Le maître de thé
de Yasushi Inoue

critiqué par Vigno, le 12 juin 2001
( - - ans)


La note:  étoiles
Rituel du thé, rituel de la mort
Le roman de Yasushi Inoué repose sur une base historique. Soeki Rikyu (1522-1591), ce maître du thé issu du bouddhisme zen, fixa pour de bon les règles et la philosophie qui entourent la cérémonie du thé.
Rikyu finit sa vie en se faisant hara-kiri à la demande de son seigneur et protecteur le Taïko Toyotomi. Un de ses disciples, le moine Honkakubo, a laissé des cahiers (ici commence la fiction) qui célèbrent la mémoire du maître, un journal dans lequel il essaie d'élucider cette question : pourquoi Rikyu a-t-il accepté la mort plutôt que demander grâce, ce qu’il aurait sans doute obtenue?
Le roman de Yasushi Inoué est conçu comme une enquête. Honkakubo rencontre diverses personnes, d’autres maîtres et des disciples, qui ont eu connaissance de l’événement. Finalement, il finira par résoudre l’énigme, grâce au maître lui-même qui lui apparaîtra en songe.
Pour Rikyu et ses disciples, plus qu’un jeu ou une rencontre sociale, le rituel du thé met l’accent sur « l'accomplissement spirituel à travers la renonciation matérielle ». La cérémonie est dépouillée de tout clinquant, le style est « simple et sain », d'une simplicité raffinée. Pour finir, avec le maître, on comprend que le « néant n'anéantit rien, c’est la mort qui abolit tout ».

Avant de lire ce roman, pour ceux et celles qui comme moi sont peu familiers avec la culture japonaise, il serait bon de s'informer sur la cérémonie du thé (on trouve ces informations sur internet). Ainsi peut-on apprécier pleinement la richesse de ce roman qui nous projette aux limites de la philosophie zen.
Ce roman est paru en 1991, l’année de la mort d'Inoué. Les réflexions qu’il nous livre sur la mort, sur le Japon ancien s'en trouvent intensifiées : « Depuis mon départ pour Sakaï, sur votre ordre, j'ai vu la mort approcher. La cérémonie du thé est devenue la cérémonie de ma décision de mourir. Aussi bien, quand je prépare le thé et quand je le bois, je suis paisible. La mort est tantôt mon hôte, tantôt mon invitée. »
Le testament du vieux sage 8 étoiles

Quand j’ai découvert ce livre il y a une douzaine d’années, j’ai été impressionné par la ferveur avec laquelle le vénérable Inoué nous décrivait la cérémonie du thé ; comme s’il vous voulait nous montrer qu’au-delà du service, cette cérémonie avait une véritable dimension spirituelle qui confine au religieux. Cette cérémonie apparaît ainsi comme une sorte de sacrifice que l’on pourrait rapprocher de l’eucharistie chez les catholiques.

Mais, ce livre publié à l’extrême bout de la longue vie d’Inoué, est aussi une forme de testament que le vieux sage cherche à transmettre aux jeunes générations en essayant de leur faire comprendre que les rites ancestraux ont un sens et une signification spirituelle dont le Japon d’aujourd’hui, immergé dans le matérialisme le plus concret, a bien besoin pour assurer son avenir et garantir l’équilibre des jeunes générations menacées par les nouvelles valeurs importées dans les bagages des hommes d’affaires et des capitaines d’industrie.

Débézed - Besançon - 77 ans - 2 avril 2008


Un monde étrange 7 étoiles

Un destin étrange que celui de Maître Rikyû, le plus grand Maître de thé du style simple et sain; garder à l'esprit le thé nuit et jour, même en dormant, tel est son secret. Le pratiquer, en imaginant la neige dans son coeur, un de ses commandements. Rien, même sa propre vie, n'a de l'importance en dehors de préparer le thé selon le style simple et sain.
Le principal intérêt du livre est de nous donner un aperçu de ce monde étrange du rituel du thé. Inoué est un auteur agréable et facile à lire cependant je trouve que ce livre devient fastidieux sur la fin; on se perd un peu dans les nombreux personnages historiques qui apparaissent avec le risque de perdre le fil de l'histoire. Ce livre est destiné à l'amateur (éclairé) de culture japonaise plutôt qu'au simple curieux.

Saule - Bruxelles - 59 ans - 18 juin 2001