Petit éloge d'un solitaire
de Richard Millet

critiqué par Antiphon77, le 5 avril 2007
(Hainaut - 47 ans)


La note:  étoiles
Petit éloge d'un non-écrivain
Par toute son oeuvre, Richard Millet tente de sauvegarder le terroir qu'il a pourtant jadis quitté pour la capitale. Ces 88 pages (inédites pour cette collection Folio 2 euros) sont consacrées au grand-père Millet, Germain de son prénom. Bourrelier, puis assistant en pharmacie, lecteur de 'L'humanité' et du 'Journal' de centre-droit, il rend l'âme à Toulouse, quelques semaines avant la naissance de Richard. Celui-ci se veut dès lors comme son passeur, à tout le moins le dernier bonheur de sa vie.
Comme toujours chez Millet, les lieux sont des protagonistes essentiels au récit, au point de fruster le lecteur non initié.
Quant aux phrases si proustiennes (les triples négations demandent souvent relecture), on se questionne sur la nécessité d'utiliser ce style pour évoquer le passé. A choisir entre une littérature en danger, au style et aux thèmes passés, et une nouvelle littérature qui se pervertit aux diktats contemporains pour subsister, Millet choisit en tout cas clairement le premier camp. La haine du temps présent (jugé contre la littérature?) transparaît dans le texte.
C'est que, pour lui (p. 33),
"(Ce manque d'intérêt pour la lecture me touche), moi qui n'aurai en quelque sorte vécu que par les livres, sinon pour eux, et qui me demande si je n'y aurai pas perdu ma vie, en tout cas cette forme d'innocence sans laquelle il est impossible de vivre ou, pour reprendre une expression qui a l'évidence mystérieuse de la clarté lunaire, d'attendre tout de la vie."