Bangkok 8
de John Burdett

critiqué par BMR & MAM, le 8 août 2007
(Paris - 64 ans)


La note:  étoiles
Un polar intelligent écrit par un britannique, visiblement tombé amoureux du pays thaï.
Ceux qui ont aimé le voyage en Chine avec les polars de Qiu Xiaolong à Shanghaï, peuvent prendre sans hésiter un ticket pour la Thaïlande avec Bangkok 8 de John Burdett.
Un polar intelligent écrit par un britannique, visiblement tombé amoureux du pays thaï : on plonge avec fascination dans l'enfer du district n° 8 du L.A. asiatique, Krung Thep, ses charmes, sa corruption et ses trafics de drogue, de sexe et de jade ...
Et c'est avec un humour plutôt finaud que J. Burdett décrit par le menu la vie thaï en général (du moins la vie à Bangkok) et celle de l'inspecteur Sonchaï en particulier, un métis bouddhiste (quelque part entre moine et flic) qui doit faire équipe avec une envoyée du FBI.
Le choc des cultures est mis en scène avec tout ce qu'il faut d'ironie et d'esprit pour faire de cette enquête un agréable voyage à la découverte des us et coutumes thaïs : cuisine, religion, corruption, prostitution, superstition, fascination et répulsion pour l'occident, ... du moins jusqu'à la seconde moitié du livre où l'horreur criminelle reprend ses droits (c'est quand même un polar et on est quand même à Bangkok !) avant un dénouement typiquement asiatique !

Quelques morceaux choisis de l'ironie futée de J. Burdett :

[...] La Thaïlande ne retire pas grand chose d'industries comme celles du vêtement. Les sociétés occidentales se réservent la part du lion. C'est pourquoi nous voyons dans l'industrie du sexe une façon de redistribuer la richesse mondiale de l'Occident vers l'Orient.
[...] L'Occidental fait généralement observer que le Thaï vit dans un paradis de dupes. Peut-être, mais le Thaï n'est-il pas fondé à rétorquer que l'Occidental s'est construit un enfer de dupes ?
[...] Nous sommes un peuple superstitieux pour lequel quelque chose d'aussi intime que le nom doit nécessairement posséder un pouvoir magique. X demande ce qu'il en est des noms occidentaux. Ils reflètent généralement le fait que les Occidentaux sont obsédés par l'argent, en ceci qu'ils rappellent le métier que faisait un de leurs ancêtres : Smith, Woodman, Baker, Meunier, etc. C'est donc l'argent qui compte pour eux, et pour nous c'est la magie ? On peut le dire ainsi, bien que ce soit peut-être trop simplifier.
[...] Quoique la Thaïlande soit une société bouddhiste et humaine soucieuse des droits de l'homme et de la dignité de ses citoyens, les pays riches doivent comprendre que nous n'avons pas toujours les ressources nécessaires pour faire appliquer la loi comme il le faudrait. C'est un luxe que seules peuvent s'offrir les nations qui se sont industrialisées les premières.
Un polar réussi 8 étoiles

Ce polar sort clairement de l'ordinaire. Tout d'abord grâce à la qualité de son intrigue mais aussi et surtout pour l'excellente représentation de la ville dans laquelle se déroulent les aventures de l'inspecteur Sonchaï: Bangkok.
La mégalopole thaïlandaise est fidèlement retranscrite: ses quartiers, son ambiance interlope, ses différentes factions, les ethnies, les spécificités locales, les langages. Ceci facilite l’immersion au sein d’un roman policier qui oscille entre péripéties, flashbacks, dialogues et réflexions appréciables le tout sous l'œil bienveillant du grand Bouddha qui l’air de rien joue son rôle lui aussi.
Un polar qui sort de l’ordinaire !

Sundernono - Nice - 41 ans - 28 août 2023


Que vive le polar ethnologique ! 8 étoiles

Une plongée dans la Thaïlande !
Loin du cliché touristique : un flic qui vit au milieu de la concussion, l'accepte et vit avec. Du choc culturel : américain- thaïlandais ! Une approche bizarre et des rencontres étonnantes.
L'histoire policière disparaît au profit de l'intérêt autour de ce que propose l’historiographie de ce drôle de pays. Le livre a été écrit avant la radicalisation du régime politique (quoique ?).
Pour qui, comme moi, n'a aucune connaissance particulière de ce qu’est la Thaïlande, c'est un ouvrage extra-ordinaire que je recommande chaudement.
Quelle monde étonnant que celui du bouddhisme !
A vous d'y entrer si vous souhaiter dépasser les clichés.

DE GOUGE - Nantes - 68 ans - 21 octobre 2015


Une fantastique plongée aux tréfonds de la "cité des anges" 7 étoiles

Pour qui ne connait pas la Thaïlande, pour qui voudrait s'aventurer seul le soir dans les bas-fonds de la capitale tentaculaire du Royaume de Siam, ce livre est une remarquable introduction, à lire d'une traite dans l'avion qui vous y emmènera.
L'intrigue est loin d'être exceptionnelle, elle est même passablement tirée par les cheveux.
Le style est agréable, mais sans relief particulier, et surtout sans l'humour qui seul nous permet d'apprécier pleinement un polar.
Mais la description de l'âme thaïe est remarquable: à vrai dire, personne à ma connaissance n'a jamais aussi bien rendu l'approche siamoise des problèmes que nous rencontrons tous ici bas que John Burdett.
La gent féminine thaïlandaise est ainsi peinte dans son vrai jus, à mille lieues de ce peuvent s'imaginer les occidentaux.
Drogue, sexe mais surtout philiosophie de l'amour tarifé, voilà l'atmosphère dans laquelle baigne ce remarquable traité de la vraie vie à Bangkok.
A lire immédiatement si vous connaissez déjà cette capitale ou projetez de vous y rendre ! Très probablement, ce livre décevra, voire ennuiera, les autres.

Noir de Polars - PARIS - 56 ans - 28 mai 2011


kâa chăy-lêey 6 étoiles

Pour moi, l’intérêt pour la trame policière – une histoire de trafic de jade – a diminué au fur et à mesure que l’on raconte Bangkok vu de l’intérieur. Là est l’originalité de ce polar. Mais, l’auteur se concentre sur les mœurs sexuelles du pays – déjà bien connues par la majorité. Les convictions spirituelles du policier bouddhiste auraient dû occuper plus de place, car la notion de karma est rarement explorée en littérature.

Le style de Burdett comporte des manies agaçantes : ce ton insinuant que tous les étrangers (farangs) sont inférieurs ; la façon dont il remplace soudainement le narrateur ; et de longues descriptions inutiles, sur la chirurgie de changement de sexe par exemple.

Un thriller moyen pas vraiment haletant qui a de la difficulté à trouver son identité.

Aaro-Benjamin G. - Montréal - 55 ans - 26 novembre 2007