Les dépossédés
de Ursula K. Le Guin

critiqué par Julius, le 4 janvier 2007
( - 51 ans)


La note:  étoiles
foutaises !
En sortant du boulot, je suis allé sur cette fameuse place, celui qui vient d'Anarres est là ! il parlera ... j'aime pas les grandes messes mais j'y suis allé, pour rigoler. j'ai rencontré Ursula, elle m'a dit par là dépêche toi !
Courir pour un totor qui va s'emballer à une tribune ! ahah ! j'ai pris mon temps
ça y est ! le voilà qui s'exprime ! ahah on va se marrer

"C'est notre souffrance qui nous réunit. Ce n'est pas l'amour. L'amour n'obéit pas à l'esprit, et se transforme en haine quand on le force. Le lien qui nous attache est au-delà du choix. Nous sommes frères. Nous sommes frères dans ce que nous partageons. Dans la douleur, que chacun d'entre nous doit supporter seul, dans la faim, dans la pauvreté, dans l'espoir, nous connaissons notre fraternité. Nous la connaissons, parce que nous avons dû l'apprendre. Nous savons qu'il n'y a pas d'autre aide pour nous que l'aide mutuelle, qu'aucune main ne nous sauvera si nous ne tendons pas la main nous-mêmes. Et la main que vous tendez est vide, comme la mienne. Vous n'avez rien. Vous ne possédez rien. Vous êtes libre. Vous n'avez que ce que vous êtes, et ce que vous donnez. Je suis ici parce que vous voyez en moi la promesse que nous avons faite il y a deux cents ans dans cette ville - la promesse tenue. Car nous l'avons tenue, sur Anarres. Nous n'avons que notre liberté. Nous n'avons rien à vous donner que votre propre liberté. Nous n'avons comme loi que le principe de l'aide mutuelle entre individus. Nous n'avons comme gouvernement que le principe de l'association libre. Nous n'avons pas d'états, pas de nations, pas de présidents, pas de dirigeants, pas de chefs, pas de généraux, pas de patrons, pas de banquiers, pas de seigneurs, pas de salaires, pas d'aumônes, pas de police, pas de soldats, pas de guerres. Et nous avons peu d'autres choses. Nous partageons, nous ne possédons pas. Nous ne sommes pas prospères. Aucun d'entre nous n'est riche. Aucun d'entre nous n'est puissant. Si c'est Anarres que vous voulez, si c'est vers le futur que vous vous tournez, alors je vous dis qu'il faut aller vers lui les mains vides. Vous devez y aller seuls, et nus, comme l'enfant qui vient au monde, rien posséder, dont la vie dépend entièrement des autres gens. Vous ne pouvez pas prendre ce que vous n'avez pas donné, et c'est vous-même que vous devez donner. Vous ne pouvez pas acheter la Révolution. Vous ne pouvez pas faire la Révolution. Vous pouvez seulement être la Révolution. Elle est dans votre esprit, ou bien elle n'est nulle part."

Foutaises ! je me suis écrié ! en forçant mon rire ! ahah, pourtant en repartant vers mon loft, j'avais mal au ventre ... putain de gastro ...
Prouver notre droit par des actes, si nous ne le pouvons par des mots. 8 étoiles

Première incursion dans l’univers d’Ursula Le Guin et je peux vous dire d’emblée que ce ne sera pas la dernière. Qu’est-ce qui m’a tant plu dans les dépossédés ? Je vais essayer d’être concise, sans rien oublier, mais ce n’est pas gagné. Déjà le style : impeccable et une histoire qui aborde une tonne de sujets tout aussi essentiels que passionnants dans un questionnement permanent.

Urras et Annares sont deux planètes qui se font face (chacune étant la lune de l’autre). La seconde, aride et inhospitalière, a accueilli les bannis et autres parias d’Urras qui ont instauré une société égalitaire où l’intérêt général est la suprême préoccupation de chacun, où le bonheur et le bien-être de l’un sont conditionnés au bonheur et au bien-être de l’autre. Les conditions de vie matérielles sont difficiles, mais chacun a, de par sa seule volonté ou prédisposition naturelle, la possibilité de devenir ce qu’il est ou souhaite. Étiquette accolée : « meilleures des sociétés possibles».

Pour Annares, c’est un peu comme sur terre : si la cuillère qui te nourrit est d’argent, grandes sont tes chances qu’elle le reste en vieillissant, peu importe que tu sois intelligent, débile profond, âme pourrie ou gentil Samaritain : le monde t’appartiendra et tu pourras jouer dans la cour des rois. Par contre si ton berceau est de misère, espère que de dons ou de neurones tu n’aies point, tu pourras au moins croire que ton pauvre sort, tu mérites… Étiquette décollée : « Liberté-Egalité-Fraternité » à remplacer par ce que vous voulez, ça ne manque pas…

Et comme un pont faisant la liaison entre ces deux mondes : Shevek ! Un physicien surdoué d’Annares qui a mis au point une théorie scientifique, invité à en débattre et la partager sur Urras.

"Il n'avait pas eu d'égaux. Ici, au pays de l'inégalité, il les rencontrait enfin."

Mais voilà, les certitudes de Shevek vont petit à petit s’émousser et le fol enthousiasme du début va laisser place à une déconstruction des bases de chaque monde et de ces sacro-saints idéaux qui les tiennent à bout de bras.

On ne peut pas briser les idées en les réprimant. On ne peut les briser qu'en les ignorant. en refusant de penser, refusant de changer.

Le meilleur des mondes n’est pas forcément exempt d’inégalités et entre l’enfer et le paradis d’Urras se dessine malgré tout un entre deux… Sous le mot de liberté, utilisé par chacun de ces deux peuples, émergent deux visions différentes de société possible. La comparaison entre un communautarisme totalitaire passé et un libéralisme effréné actuel serait trop simple : Ursula Le Guin me semble dépasser cette dichotomie pour nous inciter à penser autrement. Au-delà...

"Prouver notre droit par des actes, si nous ne le pouvons par des mots."

Dixie39 - - 54 ans - 28 avril 2017


Il y avait un mur 10 étoiles

Ainsi commence l'un des romans les plus aboutis d'Ursula Le Guin. Éminemment politique, éminemment humain, tel est Les Dépossédés. Entre Urras la verdoyante, la riche, la capitaliste, et Anares la désertique, l'anarchiste, la révolutionnaire, Ursula Le Guin ne tranche pas didactiquement. Au travers du personnage de Shevek, le plus grand physicien d'Anares, elle donne à découvrir ces deux planètes jumelles dont chacune est la Lune de l'autre, son reflet, son contraire. Le thème du mur rythme le roman, ce mur extérieur qui entoure l'astroport d'Anares, rejetant les étrangers, enclosant les Anaresti dans leur utopie, comme du mur intérieur inhérent à toute construction sociale et mentale, qu'il faut abattre.
L'évolution du roman se fait par lentes et répétées progressions. Certains peuvent trouver que l'action manque. La réflexion est là, forte, non appuyée, qui soutient la lecture, et est soutenue par une écriture pointilliste. Si Le Guin avait appartenu à une école de peinture, elle aurait été de ces fauvistes qui par les touches de peintures créent un monde qu'il faut regarder avec recul.

Vda - - 49 ans - 9 octobre 2008