Danse du temps (La), tome 1 : Le baiser du serpent
de Igor Baranko

critiqué par Shelton, le 12 novembre 2006
(Chalon-sur-Saône - 68 ans)


La note:  étoiles
Une deuxième chance ?
Igor Baranko est un auteur de bandes dessinées dont je ne vous ai pas encore parlé. Voilà déjà longtemps que je vous ai prévenu que la bédé s’était de façon irrémédiable tournée vers le monde entier, qu’elle avait quitté son petit univers franco-belge, qu’elle était bien un mode d’expression, un art narratif, universel, adapté à tous les êtres humains… Igor Baranko est un exemple de cette ouverture. Il est né en Ukraine, à découvert la bande dessinée grâce à un album signé Rosinski [un polonais que nous connaissons bien car il a créé les dessins, entre autres, de Hans et Thorgal], a voyagé en Asie pour y chercher la sagesse, puis est allé du côté des Etats-Unis comprendre les Super Héros et la culture du business… Ce parcours initiatique complexe et atypique lui a permis d’arriver à se construire un style bien à lui. Une histoire racontée par Igor Baranko porte en elle-même sa signature, sa patte… C’est très visuel, très tonique, violent [pas au sens habituel très négatif, mais plutôt dans le sens où tout peut arriver et donc chaque image, chaque action peut surprendre, agresser le lecteur, l’empêcher de dormir, le pousser à quitter ses certitudes. C’est une bédé risquée, quoi !].
La danse du temps va nous plonger dans une civilisation amérindienne que nous ne connaissons pas. Il ne s’agit pas, ici, des Indiens de notre jeunesse, ceux qui attaquaient les cow-boys, les conquérants de l’Ouest, qui buvaient l’eau de feu… Ici, les Indiens sont des peuples pétris de sacré, d’étrange, qui écoutent leurs chamans… Nous allons faire la connaissance de Quatre-vents, le fils du chef d’une tribu de nomades, de barbares, les Lakotas…
Dès le début de l’album, nous avons une démonstration de la narration graphique d’Igor Baranko avec six planches sans texte qui, pourtant, nous racontent un événement très précis, très complet et extrêmement fort. Quatre-vents enlève la fille du chef des Pawnées, la splendide Lune-dans-les-nuages… C’est ce fait banal qui va lancer les deux peuples dans une sacrée aventure…
La danse du temps est un rite spécial qui permet d’arrêter le temps, puis de le remonter et de changer certains éléments qui vont changer le destin des hommes. Cette danse présente certains risques en particulier pour ceux qui l’exécutent. C’est l’apanage d’un peuple, les Paiutes qui ne peuvent plus avoir de futur car ils n’arrivent pas à avoir d’enfants… mais les dangers peuvent aussi toucher les bénéficiaires de la danse et l’ensemble des habitants de la terre !
Entre Quatre-vents et Lune-dans-les-nuages va naître une histoire ambiguë qui sera ballottée entre amour et fantastique, sans que l’on puisse deviner, nous lecteur, où va nous emmener l’auteur. C’est vraiment féerique et je ne peux que vous conseiller de vous laisser prendre même si je comprends très bien que certains d’entre vous resteront complètement insensibles à ce récit d’Igor Baranko.
Je dois vous avouer que j’ai adoré et que je trouve que ces peuples amérindiens ont une sagesse qui nous fait cruellement défaut et que nous aurions intérêt à redécouvrir avant d’être entièrement détruits par le matérialisme de ceux qui se croient civilisés…