Les bonnes
de Jean Genet

critiqué par Doudou, le 12 juin 2001
(Rennes - 41 ans)


La note:  étoiles
Une confrontation maître-valet de notre époque
Inspiré d'un fait divers arrivé au Mans dans les années 30, Genet met ici en scène deux soeurs, Claire et Solange, et leur maîtresse.
Les deux bonnes, on le voit dès le début, sont aliénées par Madame et ne peuvent laisser libre cours à leur colère qu'une fois que celle-ci est partie.
Etonnant, me direz-vous, de la part de deux bonnes qui sont considérées comme des filles par la maîtresse de maison. Non, pas tant que ça. En effet, Claire et Solange sont les "filles" de Madame, mais justement, elles en sont étouffées. Elles récoltent vieux fards et vielles robes ; on peut appeler ça de la pitié de la part de leur maîtresse.
De même, en mettant en scène des femmes, Genet porte un autre regard sur la société des années 1950. Il nous dévoile un peu sa pensée sur la condition féminine.
Mais le texte est violent, cru, sans appel de la part des bonnes.
l'espace des Bonnes 8 étoiles

La chambre de Madame dans Les Bonnes de Jean Genet est un lieu d’autant plus étouffant pour les bonnes que l’espace dramatique, censé insérer un hors scène euphorique, est quasi absent. Le hors scène imaginaire, la Guyane en l’occurrence, est rare dans cette pièce de théâtr où le lieu dominant reste la chambre de Madame.Les personnages sont pressés par l’espace prémonitoire de la prison, un lieu évoqué après l’appel téléphonique de Monsieur, mis en liberté provisoire. Suite à cet événement, les bonnes sont bouleversées car elles doutent de la réussite du complot qu’elles ourdissent contre Madame et craignent que Monsieur ne perce le mystère des lettres de dénonciation – rédigées par Claire - et qui l’ont mené en prison. Dès lors les deux sœurs entrevoient l’espace carcéral.
Dans cette pièce bouleversante de Genet, même si l’espace extérieur n’est pas aussi étouffant que la chambre, il reste nuisible pour les bonnes. Le balcon n’est pas mieux perçu puisqu’il démasque au lieu de couvrir ;et même si un lieu ouvre la pièce sur le monde extérieur, cette extériorité est rapidement happée. Bref, l’espace des Bonnes, représenté par le huis clos qu’est la Chambre de Madame, fait écho à l’espace dramatique essentiellement carcéral.

Imad - - - ans - 15 mai 2008


"Que je parle. Que je me vide." 7 étoiles

"Que je parle. Que je me vide. J'ai aimé la mansarde parce que sa pauvreté m'obligeait à de pauvres gestes."

J'imagine que ces quelques phrases, tirées d'une réplique de Solange - une des bonnes -, auraient aussi bien pu être prononcées par Jean Genet, lui qui écrivait dans son introduction: “Je vais au théâtre afin de me voir, sur la scène (restitué en un seul personnage ou à l'aide d'un personnage multiple et sous la forme de conte) tel que je ne saurais - ou n'oserais - me voir ou me rêver, et tel pourtant que je me sais être.”

Les deux bonnes donc, Claire et Solange, parlent et se vident. Elles se vident de leur agacement devant les caprices et la sensiblerie de “Madame”. Elles se vident de leur rancoeur, de leur jalousie, de leurs désirs inassouvis... Lorsque “Madame” est absente, Claire et Solange jouent. Claire quitte sa robe de soubrette pour revêtir une des plus jolies robes de “Madame”, et Solange devient Claire, d’abord soumise puis de plus en plus menaçante. C’est le théâtre dans le théâtre : une mise en abyme cathartique, déroutante et déstabilisante pour le lecteur qui commence par se demander jusqu’où va ce jeu dans le jeu, et dans quelle nef des fous il vient de tomber. Mais c’est aussi cette mise en abyme qui donne toute sa force à la pièce, par ce qu’elle permet de révéler de sentiments troubles et inavouables.

Une oeuvre déroutante et fascinante à la fois.


Un extrait de l'introduction (ou Comment jouer "Les bonnes") par Jean Genet:

"(...) le jeu sera furtif afin qu'une phraséologie trop pesante s'allège et passe la rampe. Les actrices retiendront donc leurs gestes, chacun étant comme suspendu, ou cassé. Chaque geste suspendra les actrices. Il serait bien qu'à certains moments elles marchent sur la pointe des pieds, après avoir enlevé un ou les deux souliers qu'elles porteront à la main, avec précaution, qu'elles le posent sur un meuble sans rien cogner - non pour ne pas être
entendue par des voisins d’en-dessous, mais parce que ce geste est dans le ton."

Fee carabine - - 50 ans - 10 janvier 2006


déroutant?... 7 étoiles

Genet est une figure assez saisissante du poete maudit, quand on y pense: abandonné par sa mère à la naissance, sans famille, délinquant juvénil et homosexuel habitué des milieux carcéraux (drogue, prostitution) à une époque où qui aurait eu le malheur de penser à un certain concept du PACS aurait été brulé hérértique sur la place publique. Les Bonnes sont une pièce qui reprend toutes ces frustrations profondes de Genet: des soeurs incestueuses( ce qui implique un rapport particulier à la famille et une homosexualité patente), la volonté de la mort. Le jeu sur l'Héros et le Tanathos, inspiré qui plus est d'un fait divers, c'est un peu le symbolisme à peine dissimulé d'une marginalité qui endolorit et pervertit. Tant et si bien, d'ailleurs, qu'il n'y a plus d'autre issue que la mort: ainsi les diverses sonneries de la pièce semblent matérialiser la fatalité en marche. C'est une piècê particulièrement difficile à représenter sur scène, car, justement, on a tôt fait de tomber dans une dramatisation emphatique, quand l'auteur n'en demande pas tant. Même Madame subit le contre-coup des griefs de Genet envers la société: une poule de luxe perdue entre niaiserie/cruauté bourgeoises et délires théatraux dignes d'une schizo notoire. On est dans un monde de femmes, un huits-clos où tout ne commence pas bien, ne se déroule pas bien, ne s'arrange pas, et ne finit pas mieux. Alors oui, on est loin du théatre de la catharsis. Oui, on est loin de la limpidité classique. Oui, c'est "confus". Mais certainement pas sans interêt!

Jeanne - - 35 ans - 5 mars 2005


Confu 2 étoiles

J'ai dû lire et étudier cette pièce il y a quelques années pour mon bac de français, et j'avoue que j'ai dû la lire deux fois pour tout comprendre. Les premières pages, surtout, sont très confuses. En fait, je n'ai pas trouvé grand intérêt à cette pièce, et n'ayant rien lu d'autre de Jean Genet, je ne sais pas si je suis allergique à l'auteur ou seulement à cette pièce-ci.

Marz - Aulnay sous bois - 41 ans - 10 juin 2004