Le Roman d'un spahi
de Pierre Loti

critiqué par Tistou, le 2 mars 2006
( - 68 ans)


La note:  étoiles
Aux confins du Sahel et du Sahara.
A l’instar de Nicolas Bouvier, Pierre Loti était un écrivain voyageur. Un grand voyageur, officier de marine. Au contraire de Nicolas Bouvier, Pierre Loti a romancé ses impressions et souvenirs de voyage. C’est le cas pour Roman d’un Spahi. Mais le roman ne prend pas le pas sur la matière du voyage elle même : Saint Louis du Sénégal et ses abords. Que sans aucun doute Pierre Loti a connu et où, probablement, il a résidé. C’est dans cette région, au sens large, aux confins du Sahel et du Sahara, que Jean Peyral, Cévenol fils unique, est envoyé en garnison en tant que Spahi. Nous sommes dans la fin du 19ème siècle, les colonies sont bien portées, et certains propos, certains qualificatifs choquent, heurtent nos oreilles du 21ème siècle. On pourrait dire que le « politiquement correct » du 19ème a évolué ! Le qualificatif de « nègre » et les commentaires qui y sont associés résonnent curieusement par exemple.
Donc Jean Peyral est en garnison dans un bled de la région de Saint Louis et il va connaître l’ennui, les affres de la séparation d’avec son pays, sa famille, la jeune femme avec qui il était fiancé. Pierre Loti nous raconte son évolution, sa déchéance sur un certain plan jusqu’au drame. Inévitable le drame, c’est Pierre Loti, n’oublions pas ! Mélancolie, solitude, mal du pays, sont des composants réguliers de ses oeuvres.
Mais Loti est aussi un excellent « récepteur » des ondes émises par les différents pays qu’il fréquente et sa connaissance du bled sahélien est parfaitement retranscrite. L’étude psychologique de la dérive de Jean Peyral aussi.
Une excellente étude de moeurs sur notre vision des colonies fin du 19ème, et du monde sahélien de cette époque. Et l’écriture de Pierre Loti s’adapte bien à ce romantisme noir qui le caractérise.
Du sable et de l'ennui 5 étoiles

A l'instar d'Aziyadé et du Mariage de Loti, l'auteur nous livre encore une fois un roman sur un européen se retrouvant dans un endroit éloigné de sa patrie et qui va avoir une relation avec une jeune fille des environs, en un peu plus sombre toutefois car le sort ne va pas épargner le pauvre Jean. Moins enchanteur et avec un ton plus désabusé que les deux œuvres citées plus haut il faut bien reconnaître que j'ai été beaucoup moins conquis par cette histoire. J'ai en effet éprouvé assez peu d'empathie envers le personnage principal ainsi qu'avec celui de son amante, Fatou-gaye et j'ai trouvé le récit prévisible et tirant un peu trop sur le pathos.

Il a toutefois le mérite de mettre un peu en lumière la situation et les conditions de vie des soldats envoyés dans les colonies africaines, même si certains termes ou remarques utilisées envers les noirs fleurent bon la pensée raciste de l'époque. Le rythme est relativement lent mais, pour le coup, cela colle très bien à l'ambiance générale, l'écriture reste assez immersive et la thématique n'est pas dénuée d'intérêt mais tout cela ne m'a pas empêché de ressentir assez peu d'émotions durant la lecture.

Une œuvre qui, je pense, ne me laissera probablement pas un souvenir tenace et qui est loin d'être la meilleure de l'auteur.

Koolasuchus - Laon - 35 ans - 30 avril 2021