Toi, Cécile Kovalsky
de Marianne Sluszny

critiqué par Sahkti, le 27 avril 2006
(Genève - 50 ans)


La note: étoiles
Le poids du passé
Myriam Feldman décède un soir d'hiver à Bruxelles, dans une maison de repos. Un décès qui plonge sa fille Cécile Kovalsky dans les souvenirs. Elle tente de réfléchir sur la relation étrange qu'elle entretenait avec sa mère. Un travail de deuil douloureux, qui se partage entre tendresse et culpabilité. Au-delà de ce voyage dans le passé, c'est aussi l'occasion de se pencher sur toute uen époque, celle de ces vagues d'exil pour de nombreux juifs européens, dont les familles Feldman et Kovalsky, la souffrance du déracinement, des remarques antisémites, l'impression de n'être jamais nulle part chez soi. Toutes ces douleurs, Cécile les sent ancrées au plus profond d'elle-même. Est-ce le poids de ce passé familial qui expliquerait pourquoi sa vie ressemble à un échec permanent? Cécile s'interroge, tente de trouver des réponses à ses questions et cela passe obligatoirement par une exploration du passé familial. Peu à peu, Cécile réalise que les siens, soi-disant bien intégrés à Bruxelles, ne l'étaient en fait pas tant que cela, mais il fallait faire semblant. Encore et toujours. La vérité en tant que réalité en prend un coup, d'autant plus dur que Cécile travaille pour la télévision d'Etat en qualité de chercheuse culturelle et qu'elle sait à quel point on peut travestir les éléments.

Le roman de Marianne Sluszny ressemble à un voyage. La structure du récit aide à penser cela, notamment à cause du découpage des chapitres, des digressions, des extraits de correspondance et de journaux, des narrations extérieures... Même la Mort apporte sa pierre à l'édifice. Cette multitude de visions apporte un recul bienvenu à l'ensemble, le lecteur peut se situer où il veut, se glisser dans la peau d'un des personnages ou au contraire observer le tout sans y toucher.
J'ai aimé cette promenade à travers les âmes des uns et des autres, ce retour dans le passé qui ne se fait sans mal. Je reprocherais peut-être, un tout petit peu, à l'auteur de vouloir par moments en faire trop en expliquant trop les choses, j'aurais préféré davantage de mystère, mais cela ne gâche en rien mon plaisir d'avoir découvert cet auteur et son roman.