Le secret de l'orfèvre
de Elia Barceló

critiqué par Sahkti, le 13 mars 2006
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Petit plaisir
C'est le récit d'un orfèvre espagnol devenu newyorkais qui nous raconte son étrange histoire. Désireux de revenir passer quelques jours en Espagne, sur les traces de son passé, il se fait conduire dans le petit village où son oncle lui a tout appris du métier. Il prend une chambre d'hôtel et s'endort en réfléchissant à tous les changements que le village a pu connaître depuis autant d'années. Il s'inquiète aussi beaucoup à l'idée de revoir son ancienne maîtresse. A son réveil, il constate qu'il a fait un bond en arrière de 45 ans! Le temps s'est arrêté en septembre 1952. L'orfèvre part à la découverte du village tel qu'il était alors, on lui demande ses papiers lorsqu'il veut changer des dollars, il se rend compte du décalage temporel, entre dans la maison qui était celle de sa grand-mère et croise une jeune femme, la vingtaine... sa future mère! Ce retour en arrière, c'est l'occasion de regagner le coeur de Célia, la fiancée, de ne plus commettre les mêmes erreurs. Mais le temps repart très vite en 1999. Que faire?

Je ne vous raconte évidemment pas la suite, je vous en ai déjà beaucoup dit.
Voici un petit roman, mélange de conte et de fable, absolument merveilleux, empreint de douceur et de tendresse, avec un côté fantastique qui lui apporte une dimension supplémentaire, celle où tous les rêves sont permis. C'est court, c'est dense, de très bonne qualité. Une belle initiation au plaisir et à l'attente, un texte fort sur l'amour éternel et la force des souvenirs. Merci Madame Barcelo!
Troublante et émouvante histoire. 7 étoiles

Court roman qui dénote d’une belle inspiration. La mise en œuvre, l’écriture, est peut-être moins réussie. Alors la traduction … Peut-être ? Mais quand même, les longues phrases, un peu compliquées … ça doit être d’origine !
Télescopage temporel spectaculaire qui perd le lecteur, notre orfèvre aussi d’ailleurs. On est limite science-fiction, fantastique, avec des inversions de temps concernant Celia et notre orfèvre. L’une initiant l’autre à l’amour … et l’autre, de même … Très original de conception.
Souvenirs d’adolescence qui remontent à la surface à l’occasion d’un retour au village natal, quitté de manière brutale des années auparavant. Bouffées de nostalgie, comme on en connait tous dans ce genre d’occasion, mais là, ce que connait l’orfèvre, c’est clair, le lecteur lambda, vous et moi, on n’y a jamais été confronté ! On est plutôt dans un trip genre « Les autres », le film, vous connaissez ? Fantastique donc, hors réalité, que Elia Barcelo traite néanmoins sur le ton, la manière de la réalité.

« Je me heurtai à une jeune fille qui entrait à ce moment même et dont les traits me parurent familiers.
- Vous cherchez quelqu’un ? me demanda-t-elle avec une légère intonation craintive, tout en regardant par-dessus son épaule comme pour trouver une protection.
- Don Javier Orellana, balbutiai-je.
- Ah ! Oui ! Je comprends que vous vous soyez trompé. C’est la porte à côté.
- Je vous prie de m’excuser, mademoiselle, dis-je en portant la main à mon chapeau ainsi que je l’avais vu faire.
Ma mère disparut dans la maison et je dus m’appuyer contre le mur pendant quelques instants, tandis que les larmes me venaient aux yeux et que ma poitrine se serrait, me coupant le souffle. Si c’était un rêve, il était d’une précision éprouvante. Cette jeune fille était ma mère, il y avait quarante-sept ans. »

Tistou - - 68 ans - 12 octobre 2009


Le temps est cruel 10 étoiles

J’ai été séduit par ce petit roman. Le style est dépouillé, certes, mais quelle belle idée de placer ce personnage d’amoureux toujours en décalage par rapport à sa dulcinée - trop jeune ou trop vieux. Pauvre orfèvre malmené par le temps. Pauvre Célia terrassée par la disparition subite et involontaire de son fiancé.

Bien que finalement cette histoire déchirante soit triste à pleurer, elle a la beauté des contes. L’attrait de la magie et comme consolation quelques moments où nos amoureux ont connu le bonheur.

Le seul bémol : j’aurais aimé que l’auteur intègre la joaillerie dans le noyau de son intrigue. Elle a choisi un orfèvre, aussi bien l’exploiter.

Aaro-Benjamin G. - Montréal - 55 ans - 16 septembre 2009


Rendez-vous manqué 6 étoiles

La littérature a parfois un côté manichéen : on marche ou ne marche pas. Eh bien je n’ai pas marché au secret de cet orfèvre et j'ai manqué ce rendez-vous.

L’idée de départ est certes intéressante mais ce qu’en fait Elia Barcelo est assez banal et manque de ce grain de folie qui aurait pu faire « décoller » l’histoire vers des horizons autrement plus fantastiques. Il aurait fallu plus de mystère, moins de prosaïsme dans l’étrangeté. Tout ceci est trop calme, écrit dans un style sans relief dont je n’ai pas perçu la poésie. Or c’est une alchimie poétique qui aurait pu sublimer ce récit et faire du secret de cet orfèvre un bijou.

Mais bien évidemment, ce n’est que mon avis.

Jlc - - 81 ans - 14 mars 2009


Et, je t'aimerai hier plus que demain 8 étoiles

Voilà encore une belle démonstration qui prouve avec talent que la quantité n’est pas forcément nécessaire à la qualité. En effet, ce petit livre, tout petit même, nous entraîne dans un voyage sur les pas d’un jeune ibérique devenu orfèvre de renom à New York qui, passant par son village natal, entreprend sans le savoir, a priori, un voyage dans le temps plein de surprises et de révélations. En prenant le train pour rejoindre l’avion qui le conduira en Amérique, il ne peut résister à l’envie de redécouvrir le village qui l’a vu naître, il y a bien longtemps déjà. Mais, à son réveil, il découvre avec surprise qu’il est maintenant en 1952 et qu’il vit dans son village natal comme il était à cette époque là alors que lui est désormais en 1999. Alors, Elia nous entraîne avec habilité, finesse et malice dans un jeu de piste où l’un va essayer de conjuguer l’avenir de l’autre avec son passé et en reconquérant la femme qui l’a initié aux plaisirs de l’amour quand il était un jeune homme encore naïf. Mais l’histoire, même quand on mélange les temps avec la plus grande adresse, est bien difficile à réinterpréter et réserve parfois bien des surprises.

Un bouquet de fraîcheur, un petit bonheur de lecture et un grand livre, même s’il est tout petit, car non seulement le sujet est original et bien interprété mais le livre est aussi écrit avec talent et justesse, sur le bon tempo. Et, Elia se glisse avec aisance dans la peau d’un homme pour apporter sensibilité et sensualité à ce récit intemporel car l’amour peut résister à l’emprise de l’âge et toujours briser les cœurs.

Débézed - Besançon - 77 ans - 6 février 2009