Lettre de Tchétchénie
de Philippe Bohelay, Olivier Daubard (Photographies)

critiqué par Nomade, le 6 mars 2006
( - 12 ans)


La note:  étoiles
Pour ne pas oublier
Moscou. Philippe Bohelay et Olivier Daubard décident d’embarquer à bord du train pour les camps de réfugiés tchétchènes en Ingouchie. Nous sommes à la fin de l’année 2002. A leur arrivée, un terrible attentat a eu lieu la veille à Grozny. Un camion-suicide a réduit en cendres un bâtiment pro-russe. Comme l’affirment les auteurs, « A nouveau des Tchétchènes venaient d’assassiner d’autres Tchétchènes et cela ne suscitait qu’une sourde incompréhension auprès des réfugiés que nous avons rencontrés (…) et que l’on venait de sombrer un peu plus dans l’absurde ».
De leur séjour, Philippe Bohelay et Olivier Daubard souhaitent s’intéresser de plus près à des jeunes gens, futurs terroristes, mais ne désirent pas les photographier afin de ne prendre aucun parti et de ne pas juger. Les seuls clichés en noir et blanc qu’ils rapportent dans leurs bagages ne sont que des portraits d’anonymes qui se sont réfugiés dans les camps , des scènes de la vie quotidienne, des instantanés. Sans oublier une lettre, celle de Ramzan, un kamikaze en puissance, un passeur de mémoire, un protagoniste inventé mais dont les dires relèvent de la pure réalité : « Les événements qu’il raconte se sont réellement produits ».
Mais qu’est-ce qui pousse des jeunes à devenir des kamikazes, des assassins (Comment ne pas oublier ces femmes tchétchènes ceinturées d’explosifs, armes à la main, lors de la prise d’otages dans un théâtre à Moscou quelques semaines auparavant) ? Est-ce la haine, la vengeance, l’honneur, le patriotisme… ? Ou ne serait-ce pas tout simplement la destinée de ces êtres ?
Dans leur ouvrage, Philippe Bohelay et Olivier Daubard tentent d’y répondre à travers la lettre de Ramzan. Une lettre, plus ou moins, touchante. On éprouve par moments quelques difficultés à croire en son histoire tant les mots utilisés sont d’une simple banalité, tant la guerre est ancrée dans son esprit. Seule, la présence des photographies permet de mettre des visages sur des réfugiés. Toutefois, nous ne connaissons pas l’identité de ces personnes. Aucune information ne s’en dégage. C’est bien dommage car la démarche des deux auteurs est tout à fait honorable et admirable.