Pitié pour le mal
de Bernard Tirtiaux

critiqué par Jean dc, le 14 février 2006
(Honnelles - 73 ans)


La note:  étoiles
rendez-vous manqués avec la vie ?
Difficile de sortir tout à fait indemne
Des romans de Maître Tirtiaux !
Si l’âme n’en est égratignée,
C’est qu’elle ne doit exister.



Aux travers des blessures de ses héros
Ce sont les nôtres qu’il met à jour
Non pour en tirer gloire ou vantardise
Ni pour attirer sympathie ou voyeurisme.



Avec lui nous approchons l’obscure rédemption
Qu’en soi chacun peut trouver,

Et découvrir en trésor
Les ressources qui peuvent nous relever.



On ne sort pas indemne
On sort l’âme égratignée
Mais tellement plus vivant !



Au travers des rendez-vous manqués de la vie
Naît alors la lumière du ciel
Tombée dans la boue de nos jours
Pour de son arc en ciel éveiller l’espérance du meilleur.
Une belle histoire bien racontée. 9 étoiles

Le résumé du livre a déjà été fait dans les critiques précédentes. Disons seulement qu’à la fin de la seconde guerre mondiale, des soldats allemands ont volé le cheval d’une ferme brabançonne et les deux jeunes fils de la ferme se font un devoir de le récupérer.
L’histoire est racontée par le jeune frère quand il est devenu adulte et que son frère aîné a disparu. Le jeune frère retrouve alors une correspondance de son aîné et le récit alterne les événements du passé et les éléments de cette correspondance. C’est très bien construit et c’est très amusant à lire.

J’ai vraiment aimé ce livre. J’y ai retrouvé l’ambiance de cette époque où la haine des « sales boches » tenait lieu de patriotisme, surtout chez les jeunes comme ceux du livre. Ils étaient élevés dans cette haine sans nuance et sans concession. Comment auraient-ils pu imaginer que ces « sales boches » étaient des hommes et, peut-être même, des braves types ?

J’ai aimé la description de ces soldats allemands vaincus, certains mortifiés, d’autres devenus féroces et d’autres encore devenus amers jusqu’à la folie. J’ai aussi apprécié l’expression de l’amour fraternel entre les deux gamins, un amour qui ne s’avoue jamais, qui est fait de rudesse, de rivalités, de disputes mais qui est le plus fort et le plus vrai des amours.
Mine de rien, ce court roman nous suggère bien des choses et, au passage, il aborde d’une manière toute simple, le thème du pardon, de la réparation et de la réconciliation.

Ce livre évite tous les poncifs du livre écrit à la première personne. Il est écrit tout simplement – ce qui est souvent très difficile – et il raconte une belle histoire, tellement belle qu’on voudrait qu’elle soit vraie. Que demander de plus au plaisir de la lecture !

Saint Jean-Baptiste - Ottignies - 88 ans - 22 janvier 2019


Ah ce titre ! 9 étoiles

Rarement le titre d'une oeuvre aura aussi bien collé au sujet traité !

Le personnage de Gunther m'a particulièrement bouleversé, lui qui s'en veut férocement de s'être laissé embarquer dans une guerre dont il s'est vite rendu compte qu'elle était absurde et injuste; lui qui donnerait son âme pour que le camp d'en face - que, définitivement, il ne considère plus comme l'ennemi - comprenne un petit peu sa détresse morale de s' être trouvé aux côtés de sauvages guidés par la haine; lui qui, à court d'argument devant un enfant qui lui reproche le mal infligé par ses compatriotes, ne parvient plus qu'à prononcer "Pitié pour le mal".

Un livre qui bouscule, qui traite d'une notion difficile à concevoir dans le camp de ceux qui ont été attaqués : le sentiment de culpabilité chez l'ennemi, qui attend qu'un pas soit fait par les vainqueurs pour entamer un processus de pardon.

Avec en filigrane, une belle histoire d'amour fraternel, et les façons presque opposées dont deux êtres pourtant très proches ont tenté de digérer leur traumatisme.

Millepages - Bruxelles - 65 ans - 17 novembre 2010


Lire est un plaisir 4 étoiles

Ce roman est très surprenant car il s'agit de l'histoire de deux jeunes enfants se lançant à la poursuite de voleurs. Il est intéressant pour le lecteur de pouvoir s'imaginer cette dangereuse situation qu'ils vont affronter. De plus, nous nous retrouvons dans une époque de guerre qui a marqué les générations.

Le lecteur peut se rendre compte à quel point il est possible de pouvoir tisser insidieusement des liens d'amitié entre ennemis.
On peut ainsi se poser certaines questions fondamentales à propos de la faute et du pardon car "Pitié pour le mal" est pour ainsi dire plein d'humanité.

Ce roman fait ressentir beaucoup d'émotions fortes ainsi que de la rage au coeur car les deux frères ont le désir de se venger. Grâce à la tendresse et aux sentiments qu'éprouvent les personnages principaux , certaines valeurs morales apparaissent car ils ont conscience de leurs actes.

Fullecteur - - 33 ans - 13 novembre 2009


l'hommage en mémoire romancée 9 étoiles

En cette période, les livres d'Histoire ont leur bonne place dans les librairies.
Ce livre est effectivement très émouvant, le récit romancé colle à l'Histoire comme un fait d'actualité.
Pour qui veut comprendre, ... c'est un livre bien senti et pimenté comme la harissa, un récit foisonnant de vérités cinglantes contre les cinglés de tous poils de la vraie Histoire.
Ce roman de qualité d'écriture soignée, est fait pour des lecteurs à la moralité saine et équilibrée! âmes sensibles s'abstenir !
"Pitié pour le mal" est un très bon livre.

Béa44 - Nantes - 59 ans - 18 novembre 2008


attachant 8 étoiles

J'aime de temps en temps me plonger dans un livre ayant pour toile de fond la seconde guerre mondiale. Je retiendrai sans aucun doute celui-là comme l'un de mes préférés (aux côtés d' "un secret" de Grimbert). Le récit est tellement bien écrit que l'on peine à croire qu'il s'agit là d'une fiction. Les sujets de l'amitié fraternelle et de l'amitié avec l'ennemi sont exploités adroitement et à fond. C'est pour ce genre de bouquin que j'aime lire...

AntoineBXL - Bruxelles - 45 ans - 14 novembre 2008


Comprendre par l'écriture 8 étoiles

Contrairement à ce que l'on pourrait penser, le dernier roman de Tirtiaux n'est pas si différent des précédents... comme de coutume, l'auteur tente d'accéder à la vérité mais il agit de manière plus complexe parce qu'il utilise, pour y parvenir, un art qui nous est bien plus familier: celui du verbe. En effet, en plaçant son roman au XXème siècle, Bernard Tirtiaux se devait de moderniser également ses armes: laissant le burin de côté, c'est par le biais de la correspondance posthume de Gunther qu'il se propose d'offrir une autre lecture de l'histoire, avec un grand "h" permettant ainsi au jeune narrateur devenu adulte, ainsi qu'au lecteur de mieux appréhender le comportement de ces hommes, de tous les hommes, indépendamment de tous les préjugés que nous nourrissons habituellement sur cette sombre période. Ainsi, le narrateur fera son éducation par rétroaction, jusqu'à, peut-être, accorder la pitié, et non le simple pardon, à l'humanité entière, pour le mal qu'elle a fait et continuera à faire. A lire absolument.

Emi - - 44 ans - 17 juin 2007


Repentance 9 étoiles

Le narrateur, Abel, appartient à une famille de neuf enfants. Des liens très forts l’unissent à son frère aîné Mutien. La vie de celui-ci a évolué aux antipodes de la sienne. Elle s’est placée sous le signe de l’excès. Instable, généreux, libertaire, son frère a été de tous les combats… qu’ils fussent sportifs, scientifiques ou humanitaires. En perpétuelle mouvance, cet aventurier dans l’âme a chassé le kangourou en Australie, s’est porté volontaire en Algérie lors du séisme de 1954… Abel vient de quitter l’état monastique et, alors que ses frères et sœurs décident de se séparer des biens de Mutien, il récupère l’héritage sentimental du frère, à savoir ses lettres et autres documents intimes. Ceux-ci le replongent dans l’épisode de son enfance qui a contribué à nouer des liens très forts entre les deux jeunes garçons. Abel Fauconnet, dit Belo, a 8 ans en 1944. Mutien, le frère inséparable, rebelle, chef de bande et conquérant, en a 13 à la même époque. Ce dernier décide à l’insu de leur mère de partir en septembre 44 sur les traces de Gaillard de Graux, un superbe Alezan doré, fleuron de la ferme, qui était la fierté de ce père tué par les soldats allemands en répression à des violences perpétrées par des anonymes contre l’armée d’occupation. Le fier brabançon est réquisitionné par des soldats qui retournent en 1944 en détachement disparate dans leurs foyers. Toucher à leur cheval, c’est toucher à l’honneur de la famille et les deux gamins ne peuvent rester sans réaction face à ce vol !
Leur escapade prend, cependant, un tour tout à fait inattendu car ils sont amenés à côtoyer plus qu’ils ne l’imaginaient ces Allemands en fuite. Ils font ainsi la connaissance de Gunther Sütterlin, un militaire plus âgé que les autres, sculpteur de figurines, qui a décidé de les soutenir dans leur croisade enfantine. Mais alors qu’Abel accepte la main qui lui est tendue, Mutien reste rétif à toute compromission avec ce qui reste à ses yeux un ennemi. Peu à peu, ses dernières résistances tombent et les deux enfants se rapprochent du groupe de soldats avec lesquels ils vont frayer de plus en plus. Se pose alors la question du pardon ou, aux yeux de l’Allemand, celle de la pitié.
Passer d’un univers à un autre représente un beau défi pour un écrivain. Bernard Tirtiaux a pris ce risque et réussit la mutation. C’est déjà une bonne raison pour lire ce livre. En un prologue, un épilogue et trente-six chapitres assez courts, il narre une randonnée d’un genre un peu particulier, qui nous entraîne du Brabant wallon à Heidelberg, en passant par les Ardennes, le Luxembourg, Koblenz, Frankfurt, Darmstadt, Kaiserslautern, Mayence, Mannheim... Un itinéraire qui est aussi celui de la déroute allemande.
Le lecteur découvre ainsi des hommes confrontés à la défaite, ravagés physiquement ou moralement par ce qu’ils ont vécu, inquiets de retrouver les leurs. Ils montrent plus leur visage d’homme que leur cuirasse de soldat. De sorte qu’entre les deux enfants et ces hommes revenus de tout, les animosités guerrières cèdent la place à un début de complicité qui va aller croissant. Bernard Tirtiaux isole dans la conflagration de 1940-1945 une histoire inattendue qui a permis aux protagonistes de substituer la vigilance à la haine.

Bachy - - 61 ans - 17 février 2007


Regard humain sur la fin de guerre 9 étoiles

Abel Fauconnet a 8 ans en 1944. Mutien, le frère inséparable, rebelle, chef de bande et conquérant, en a 13 à la même époque. Ce dernier décide à l'insu de leur mère de partir en septembre 44 sur les traces de Gaillard, un superbe Alezan doré, fleuron de la ferme, couvert de médailles et qui était la fierté de ce père tué par les soldats allemands en répression à 'des violences perpétrées par des anonymes contre l'armée d'occupation'.
Le fier brabançon est réquisitionné par des soldats qui retournent en 1944 en 'détachement composite' dans leurs foyers.
Abel, surnommé Belo, obsédé par l'absence inexpliquée de Mutien, son grand frère adoré, qui a peut-être disparu en mer des années après la guerre, raconte quelques années plus tard, le voyage initiatique qu'ils entreprennent pour récupérer le cheval. Au fil de l'histoire, il va découvrir un autre grand frère, d'une part à la lecture des lettres de Gunther Sütterlin, un soldat allemand avec qui Belo s'est lié d'amitié pendant le voyage et qui correspondra après la guerre avec Mutien pour exprimer tout le mal-être de douleur que beaucoup de soldats allemands ressentent quand ils rentrent au pays, et d'autre part, à la découverte des lettres d'amour de Mutien pour Lieselotte, la petite-fille de Gunther.

'Pitié pour le mal' demandera Gunther dans une de ses lettres à Mutien, le 28 octobre 1951. 'La rancoeur a la dent dure et si un pas est à faire, il ne peut venir que de votre côté, pas du nôtre. La pitié est un privilège des vainqueurs. Il n'y a pas de réponse dans le pardon mais quel recours subsiste-t-il quand le Mal est à ce point irréversible et monstrueux ?'

Le roman de Bernard Tirtiaux est un livre direct, très clair. Il exprime toute la détermination de Mutien, la naïveté enfantine d'Abel, l'angoisse terrible de ces soldats allemands contraints à se réinsérer dans un milieu familial qui ne les attend pas, a souvent bien changé et les conforte donc dans leur profonde déception et dans la tragédie humaine qu'engendre toute fin de guerre.

Senta - - 73 ans - 14 février 2006