Les premières éditions des sentiments : Journal 1961-1972
de Paul Nizon

critiqué par Sahkti, le 3 février 2006
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Ne jamais arrêter d'écrire
L'écriture comme seul moteur. C'est un peu la phrase qui résumerait ce journal qui s'étend sur une dizaine d'années. Ecrire pour vivre, le principal leitmotiv de Paul Nizon, écrivain suisse alémanique né à Berne en 1929. La création littéraire occupe une grande place dans sa vie, au point d'étouffer, souvent, le reste.
Les années englobées par la période reprise dans ce journal ont été des années dures pour Paul Nizon. Auteur ayant connu un premier succès fulgurant, il poursuit son travail d'écriture avec "Canto". Publié en 1963, cet ouvrage, carrément incompris, soulève de vives critiques, le public le boude et Nizon se remet en question. La chute est rude, rien ne lui est épargné. Il découvre le bannissement intellectuel, songe à l'exil, réfléchit sur l'avant-gardisme et le conformisme. Paul Nizon pense à l'abandon de l'écriture. Il peut se le permettre, sur un plan matériel, sa carrière de critique d'art étant très prometteuse, mais l'écriture, il a ça dans la peau et rien ne l'en écartera. Il déplore d'ailleurs qu'on voit alors en lui davantage un esthète et un critique qu'un écrivain à part entière.
Ce sont toutes ces réflexions que Nizon livre dans ce journal, intime, pudique, touchant et sensible. Des pages dans lesquelles un écrivain se remet en question sans pour autant jamais renier son art. Nizon parle de l'écriture, de cette drogue qui le fait vivre; il cite ses modèles et à la fin, une seule conviction: c'est un créateur. Aucun doute. Un beau témoignage.