La rose blanche
de Inge Aicher Scholl

critiqué par Le rat des champs, le 26 décembre 2005
( - 73 ans)


La note:  étoiles
Lire et ne jamais oublier
En 1943 à Munich, quelques étudiants allemands sont torturés par les nazis. Parmi eux, Sophie Scholl qui s'est présentée devant ses juges portée par des béquilles, ses jambes ayant été cassées lors d'un interrogatoire par la gestapo. Sophie, son frère Hans et ses amis seront décapités à la hache... Peu de temps après, l'écrivain Thomas Mann rendra hommage sur les antennes de la BBC à leur petit groupe d'opposants au nazisme, qui portait le nom de la "Rose Blanche",leur assurant ainsi une célébrité mondiale qui ne s'est jamais démentie depuis.
Alexander Schmorell (1917-1943) Hans Scholl (1918-1943) Sophie Scholl (1921-1943) Christoph Probst (1919-1943) Willi Graf (1918-1943) Kurt Huber (1893-1943) sont des héros de grande envergure, de ceux qui ne doivent jamais être oubliés. Assassinés par les nazis pour avoir osé imprimer et distribuer des tracts dénonçant la folie d'Hitler au peuple allemand, ils témoignent du fond de leur tombeau que dans les pires situations, il se trouve toujours des femmes et des hommes qui se lèvent devant l'inacceptable.
Voici, pour vous donner une idée, les premières lignes, toujours actuelles, du deuxième tract distribué par la Rose Blanche en 1942:
" On ne peut pas discuter du nazisme, ni s’opposer à lui par une démarche de l’esprit, car il n’a rien d’une doctrine spirituelle. Il est faux de parler d’une conception du monde nationale-socialiste parce que, si une telle conception existait, on devrait essayer de l’établir par des moyens d’ordre intellectuel. La réalité est différente. Cette doctrine, et le mouvement qu’elle suscita, étaient, dès leurs prémices, basés avant tout sur une duperie collective, et donc pourris de l’intérieur ; seul le mensonge permanent en assurait la durée. C’est ainsi que Hitler, dans une ancienne édition de " son " livre, — l’ouvrage écrit en allemand le plus laid qu’on puisse lire, et qu’un peuple dit de poètes et de penseurs a pris pour bible ! — définit en ces termes sa règle de conduite : " On ne peut pas s’imaginer à quel point il faut tromper un peuple pour le gouverner. " Cette gangrène, qui allait atteindre toute la nation, n’a pas été totalement décelée dès son apparition, les meilleures forces du pays s’employant alors à la limiter. Mais bientôt elle s’amplifia et finalement, par l’effet d’une corruption générale, triompha. L’abcès creva, empuantissant le corps entier. Les anciens opposants se cachèrent, l’élite allemande se tint dans l’ombre. Et maintenant, la fin est proche. Il s’agit de se reconnaître les uns les autres, de s’expliquer clairement d’hommes à hommes ; d’avoir ce seul impératif présent à l’esprit ; de ne s’accorder aucun repos avant que tout Allemand ne soit persuadé de l’absolue nécessité de la lutte contre ce régime. "
Et voici les premières lignes du troisième tract :
"Toute conception idéale de l’état est utopie. Un état ne peut être édifié de façon purement théorique ; il doit se développer et arriver à maturité comme un individu. Il ne faut cependant pas oublier qu’à la naissance de chaque civilisation préexiste une forme de l’état. La famille est aussi vieille que l’humanité, et c’est en partant de cette première forme d’existence communautaire que l’homme raisonnable s’est constitué un état devant avoir pour base la justice, et considérer le bien de tous comme une loi primordiale. L’ordre politique doit présenter une analogie avec l’ordre divin, et la " civitas dei " est le modèle absolu dont il lui faut, en définitive, se rapprocher. Nous ne voulons émettre ici aucun jugement sur les différentes constitutions possibles : démocratie, monarchie constitutionnelle, royauté, etc. Ceci seulement sera mis en relief : chaque homme a le droit de vivre dans une société juste, qui assure la liberté des individus comme le bien de la communauté. Car Dieu désire que l’homme tende à son but naturel, libre et indépendant à l’intérieur d’une existence et d’un développement communautaires ; qu’il cherche à atteindre son bonheur terrestre par ses propres forces, ses aptitudes originales. Notre " état " actuel est la dictature du mal. On me répond peut-être : " Nous le savons depuis longtemps, que sert-il d’en reparler ? " Mais alors, pourquoi ne vous soulevez-vous pas, et comment tolérez-vous que ces dictateurs, peu à peu, suppriment tous vos droits, jusqu’au jour où il ne restera rien qu’une organisation étatique mécanisée dirigée par des criminels et des salopards. Êtes-vous à ce point abrutis pour oublier que ce n’est pas seulement votre droit, mais aussi votre devoir social, de renverser ce système politique ? "
Un témoignage marquant. 9 étoiles

Une amie (allemande, justement) qui aime cette partie de l'Histoire (car il est vrai qu'elle est pour le moins interessante) m'a preté ce livre, que j'ai dévoré!
Il m'a énormement plu, je trouve que ce témoignage se veut percutant et va à l'essentiel ; nous sont narrées les scenes les plus revoltantes, et le combat en lui-meme contre le nazisme.
Les tracts sont des petites merveilles de revolte et de courage, qui nous renforcent dans l'idée que non, toute l'Allemagne ne partageait pas les idées macabres du Führer et une poignée osait meme braver la mort et la torture pour ouvrir les yeux de leur pays!
Un livre court, à lire, pas pour la beauté du style mais pour des idées géniales, et pour des tracts poignants!

Poupi - Montpellier - 33 ans - 26 décembre 2005