je suis là pour la nuit
de Étienne Delmas

critiqué par Eva3, le 18 juillet 2006
( - 42 ans)


La note:  étoiles
Le corps vocal est un corps écrivant
Un homme arrive en chambre stérile. On ne sait rien de lui ; sauf qu'il est là, de chair et d'esprit, en face de sa maladie, à discourir au micro d'un enregistreur : parler pour remplir l'espace-temps dissolu par l'isolement, par l'absence et par le rien.

Au début, la conscience fuse, se débat, s'agrippe aux regards des infirmières pour sentir l'autre et son humanité ; résister aux maux du corps, s'accrocher au réel, contrer la mort, même toute proche...

Puis, l'homme succombe à la passivité, dérive par quelques déambulations chimériques, s'échappe dans le souvenir. Il se résigne enfin ; l'homme capitule devant la maladie quand il n'arrive plus à se reconnaître lui-même. Etranger, en somme, à son propre corps.

Ce monologue d'Etienne Delmas est le combat d'un homme, de la conscience face au corps, de la sensation du réel face au vide ; le récit des tumultes de l'aphasie et de la langueur ; le récit d'un homme démuni qui sombre dans le rien pour renaître enfin, âme et corps réunis.

Fabuleux !