Journal d'un remplaçant (Le)
de Martin Vidberg

critiqué par Shelton, le 11 février 2007
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
Quand l'instit coince des bulles...
Lewis Trondheim, mes amis savent que je ne l’aime pas du tout et qu’on ne peut absolument pas me suspecter de partialité à son égard, a réussi à trouver des bouquins de qualité pour remplir sa nouvelle collection Shampooing. Je dis bouquins et non bédés car il nous sort complètement des chemins traditionnels de cet art narratif et chaque parution surprend le lecteur : du journal au jeu, du blog au récit intime, du déjanté au réalisme, sans oublier l’histoire atypique de pirates, presque tout y est pour notre plus grand plaisir…
C’est l’ouvrage de Martin Vidberg, Le journal d’un remplaçant, qui a retenu le plus mon attention. En effet, lorsque j’étais petit, les professeurs étaient les premiers à déconseiller la lecture des bédés, alors en voyant un instituteur, euh, professeur des écoles, choisir le mode bédé pour raconter une année de sa vie d’enseignant, je dois avouer que j’ai été surpris… puis charmé… enfin, séduit !!!
Martin Vidberg nous raconte son travail du temps où il était remplaçant. Oui, contrairement à certaines idées toutes faites sur les enseignants, quand ils sont malades, ce qui peut arriver à tout le monde, il y a un réseau de remplaçants qui permet de palier aux absences et de continuer à faire travailler les enfants, même si c’est d’une façon différente, chaque professeur des écoles ayant sa manière de faire travailler, sa pédagogie, ses relations avec les enfants… Martin avait donc ce rôle, souvent ingrat, de remplacer… « Bonjour, je suis le remplaçant ! » et, c’est alors que commencent les problèmes pour lui…
Car arriver dans une classe sans rencontrer le prédécesseur – il est malade et donc pas présent – demande de trouver seul, ou presque, la réponse à des questions parfois complexes… Qu’est-ce qui a déjà été fait dans le programme de mathématiques ? Quels sont les groupes en lectures, en sport ? Quelles sont les habitudes spécifiques ? Les cycles artistiques commencés ? Qui sont les élèves turbulents ? Mais cette dernière question ne reste pas longtemps sans réponse…
On voit ainsi Martin travailler au jour le jour, jusqu’au moment où sa vie, enfin, disons son année scolaire, bascule dans l’inconnu…
« Et sinon, on cherche un volontaire pour l’IR des Sapins… ça vous dirait ? »
« Euh… C’est quoi un IR ? »
« Un institut de redressement pour élèves ultra-violents… le titulaire a craqué… »
Finalement, on ne cherchera pas un volontaire, on le désignera et c’est ainsi que Martin va découvrir un monde qu’il ignorait, pour lequel il n’était pas préparé ce qui ne déclenchera pas d’aide spécifique…
« Je n’ai, bien entendu, aucune idée de la pertinence de mon emploi. Il y a bien eu 4 journées de formation organisées par l’Inspection… mais je n’ai pas été invité. »
Et quand, une autre fois, il a l’occasion de poser une question sur la forme de son travail, sa pédagogie, on lui répond sèchement que cette question n’a pas d’importance :
« Sinon, sur le plan pédagogique, je me demandais… Ah… On s’en fout ? Ah bon ? Oui, bien sûr. »
Oui, il en faut du courage et de l’abnégation pour faire ce métier dans ces conditions…
Martin Vidberg nous raconte tout cela sur le mode de la bande dessinée. Son graphisme est très simple, les personnages sont du genre patatoïde et je dois vous avouer que le tout est très vivant et que rapidement seuls l’histoire, le témoignage, les personnes rencontrées existent…
Une bien belle expérience de récit qui montre la qualité de directeur/éditeur de Lewis Trondheim… Alors si vous ne connaissez encore pas cette collection, ce label, ce Shampooing… vous savez par quel ouvrage commencer !
Une BD attachante à conseiller à tous 9 étoiles

Moi je ne suis pas professeur des écoles, mais mon amie oui !

Et ce livre m'a beaucoup intéressé par sa traduction fidèle de ce que je ressens du travail d'enseignant (à travers ma compagne). Mais la pointe d'humour particulière de Martin Vidberg, fait la différence. Car on passe un très bon moment à lire cette bande-dessinée.

Donc un seul mot, PARFAIT, par son humour et sa très fine vision de ce métier. A conseiller à tous les professeurs, mais aussi à tous les autres, car cette BD est avant tout une belle histoire.

Lemask - La Roche sur Yon - 40 ans - 13 décembre 2010


Plutôt d'accord aussi 8 étoiles

Un bon moment à passer pour découvrir l'univers des professeurs des écoles. Les personnages sont attachants. Le dessin est un peu déroutant. On découvre avant tout l'envie de cet auteur de partager une année folle qui ressemble pourtant certainement à beaucoup d'autres.

Bubulle - - 44 ans - 13 avril 2009


Un joli témoignage... 9 étoiles

C'est un bien joli témoignage, donc, que nous livre dans cette BD Martin Vidberg. Sans fard, sans sensationnalisme, il nous montre sa réalité du métier de remplaçant et bouscule, au passage, certaines idées reçues (eh non, les profs ne sont pas payés les jours de grève !).

Petit à petit, pages après pages, on suit son année scolaire. Elle commence doucement, faisant quelques remplacements, par-ci, par-là. Et puis, un jour, on le catapulte à l'IR des Sapins. Il aura en charge 6 enfants, 6 garçons qui ont atterri là-bas car ils n'ont pas leur place ailleurs. Son objectif : retrouver une ambiance de classe ... le pari est très, très loin d'être gagné.

Les pages, les semaines passent. Nous suivons les efforts, les réussites, les bagarres, les petites joies, les petites victoires, mais aussi les gros moments de doute de ce remplaçant qui fait tout ce qu'il peut, mais qui se demande si franchement il y arrivera.

Le graphisme, bien que simple, fait très bien passé les émotions de l'auteur et les moments d'émotion, justement, ne sont pas rares en compagnie de ces enfants qui ont vécu "à eux 6 [...] toute la gamme des horreurs que l'on peut infliger à un enfant." On referme le livre, mais comme le remplaçant, on ne peut pas oublier facilement ces petites "patates" et on est heureux d'apprendre qu'un an après, l'un des enfants "retourne dans le classique". Une petite réussite, quand on sait ce qu'il reste à accomplir pour tant d'autres ...

Découvrez donc vite cette BD qui, au-delà des doutes et des souffrances, véhicule aussi un indispensable message d'espoir.

Lalalaire - Vendée - 43 ans - 10 juin 2008


Pleinement d'accord avec Shelton 9 étoiles

C'est à coup sûr un bouquin réussi: touchant, drôle, juste, il parvient à aborder l'enseignement, les enfants et l'enseignant, sous un angle vraiment neuf, où les mots et les images partagent la même sincérité et la même spontanéité. Ce n'est pas le seul bon bouquin de la collection Shampooing, j'avais aussi beaucoup aimé "Libre comme un poney sauvage" de Lisa Mandell qui était aussi un blog dessiné avant d'être un album. Les deux démontrent en tout cas qu'il y a d'autres voies pour publier la BD que la revue ou l'album: le Net est devenu un lieu d'autoédition très efficace, lu, suivi, recherché, il sert vraiment de tremplin en BD (alors qu'en littérature traditionnelle, c'est plutôt un lieu d'autocomplaisance et d'autopromotion).

Tomtom - - 45 ans - 2 mars 2007