Pietrolino, Tome 1 : Le clown frappeur
de Alejandro Jodorowsky (Scénario), Olivier G. Boiscommun (Dessin)

critiqué par Shelton, le 25 novembre 2007
(Chalon-sur-Saône - 67 ans)


La note:  étoiles
C'est une pure merveille !!!
Quand un scénariste de génie rencontre un dessinateur de bonheur, le résultat de leur travail ne peut que transporter le lecteur au pays des merveilles pour un instant, instant d’une lecture pure et douce, pleine d’émotion et de douleur, car nous sommes bien dans une histoire tragique et dans le récit d’un destin douloureux…
A tous ceux qui s’inquiètent, déjà, du nombre d’albums pour cette série, car on est lassé de ces flux sans fin de bouquins qu’on ne sait plus ou ranger, de ces histoires qui n’en finissent pas de se terminer, des ces attentes sans fin pour savoir l’issue de ces narrations qui nous ont séduits… je serai donc rassurant il n’y aura que deux albums à lire et le premier vient juste de sortir et si le deuxième est du même acabit n’hésitez plus partez en notre compagnie, Pietrolino et Alma sont là… Ils vous attendent…
Pietrolino est un clown, un mime, que l’histoire a placé, par hasard, en France sous l’occupation nazie. Il tente avec une femme et un nain de faire rire, sourire, dans la rue, dans les restaurants… C’est laborieux, difficile, parfois, car comment faire rire quand on est témoin des enlèvements, des déportations, des exécutions ? Pietrolino est un artiste engagé, si on peut dire, puisque qu’il ose, avec ces mains faire de la résistance. Si ! Un gant tricolore, un rouge et noir, la résistance contre l’occupant, un combat entre deux forces et un monstre ancestral qui s’écroule après une lutte épuisante… Mais, alors que le client commence à applaudir timidement… le monstre retrouve une vie avec un officier nazi qui explose de haine…
Comment pourra-t-il détruire cette résistance étonnante ? Comment réduire au silence deux mains qui s’agitent ? Comment stopper la création, l’émotion pour ramener tout le monde dans cette triste réalité de l’occupation ?
Je ne peux rien vous dire car Jodorowsky et Boiscommun vont vous faire souffrir, pleurer, hurler… et ce n’est là que le début de cette très très belle histoire… Oh ! Je ne vous ai pas encore présenté Alma… Une enfant, enfin une fille de la balle ou presque… une jeune femme qui par son art tente d’apporter du bonheur, de faire naître des sourires… une artiste qui utilise un castelet, ce n’est pas le sien… Elle l’a récupéré, un soir de tempête, de larmes, de haine… Il appartenait à un géant courageux qui lui a donné le goût de relever la tête…
Oui, cette bande dessinée est si atypique que cela peut vous sembler ésotérique, inaccessible, poétique, élitiste mais en fait, c’est tout simplement un chef d’œuvre d’humanité, une des bandes dessinées les plus humaines que je n’ai jamais lues, une de celles qui font pleurer comme des fontaines sacrées mais qui redonnent du sens à nos vies, qui permettent le ressourcement de l’être… Une bédé que l’on se doit de lire pour comprendre comment cet art narratif est devenu adulte, resplendissant…
La narration graphique est d’une maturité exceptionnelle. Les paroles ne sont là que quand elles le doivent, la haine, la violence et la trahison peuvent bien souvent prendre consistance avec le dessin seul…
Alors que l’on croit être arrivé au bout des destins de Pietrolino et Alma, la dernière planche de l’album s’ouvre sur un rebondissement qui démontre que la vie n’est, décidément, pas toujours facile… Mais, après tout, on peut toujours espérer que tout finira par s’arranger… Il faut savoir continuer à croire en la vie…
Merci aux deux auteurs de nous avoir livrer un tel éblouissement humain, une telle fulgurance épique… A lire ! A lire, encore ! A relire toujours ! A donner ! A offrir !