Les portes d'en bas
de Heather Dohollau

critiqué par Sahkti, le 2 décembre 2005
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Beauté à savourer... doucement!
"Nous sommes faits de ce qui est autour de nous
L’odeur de l’herbe, la courbe d’une branche
De fleurs – les mêmes et autres que celles cueillies ailleurs
Mais ce qui dure est cela même qui traverse
Le trait oblique le vent à travers feuilles
La flèche qui part et vibre hors de toute cible."

Un mince volume reçu avec pages non-découpées. Au charme dépouillé du contenant succède celui du contenu. Des textes fragiles, simples, beaux, qui dégagent une sensation de pureté et de légèreté. Une ode à la vie, à la nature, au monde, aux hommes, à l’art… une exaltation de la beauté dans ses multiples facettes.

Je dois préciser que je n’ai pas découpé ces pages soudées, j’ai lu le volume tel quel. La notion de sacrilège était trop forte pour que je me saisisse d’un coupe-papier, comme j’en avais pourtant l’intention. Alors j’ai délicatement soulevé les pages et j’ai lu, ce qui, contrairement à ce que l’on pourrait penser, n’a pas gâché la lecture ou provoqué un manque de concentration. J’ai découvert ces textes cachés sous le papier, j’ai retrouvé ce sentiment grisant qu’on éprouve lorsqu’on lit en cachette sous les draps à la lueur d’une lampe-torche. Une joie d’enfant qui a tout de suite trouvé du répondant dans la fluidité et la magie des textes de Dohollau. Certains m’ont coupé le souffle, l’impression d’un coeur qui s’arrête, le temps d’encaisser, puis qui repart en chamade, qui en redemande.
Cependant, il fallait atteindre le degré de modération requis, car l’excès nuit en tout et un trop plein de beauté peut provoquer une lassitude, un rejet, un certain écoeurement dommageable à l’artiste. Alors j’ai refermé le livre et je l’ai repris, morceau par morceau, de temps en temps, afin de ne profiter que d’un seul texte à la fois. Mon cerveau a des limites très fermes quant à ce qu’il peut emmagasiner et il se bloque dès que le tiroir est rempli, refusant d’ingurgiter le moindre mot supplémentaire, même si celui-ci est doux, beau, rond et chaud.
A mes yeux la meilleure solution, avaler par petites gorgées, ne pas provoquer d’indigestion, chaque poème correspondant à un gâteau sucré qu’on laisse fondre dans la bouche. Beaucoup de bonheur reçu.