La formule préférée du professeur
de Yôko Ogawa

critiqué par Bernadette COUTURIER, le 20 juillet 2006
( - 72 ans)


La note:  étoiles
Beauté des mathématiques
Un professeur de mathématiques passionné des nombres et de leur beauté apprend leur magie à une aide-ménagère embauchée via une entreprise d'intérim.
Suite à un accident de la circulation, ce vieillard attachant a une autonomie de mémoire de quatre-vingts minutes, mais ce handicap ne l'empêche pas de plancher sur des concours mathématiques et de les gagner.
Comme une meilleure intimité s'installe entre eux, la jeune mère célibataire amène à la demande du professeur son fils qui va être surnommé Root. Une nouvelle étiquette de papier est créée où le fils est représenté par une "racine carrée signe généreux qui accueille tous les nombres sans rechigner" elle est le lien qui rappelle au savant son état et les choses à savoir.
Nous suivons le quotidien des trois personnages jusqu'à considérer l'injustice d'un renvoi.
Heureusement, le malentendu a été dissipé, et nous retrouvons le trio dans sa quête d'un bonheur simple.
Le base-ball incarné par un ancien joueur particulier ajoute un charme conséquent à ce livre où le sport se mêle à la science.
Dix ans plus tard, le lien d'amitié existe toujours entre ces êtres.
Voici un extrait de l'ouvrage particulièrement plaisant :
"Si l’on additionnait 1 à e élevé à la puissance du produit de pi et i, cela faisait 0
J’ai regardé à nouveau la note du professeur. Un nombre qui jusqu’au bout restait périodique et un chiffre vague qui ne montrait jamais sa nature véritable arrivaient à un point après une trajectoire concise. Alors qu’aucun cercle n’apparaissait pi descendait en voltigeant d’un point insoupçonné de l’espace pour rejoindre e et serrer la main du timide i. Ils restaient blottis sagement l’un contre l’autre et il suffisait qu’un être humain ajoute seulement 1 pour que le monde change sans aucun signe avant-coureur. Tout se retrouvait dans le 0.
La formule d’Euler brillait comme une étoile filante dans les ténèbres. C’était une ligne d’un poème gravé à l’intérieur d’une grotte obscure. Frappée par la beauté tout entière contenue là, j’ai rangé le papier dans la pochette de ma carte de transport.
En descendant l’escalier de la bibliothèque je me suis retournée, mais il n’y avait toujours aucun lecteur dans le coin des mathématiques, tout était calme et silencieux, personne ne soupçonnait que des choses aussi belles y étaient dissimulées".
L'auteur dans un touchant tableau d'une frange de la société s'est fait l'apologue de la générosité, de la patience et du plaisir de transmettre le savoir.
Bernadette COUTURIER
la base des maths 8 étoiles

Un roman assez étrange, mettant en scène un professeur universitaire de mathématiques, vieilli et mis à la retraite bien avant l’âge à la suite d’un accident l’ayant rendu partiellement amnésique, sa mémoire proche ne durant qu’une heure et vingt petites minutes. La narratrice, son aide-ménagère, la seule qui supporte allégrement ses petites manies, a un fils de dix ans dont le professeur va vite s’amouracher. Il voit en lui un digne successeur (ce qu’il deviendra en effet), en raison de son intérêt pour les énigmes mathématiques mais aussi une passion commune pour les joueurs de baseball. Cette situation peu commune génère de nombreuses surprises, que l’auteure exploite avec humour pour notre plus grand plaisir. Hélas, si Yôko Ogawa s’est bien documentée sur ce sport très populaire au Japon, sa connaissance des mathématiques laisse à désirer. Plusieurs pages sont consacrées à une démonstration de la formule permettant de calculer facilement la somme des entiers naturels de 1 à n. La formule est juste, fort heureusement, mais la démonstration est fausse ou en tout cas particulièrement scabreuse. Si l’on veut bien passer sur ce manque de vraisemblance, défaut dont l’auteure est malheureusement coutumière, le roman se lit aisément et captive l’attention. On est plongé dans un univers où le bizarre le dispute à la tendresse, avec une poésie admirablement rendue par la traduction.

Jfp - La Selle en Hermoy (Loiret) - 76 ans - 3 décembre 2021


Etrange mélange de mathématiques et de base-ball 7 étoiles

« Nous l’appelions professeur, mon fils et moi. Et le professeur appelait mon fils Root. Parce que le sommet de son crâne était aussi plat que le signe de la racine carrée.
- Ooh, on dirait qu’il y a là-dessous un cœur plein d’astuce, avait dit le professeur en caressant sa tête sans se soucier d’ébouriffer ses cheveux.
Mon fils, qui portait toujours une casquette parce qu’il détestait les moqueries de ses camarades, avait rentré le cou dans les épaules, sur ses gardes.
- En l’utilisant, on peut donner une véritable identité aux chiffres infinis comme à ceux qu’on ne voit pas.
Et il avait tracé le signe du bout de son index sur le coin de son bureau recouvert de poussière : √. »

Il a un problème le génial professeur de mathématiques. Il était effectivement génial, une sommité dans le milieu des mathématiques, et il y eût un accident, un accident bête qui le prive de mémoire. Oh, pas complètement, il lui reste pour 1h30 de mémoire. Au-delà d’une heure et trente, il faut à cette jeune femme qui est engagée pour faire le ménage chez lui, tout recommencer à zéro ; se présenter, expliquer ce qu’elle fait, …
Il a trouvé un système « innovant » pour pallier le problème, il a recouvert de post-it son manteau afin d’essayer de retrouver un fil conducteur ; des pense-bêtes quoi !
Et notre aide-ménagère, qui vit seule, a un fils. Un fils dont il faut bien s’occuper quand il ne va pas à l’école. Qu’à cela ne tienne, elle finira par l’amener chez le professeur à la mémoire défaillante. A la mémoire défaillante mais pas à l’amour des enfants défaillant. Cet enfant va être une bénédiction pour ce professeur, d’autant que cet enfant a une passion : le base-ball, qui constitue par le biais des statistiques de match (un domaine apparemment important pour les amateurs de base-ball) un des dadas du professeur. Mais évidemment, son « compteur mental » étant resté bloqué à l’avant-accident, l’idole du professeur ne joue plus depuis longtemps.
Et Yoko Ogawa va tricoter avec tous ces éléments pour nous confectionner des considérations sur la vieillesse et sa décrépitude, sur ce que l’amour peut réaliser, sur … des petits faits quotidiens, des considérations mathématiques de haute volée et un aperçu du monde du base-ball. Un récit vivant, pas gnangnan.
Original, profond, humain, … Que ne fait-on pas avec les chiffres ?

Tistou - - 68 ans - 22 février 2011


Sympathique 7 étoiles

Joli roman que cette "Formule préférée du Professeur". Une classique histoire d'amitié entre un homme âgé et d'autres personnes plus jeunes à qui il va transmettre sa passion: les nombres.
Touchés par la simplicité du professeur, l'aide ménagère et son fils vont se prendre d'amitié pour lui. L'occasion pour chacun d'apporter à l'autre ce qu'il connaît le mieux: mathématiques et théorie des nombres pour le professeur, plaisirs simples de la vie pour l'aide ménagère, base-ball pour son fils.
Je suis assez d'accord avec d'autres critiques concernant les descriptions un peu longues sur le base-ball japonais, mais ça n'alourdit pas tellement l'histoire, qui reste agréable à lire.

Nb - Avion - 40 ans - 2 novembre 2010


714=2x3x7x17 7 étoiles

Voici le troisième livre de Yoko Ogawa que je lis. Le thème, le récit de ces vies sont très agréable à découvrir, une fois de plus. Mais comme ni les maths, ni le base ball ne me passionnent vraiment, je reste un peu sur ma faim pour cet auteur que je désire mieux connaître. A suivre donc.

Catinus - Liège - 73 ans - 8 janvier 2010


Attendrissant 6 étoiles

Une histoire assez touchante au cours de laquelle s'entremêlent avec subtilité et pudeur les vies d'un professeur de mathématiques amnésique, d'une aide-ménagère et de son fils.
Les développements "pédagogiques" du professeur sont très enthousiasmants (si seulement les professeurs de mathématiques pouvaient parler en ces termes de la beauté symbolique d'une formule, de la recherche de la vérité, de la joie éprouvée par la découverte d'une solution etc... !).
Par contre, un petit bémol : les nombreuses descriptions des principes du base-ball japonais et de ses stratégies m'ont vraiment ennuyée, mais elles participent en même temps à l'ambiance du roman, donc je les ai tolérées !...

Théus - - 36 ans - 26 juillet 2009