Le festival Quai des bulles fut un beau moment qui restera gravé dans ma mémoire de festivalier et de journaliste. Il est très difficile de résumer en quelques lignes trois jours de rencontres, 24 interviews, deux visites d’exposition et une rencontre avec une ancienne étudiante… Oui, durant trois jours on vit en accéléré et cela a un côté exaltant même si après on fait un peu du surplace…
Il faudra donc du temps pour digérer cela, revenir sur un certain nombre de lectures, d’auteurs rencontrés, sur des découvertes, des coups de cœur…
Dès aujourd’hui, disons que certaines rencontres furent de très haute volée, que durant une vingtaine de minutes on finissait par tout oublier, les problèmes du monde, les soucis personnels, les rencontres à venir, les difficultés de la SNCF, la météo capricieuse… Si je voulais lister ces temps forts, bien sûr, je prendrais le risque de me fâcher avec ceux que je ne citerais pas, avec ceux que j’oublierais, avec ceux que j’ai oublié de demander en interview…
Commençons donc pas dire que quand il y a 600 auteurs présents, que l’on est seul à réaliser les interviews (cette année pas d’étudiants à Saint-Malo), il est bien difficile de vouloir tous les rencontrer… J’en avais donc choisi 25, en lien avec les maisons d’éditions et un seul a manqué à l’arrivée pour cause de grève de train… Plutôt, un bon rendement… Les autres, ce sera donc pour Angoulême et là je serai en plus accompagné de quatre étudiants…
L’affiche signée Marion Montaigne donnait le tempo de cette édition qui serait folle tout simplement. Attention, Marion n’est pas folle, l’affiche, elle, est pleine de petites folies, de petites choses à découvrir dans tous les recoins du dessin comme vous pouvez découvrir mille et un petits détails dans les illustrations de Marion Montaigne. D’ailleurs, le tome 5 de « Tu mourras moins bête » vient de sortir et commence en fanfare sur une réflexion sur l’immortalité… Oui, cela fait un peu philosophique pour ouvrir le débat mais l’ouvrage est surtout scientifique, évidemment !
J’ai commencé mon voyage médiatique par une rencontre fantastique avec Nicolas Demare et ses nains du Bouclier avant de discuter fantôme avec Lionel Richerand et son esprit de Lewis. Ensuite, ce fut comme une bulle poétique directement venue des Mille et une nuits ou de plus loin, avec un Boiseleur délicat, des oiseaux chanteurs et une dessinatrice tout en douceur… Gaëlle Hersent s’est posée dans notre studio improvisé, un merveilleux oiseau sur l’épaule et ce fut comme une petite tranche de magie… face à la Manche !
Puis, pour rester dans un univers étonnant, un druide dessinateur s’est installé et nous a transportés dans les 5 Terres en compagnie de lions étranges… Mais, le ton était au drame car le roi se mourrait dans de grandes souffrances… pas l’ami Jérôme Lereculey, heureusement !
Puis, il nous fallut revenir aux tristes réalités bretonnes avec une invasion d’algues vertes en salle de presse et une journaliste qui, heureusement, malgré trois ans d’enquête, arrivait à garder le sourire. La précision de ses réponses permit de mieux comprendre l’ampleur du drame écologique et du scandale politique. Inès Léraud a fait un grand travail, son album a du succès et c’est entièrement mérité… Reste à savoir si la Bretagne arrivera un jour à tourner cette page et à prendre les mesures pour que les plages redeviennent belles et agréables, l’agriculture à dimension humaine et raisonnable, notre alimentation de qualité… Bon, il ne faut pas rêver, comme nous l’a bien dit Pierre Van Hove mais gardons espoir quand même !
Après ce reportage réaliste sur les algues vertes, il était bon de prendre le chemin de l’Italie pour une fiction pure, douce et délicate, une tranche de vie, une nuit chaude sur la Péninsule… C’est avec Alfred que nous voyageâmes et c’est avec Senso, son nouvel album, que nous avons découvert des personnages hauts en couleurs…
Enfin, pour clore la première journée, avant de déguster des huîtres, des crevettes, des moules, de la lotte… c’est Laurent Paturaud qui est venu évoquer la figure énigmatique de Mata Hari… Durant quelques minutes, on la regardait danser en Javanaise puis affronter le peloton d’exécution… Oui, la première journée de festival terminait dans le sang (probablement d’une innocente) mais au moins tout cela donnait de l’émotion !
Durant toutes ces rencontres, nous étions face à la Manche et le mouvement des marées accompagnait nos échanges, notre réflexion et nos pensées… Oui, cela aurait pu être pire même s’il s’agissait bien de travail quand même…