Les Pères et les Mères
de Aldo Naouri

critiqué par Saint-Germain-des-Prés, le 3 août 2007
(Liernu - 56 ans)


La note:  étoiles
Retour aux origines
Ne connaissant pas du tout l’auteur (shame on me, diront certains…), ni sa réputation de super pédiatre didactico-captivant évoquée dans les critiques précédentes, j’ai entamé ce livre (offert) avec une neutralité tout exemplaire. Ce qui m’a permis de réagir fortement à cette analyse de la parentalité et des relations hommes-femmes, soit pour en saluer l’originalité, soit pour crier mon désaccord (qui suis-je, mais qui suis-je, pour critiquer ce ponte ?)…

Naouri adapte la théorie freudienne de l’Œdipe collectif. Pour ceux qui l’ignorent, il s’agit de remonter aux origines de l’humanité et d’analyser un fait précis qui permet d’expliquer certains éléments actuels : dans cette société patriarcale, les fils, lassés d’un père autoritaire qui se réserve toutes les femelles, le tuent et le mangent. Aldo Naouri reprend donc cette histoire tout en imaginant quelques variantes. Point de cannibalisme, mais la première sépulture. Pourquoi ? Car le, ou plus vraisemblablement « les » assassins ont dû craindre que la victime (cruelle, redoutable, violente) ne revienne à la vie, ne se relève et ne se venge. D’où amoncellement de rochers, de pierres, sur le cadavre pour le réduire à l’impuissance. Cet événement est doublement marquant car au-delà de l’émergence des sépultures, il marque « l’éclosion subite d’un processus conscient d’anticipation jusqu’alors probablement inconnu ». Trois conséquences encore à ce récit fondateur : l’interdit de l’inceste, l’échange des femmes (qui n’ont rien à dire) et la constitution d’un lien social. Naouri relève encore l’importance de la mère : « elle a assumé seule (…) la gestation et la longue mise en œuvre des soins requis par une progéniture immature. Et parce que ces soins ne lui sont pas contestés, elle développera à l’endroit de cette progéniture l’attachement féroce que produit un plaisir authentique et sans doute présent depuis toujours ».

Mais les femmes et les hommes n’ont pas la même perception du temps, selon l’auteur. Car elles savent « que leur vie ne s’arrête pas à leur mort physique, mais qu’elle se propage dans ces enfants qu’elles ont portés dans leur corps ». D’où l’indispensable présence du père pour transmettre sa propre vision du temps.

Pas mal, me direz-vous. Oui oui, c’est aussi ce que j’en pense. Mais quelques petites choses m’ont irritées. Par exemple, une espèce de regard condescendant, presque méprisant (dont il se défend à grands cris et à maints endroits) à l’égard des femmes qui est encore exacerbée par un excès de compréhension à l’égard des hommes auxquels, ma foi, on ne peut pas en vouloir puisqu’ils sont guidés par une chose sur laquelle ils n’ont aucun contrôle : leurs pulsions sexuelles. Les pauvres ! « Et quand on a pris la mesure de cela, on a pratiquement tout compris de la tragédie qu’il vit. » Ou encore : « Le voilà encombré de ce sexe ». Cette tragédie le pousse à le dessiner sur les parois des grottes, le pousse à la violence, aux abus, à l’orgueil, à l’arrogance, reconnaît Naouri qui s’empresse de souligner : « Et si toutes ses attitudes n’étaient qu’autant de compensations destinées à combattre le doute ontologique profond qui le travaille en toute chose ? » Décidément, le pauvre !

Dernière chose, et celle-ci m’a fait bondir : Naouri propose une technique pour faire comprendre à l’enfant la notion de temps mais surtout celle de règles par opposition à l’anarchie. Il s’agit de ne plus nourrir les bébés à la demande mais selon un horaire strict !!!!!!!!! Aaarghhh !!!!!!!!