Certes, R. Char a, de 1930 à 1934, fait partie du groupe surréaliste mais en maintenant toujours ses distances et son indépendance. Il quitte assez rapidement le groupe, sans discorde majeure. Certes, "Le Marteau sans maître" est influencé par le surréalisme mais c'est déjà une oeuvre où le jeune poète affirme son originalité. Char a dit qu'il n'avait jamais cru à l'écriture automatique. Le surréalisme a produit des merveilles mais aussi un systématisme creux, un culte de l'image artificiel. Dès "Fureur et mystère", sa poésie transcende le surréalisme et l'intègre à sa propre langue. Malgré certaines maladresses de jeunesse et un caractère quelque peu daté, " Le Marteau sans maître" est porté par une fougue, une violence, une révolte et un magnétisme rares. C'est un fleuve capricieux, dont on suit le cours de la naissance aux eaux abondantes, tournées vers l'avenir, après avoir été emporté et foudroyé par leurs humeurs méningitiques et torrentielles. Un "fleuve radiant et énigmatique ", pour reprendre les propres mots de Char à propos de cette oeuvre parue en 1934 où l'on pressent effectivement la montée des périls que l'on sait. Une oeuvre inoubliable.
Buoux - - 59 ans - 8 octobre 2008 |