Noir austral
de Christine Adamo

critiqué par Bertille, le 15 avril 2006
( - 40 ans)


La note:  étoiles
un polar qui trouve ses racines dans la préhistoire de l'australie... passionnant
70 000 ans avant J.-C. La terre australe est investie par les Aborigènes, qui traversent le détroit de Sunda. Ils vont établir, avec les esprits autant qu'avec les éléments et les extraordinaires animaux de la mégafaune, des relations respectueuses. Jusqu'à l'arrivée des Ventres-de-poisson, les Blancs, au XVIIIe siècle. Parmi eux, un certain Philippe d'Auberac, naturaliste de La Pérouse, mandé par le roi de France. La rencontre des deux peuples sera violente, sanglante. Un cocktail explosif que les uns et les autres recevront en héritage, parfois sans le savoir. C'est le cas de Liz, d'ascendance française. Quand elle décide de partir en Provence, en l'an 2004 de notre ère, elle est loin de se douter que, depuis Sydney, le passé austral la suit.

C'est haletant, fluide, original... instructif et remarquablement construit. Et on se fait avoir jusqu'au bout !

extrait:
"Ils l’avaient acculée. Ils étaient déchaînés. Tjunkiya fermait les yeux, poings et visage fièrement levés vers le ciel, corps droit, jambes légèrement écartées, bien plantées sur le sol. Elle vidait son esprit des aboiements furieux qui la cernaient. Elle vidait son esprit des ricanements des deux hommes qui s’approchaient, derrière leurs molosses, crachant régulièrement leur salive immonde. Elle vidait son esprit des hurlements des moteurs, des crissements des pneus des jeeps qui tournaient autour de l’aplomb rocheux. Elle vidait son esprit de la présence de la foreuse, qui allait traverser les routes des ancêtres pour l’uranium ou le plomb.
Alors, elle le vit, l’entendit : le Ya-kurr, le lion marsupial que les esprits des ancêtres avaient ramené pour elle, afin qu’elle trouve son chemin jusqu’à eux. Loin de ce monde qui n’était plus le sien, dont elle ne voulait plus. Qu’étaient des dents en comparaison de ses canines aussi longues que des lames de machette ? Qu’étaient des griffes au regard de celles qui incurvaient l’extrémité de ses pattes ? Le cri qu’elle poussa résonna dans toute la vallée, dominant les rugissements du torrent, interrompant les hurlements des chiens. Ils reculèrent un instant, avant de comprendre qu’ils ne risquaient rien.
Puis, un ordre bref les encouragea. Ils se jetèrent sur elle. Elle ne cria pas. Ni quand le premier chien lui arracha un morceau du maigre biceps qu’elle avait instinctivement mis devant sa figure, ni quand le second..."
polar généalogique 10 étoiles

Deux histoires pour le prix d’une, quelle aubaine ! Christine Adamo a mis à profit ses connaissances, historiques et scientifiques, pour concocter ce polar original qui nous emmène d’Australie en Provence à la poursuite du passé, celui du peuplement originel de l’Australie et celui, plus proche, de Liz, jeune australienne en quête de mystérieuses origines françaises. On se passionne très vite pour le destin des nombreux personnages, passés dans le domaine de la mythologie, qui peuplent l’imaginaire et les rêves des peuples aborigènes. On se passionne tout autant pour la quête que va mener Liz, aidée par quelques autochtones de la Drôme provençale. Mais, rassurez-vous, on est bien loin du pensum scientifique ou philosophique que font craindre ces quelques mots d’introduction, car on trouve dans "Noir austral" des cadavres, du mystère, et un sympathique futur commissaire, tout frais émoulu de son école de police et déjà fin limier…

Jfp - La Selle en Hermoy (Loiret) - 76 ans - 21 novembre 2020


Evolution aborigène 7 étoiles

Je voudrais signaler l'édition au format poche, en ce mois de mai, avec une belle couverture, de "Noir austral" chez Gallimard/Folio Policier (ISBN 2070341577).

La structure du récit est intéressante, chronologiquement évolutive tout en mêlant allers-retours entre passé et présent. Nous suivons la trace d'une tribu aborigène de -70.000 à nos jours, des premières traques et épreuves de survie à ces enfants déracinés et emmenés de force dans des centres de rééduction, en passant par la colonisation et l'esclavage.
Une période tourmentée de l'histoire australienne, pas encore abordée de manière complète et objective dans les manuels, mais ça commence, lentement...
Parallèlement à ce récit se tisse le destin de Liz, une Australienne en quête d'identité maternelle, qui achète une ferme dans le sud de la France et se retrouve rapidement impliquée dans des morts étranges qui finissent par l'effrayer.
J'ai aimé ces voyages incessants créant des parallèles étonnants entre les histoires, tout en produisant, il faut le reconnaître, de temps en temps un brin de confusion et quelques longueurs.
L'histoire d'une partie de l'Humanité ainsi revisitée, via le polar historico-documentaire, je suis preneuse, surtout lorsqu'il est bien argumenté et repose sur des sources solides.
Un petit bémol pour le dénouement de l'histoire, que je trouve plausible, oui, mais tout de même un peu tiré par les cheveux. Ceci dit, à mes yeux, la qualité essentielle de ce roman repose davantage dans son atmosphère, dans le contexte qu'il dépeint plutôt que dans l'intrigue elle-même.
A lire assurément pour tout ce qu'on apprend sur la culture aborigène, c'est un point de départ vers d'autres ouvrages plus pointus.

Sahkti - Genève - 50 ans - 5 mai 2008


Noir austral: super! 10 étoiles

Pour une fois, je suis d'accord (entièrement) avec une critique de livre. Moi aussi, j'ai été emballé par "noir austral". Et j'en redemande!

Miquail - - 55 ans - 19 avril 2006