Si le sexe a toujours été important dans la vie des hommes et des femmes, je regrette simplement qu'il se soit fortement déshumanisé durant les dernières années. C'est l'ensemble de cette civilisation qui mène aux actes décrits dans ce livre...Par contre, il est évident que le style, pour raconter une telle histoire, ne peut qu'être cru, car, à défaut, il serait décallé de l'histoire. Jules - Bruxelles - 80 ans - 5 octobre 2001