Grosse nouvelle ou très court roman, comme on voudra, « La sous-développée » est une suite, ou à peu près, de « Sang bleu », le premier roman de Zoé Valdès. Ce qui passait, chez moi, difficilement au niveau d’un roman, convient mieux au format de la grosse nouvelle. Je veux parler de l’onirisme, des digressions, très latino-américaines, à la Gabriel Garcia Marquez. Il y a bien un personnage – et pas des moindres – complètement foldingue, un Arsène Lupin revisité Vian et Valdès, le baron Mauve qui a tendance à nous éjecter du fil d’une histoire possible, mais bon …
Daniela, jeune femme de vingt-trois ans, qui pourrait être le clône d’Attys (du « Sang bleu »), va quitter son pays, Cuba, ses ami(e)s surtout, ce qui fonde son rapport au réel, pour venir rejoindre père et mère ni plus ni moins qu’ambassadeurs à Paris. Pas Texas ! Paris – France. Dans l’avion qui la « kidnappe » hors de Cuba, elle fait connaissance rocambolesque (feu Arsène Lupin oblige) du baron Mauve. S’ensuivent des passages « space » et quand même un début de vie à Paris, coincée entre la retenue qu’exige la fonction de représentation de fille d’ambassadeur et la nature réelle de Daniela, pas cubaine pour rien. Peu de souci de vraisemblance. On n’est pas dans Vian, ni dans un roman réaliste. Entre les deux en situation passablement inconfortable, le cul entre deux chaises.
On peut aimer, on peut s’y sentir floué. Je tirerais plutôt dans la seconde catégorie.
« Plongé dans l’obscurité, l’avion faisait peur. Elle se demandait si les passagers étaient tous morts, s’ils arriveraient un jour à destination ou s’ils resteraient à jamais comme des points dans l’espace. Un jeune homme distingué sortit des toilettes. Elle sentit qu’il s’arrêtait pour la regarder et qu’il lui souriait à contre-jour. Il s’approcha. Elle devina, dans le noir, une peau pâle et lisse. Elle en eut la confirmation quand il prit sa main entre les siennes et la baisa délicatement d’un souffle. Non, ce n’était pas un diplomate. Elle retenait ses doigts. Et si elle était en train de rêver ? S’il était aussi un de ces fantômes qui raffolent des discours ?
- Je suis un voleur. Enchanté, mademoiselle.
Tistou - - 68 ans - 8 décembre 2009 |