Hombre
de Elmore Leonard

critiqué par Grass, le 21 janvier 2007
(montréal - 47 ans)


La note:  étoiles
Ne jugez pas le sauvage
Avant d'écrire des histoires débridées remplis de ces personnages qui ont fait sa marque de commerce, Elmore Leonard s'est fait la main dans le western, à notre plus grand bonheur.

"Hombre" est le récit d'un cambriolage de diligence qui tourne mal et d'un homme qui n'en fait qu'à sa tête. Cet homme, c'est John Russell, aussi connu sous le nom de "Hombre", un blanc dont on dit qu'il a été élevé avec les Apaches. Et comme tous ceux qui vivent avec ce genre de double identité, il en résulte non pas un attachement aux deux camps, mais plutôt un "no man's land", un endroit où le sujet est seul, où il peut soit tenir ses convictions, soit tomber en dépression.

En situation de crise, l'équipage de la diligence n'aura d'autre choix que de s'en remettre à Russell, le seul qui puisse les guider, perdus en plein désert. Mais Russell est solitaire et n'a pas la fibre du leadership et se développe alors une situation ambiguë où des gens en danger se réclament de quelqu'un qui n'en a rien à foutre. En apparence seulement, car du moment que la femme du Docteur Favor se trouve en danger, enlevée par les brigands puis attachée au soleil sous les yeux de l'équipe de Russell, sans rien à boire et agonisante, l'"Hombre" fera preuve d'une grande humanité et confondra tous les autres qui ne s'en remettaient qu'à sa dureté.

Un grand roman bref sur la compréhension et le racisme par un des maîtres du genre.
OVNI littéraire 10 étoiles

Un type qui dégaine son Colt est une scène vue 100 fois, mais pratiquement jamais lue.

Le plus souvent, on a vu un bon western, j’ai à présent lu un excellent western. En 1961, au moment où Hathaway, Ford, Hawks et Sturges filment les grands classiques, Elmore Léonard écrit cette tragédie en 4 actes située au fin fond de l’Arizona.

Le plus étonnant est que l’écart de moyens entre une plume sur une feuille de papier et un grand studio n’enlève rien à l’impact de ce récit, qui tient pour l’essentiel au personnage central et au décor.

Blanc et apache, mais ni l’un ni l’autre (bien vu Grass), John Russel dont le dialogue tient sur une page rentre tout à fait dans le style Actors Studio laconique des années 60, immortalisé par Marlon Brando.

Dans le film de Martin Ritt de 1967, vu par tous les cinéphiles baby boomers (60 balais au moins), Paul Newman récite d’ailleurs cette partition jusqu’à la caricature.

La dimension tragique vient du dernier acte où Russel, surnommé “Tres hombres“ en raison de sa valeur au combat de 3 hommes, invincible et roué à toutes les ruses de survie, est tué, dans le dos bien sûr, à la suite d’un imprévu que je vous invite à découvrir.

Enfin, ce livre est aussi un passionnant carnet de voyage dans l’Arizona de 1890 où un trajet de 120 km sur une vague piste présentait les plus hauts risques.

A découvrir absolument. Même avec une couverture aussi insignifiante.

Ciceron - Toulouse - 76 ans - 23 mars 2008