Le roman de Robert Margerit fait explicitement référence à l’Île au Trésor. Vous l’apprécierez donc d’autant plus si vous avez lu auparavant le récit de Stevenson. On y rencontre en particulier, dans l'Île des Perroquets, le terrible capitaine Flint, commandant du Walrus, que l'on voit s’emparer du fabuleux trésor après lequel courront, quelques années plus tard, les protagonistes de l’Île au Trésor.
Tandis que l'Île au Trésor, qui se caractérise par une forte unité de temps et de lieux, relevait quelque part aussi bien du conte que du roman d’aventure proprement dit, l'Île des Perroquets de par la complexité de son intrigue et le traitement psychologique de ses personnages, s’inscrit clairement dans une tradition romanesque de divertissement, mais de très grande qualité. Le talent de Robert Margerit y est pour beaucoup: à travers un récit de pirates somme toute assez classique, mais foisonnant, usant avec jubilation (et parfois un peu de naïveté il faut le dire) des figures incontournables du genre (la marque noire, les naufragés perdus sur une île déserte...) et brossant avec beaucoup de couleur et de romantisme le décor chamarré des caraïbes du dix-septième siècle, il lui insuffle une forte dimension littéraire.
Le roman est en effet parcouru par deux thématiques qui lui apportent beaucoup de consistance. D’une part tout d’abord une réflexion mélancolique sur le sens de la vie des forbans des mers, avec des questions sur la liberté, la violence, l’amitié et l’enrichissement, et d’autre part la complexité des relations entre les hommes et les femmes. L’amour est d'ailleurs un des moteurs essentiels de l'Île des Perroquets, via notamment la figure ambiguë de la belle et manipulatrice Manuella, qui tournera la tête, pour le plus grand malheur de ses compagnons, à un des chefs des flibustiers. C’est peut-être la métaphore ultime de l'Île des Perroquets: l'amour, comme les courses sur les mers et les îles aux trésors, amène autant de félicité que d’amères illusions.
Fanou03 - * - 49 ans - 27 juillet 2016 |