Minima Moralia. Réflexions sur la vie mutilée
de Theodor Wiesengrund Adorno

critiqué par Sahkti, le 7 août 2006
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Désillusion constructive
Réédition dans la Petite Bibliothèque Payot (au prix de 10 euros), avec une belle postface de Miguel Abensour, de ces "Minima Moralia" de Adorno. De courts textes sur la vie et la société moderne, condensé d'un nihilisme contemporain habilement défendu par Adorno qui était le chef de file de l'Ecole de Francfort. Pour lui, l'être humain est opprimé, en tant qu'individu mais également comme mouvement de masse. Il doit s'adapter, se standardiser pour trouver sa place au sein de notre société de production /consommation. L'anticonformisme n'est pas de mise, car il implique une nouvelle tyrannie, celle de la liberté, et la croyance dans le progrès ne peut qu'amener déception et découragement, voire un recul de l'humanité.

Certains qualifient Adorno de triste ou de pessimiste. J'ai envie de dire qu'il est réaliste (surtout en tenant compte du contexte de rédaction de ces textes, entre 1940 et 1947). En admettant que la possession du bonheur est impossible, n'essaie-t-il pas de nous faire avancer sur une autre voie, un chemin qui nous apprendrait à mieux profiter de certains éléments, à moins idéaliser et peut-être donc à moins souffrir?
Les écrits d'Adorno sentent la désillusion, certes, mais ils peuvent être analysés d'un point de vue positif et constructif, car ils mettent en lumière des comportements sur lesquels nous ne baissons meme plus les yeux, tant ils sont devenus habituels. Les redécouvrir, en tirer les leçons, ne peut que nous faire avancer.