Confessions d'un chasseur d'opium
de Nick Tosches

critiqué par DomPerro, le 6 novembre 2007
( - - ans)


La note:  étoiles
Une déglingue qui finit bien
Rien ni personne ne pourra combler ce manque qui nous travaille, qui nous gruge comme une tumeur.

Qu'importe l'endroit, que ce soit New York, Florence ou Bangkok, nous serons dans le manque.

Cette quête entêtée pour fumer de l'opium trouble déjà nos perceptions. De ce bordel douteux, illégal, en passant par cette étrange cuisine qui émerge du fond d'une ruelle sans nom, en pleine nuit, à ce mendiant qui n'a ni jambes ni bras, non, rien de tout ce long, très long, plan séquence d'étrangetés ne sera nous retarder de notre ultime but, véritable obsession de fumer de l'opium.

Nick Tosches traduit à merveille cet implacable état d'esprit à travers une écriture froide qui tantôt s'élève sur un sujet, en pleine érudition, pour ensuite tomber dans le cynisme le plus noir.

Pour ceux qui ont aimé Junky de William Burroughs ou encore le peu connu Speed, signé de son fils.
Politiquement incorrect 8 étoiles

Court texte , lu en une heure dans un style pur et agréable , "confessions d'un chasseur d'opium" narre la quête d'un homme dans sa recherche de la plus céleste des drogues : L'opium.
Cette chasse quasi obsessionnelle est ponctuée de l'historique très bien documenté de ce psychotrope.
La vénération pour ce produit ne dérange pas outre mesure et à l'instar de Numanuma je me suis surpris , moi aussi , à désirer tenter l’expérience.
Un bon texte , un beau livre , une petite maison d’édition et un petit prix ....foncez !

Ndeprez - - 48 ans - 1 septembre 2014


Esthète de la défonce 7 étoiles

Les éditions Allia font décidément un travail remarquable. Sous une couverture très élégante aux reflets bleutés, c’est un très beau texte de Nick Tosches, un des meilleurs écrivains américains de tous les temps, oui, il faut le clamer, ce gars est un écrivain d’exception, qui est offert à nos yeux qui n’ont pas eu l’occasion de découvrir cet article fleuve paru dans Vanity Fair en 2000.

De l’homme, je ne sais pas grand-chose finalement mais je connais bien l’auteur pour avoir plusieurs de ses livres, aussi bien des romans que ces textes fous d’érudition élégante et déglinguée que sont Hellfire ou Héros oubliés du rock’n roll que j’ai lu il y a longtemps, déjà parus chez Allia avant de connaitre ce site.
Ici, nous sommes quelque part entre le reportage, l’auteur est aussi un journaliste connu et apprécié, et la quête initiatique.
Passées les premières pages d’introduction qui feront beaucoup de peine aux amateurs de vin, du moins ceux qui se considèrent comme tel, mais dont le propos est plus profond qu’il en a l’air, Tosches s’envole, et nous avec, vers sa grande quête de la drogue sacrée, céleste et pure : l’opium.
Avant d’aller plus loin, pour éviter de perdre en route tous les anti-drogue, il faut bien comprendre que le propos n’est pas de légaliser la drogue. Rien dans ces 78 pages n’indique une quelconque position de l’auteur en ce sens. Il ne s’agit pas non plus d’une saga de la défonce, Keith Richards n’apparaît pas en filigrane derrière les lignes du texte.
Non, il s’agit d’une invitation au voyage, d’une chasse vers une tradition perdue lancée par cette phrase assez forte pour tuer n’importe quel ouvrage : « Vous comprenez, il fallait vraiment que j’aille en Enfer. J’avais, pour ainsi dire, le mal du pays ». C’est digne des articles du magazine Rolling Stones de la grande époque.
La grande force de ces pages est de rendre comparable la tradition antique de la fumerie d’opium, avec son cérémonial et ses outils précieux, à une cérémonie du thé. Vision romantique et documentée de cette tradition, l’article de Tosches nous raconte sa recherche à la fois de la matière, l’opium, et de la façon, c’est-à-dire l’endroit, la fumerie, les gestes et les sensations. Pour lui, il n’y a rien de plus pur et authentique que l’opium, sorte de mère de toutes les drogues. A le lire, on sent que l’expérience n’est pas pour le premier venu et que derrière la sensation idyllique se cache un grand danger. Plus qu’une quête de substance toxique, il s’agit d’une quête de soi. Le manque abreuve ces pages mais pas le manque vulgaire du junkie qui veut sa dose, il s’agit plutôt de remplir un trou, de combler un vide existentiel, de vivre une expérience autre, d’ouvrir un porte sur soi-même.
Mais attention. Ce livre est dangereux. Croyez-moi : je déteste perdre le contrôle et c’est exactement l’effet que procurent les drogues et pourtant, pourtant, j’ai eu envie d’essayer l’opium.
Essayer l’opium… J’ai beau l’avoir écrit, je n’arrive toujours pas à y croire.

Numanuma - Tours - 51 ans - 27 août 2012