La sociologie de l'art
de Nathalie Heinich

critiqué par Veneziano, le 27 juin 2006
(Paris - 46 ans)


La note:  étoiles
Pédagogique mais dense, donc assez hardu
L'auteur expose ce qu'est la discipline, au carrefour de plusieurs autres, ce qui n'est pas très original pour la genèse d'une science sociale, la sociologie en général, et, fatalement, pour l'une de ses branches, la sociologie de l'art en particulier. C'est l'objet de la première partie. Dans la seconde, est exposé ce qui est peut-être davantage attendu, à savoir une analyse des pratiques et des acteurs.

Si le mot n'est pas employé, l'art est pris comme un système, la seconde partie de l'ouvrage consistant en une analyse systémique succinte, bien qu'assez dense et peu aisée à la première lecture.
La première distingue cette sociologie de l'art de l'histoire de l'art, de la philosophie et de la sociologie générale, auxquelles, il faut bien l'avouer, elle emprunte un peu, les historiens d'art ayant créé la "préhistoire" (sic) de la discipline. Si elle ne parle donc pas de système, l'auteur explique que l'art est étudiée comme UNE société, et non - et plutôt pas seulement si j'ai bien compris - comme l'art dans la société, car, à la lecture de la seconde partie, on perçoît bien que cet aspect n'est pas totalement absent.

C'est pourquoi l'idée de système me paraît opportune. On trouve Bourdieu et Passeron, notamment, qui ont introduit la statistique dans l'étude sociologique de l'art, notamment dans la pratique. Se crée un goût - et donc un art - général, qu'une société est tentée de privilégier à un moment donné.
Est soulignée la place instable des institutions dans leur rôle face à l'art, dans l'influence qu'elle peuvent avoir et la légitimité plus ou moins grande qui en découle.
Il est également noté l'apparition de la dimension économique de la sociologie de l'art, par l'intrusion d'intermédiaires entre créateurs et public, comme les galeries, les mécènes et les commissaires-priseurs. Le mécénat a ainsi constitué le premier phénomène sociologique de taille antérieur au XIXème siècle, les commandes publiques contemporaines n'en étant finalement qu'une forme (là c'est votre serviteur qui ajoute) : normal, vu que dans les siècles en question, il n'y avait pas de domanialité publique et donc de distinction entre biens de la Couronne et de l'Etat.
Enfin, est étudié le statut de l'oeuvre, en tant que bien à part, et la pluralité qu'elle peut avoir, du fait de la duplicité que permet ou non le médium dont elle est issu, ainsi, évidemment que la perception de l'oeuvre par le pblic et son évolution.

C'est la deuxième fois, je l'avoue, que je lis cet ouvrage : j'aurais été incapable de le présenter la première fois, mais je dois préciser que j'ai manqué de patience la dernière fois.
C'est un petit livre touffu qui demande d'être maturé. S'il fait une centaine de pages, il me paraît fort complet - aussi ne suis-je pas spécialiste - et aborde en tout cas beaucoup de facettes d'un sujet multiforme, que je ne connaissais pas sous l'angle de la théorie sociologique pure.