Cinq minutes à chercher, cinq minutes à tourner en rond, cinq minutes de retard. Non décidément je n’étais pas sereine. Interviewer Benoît Cousin, l’éditeur de la série Conan était le moment que j’attendais à St Malo depuis le lancement du projet Quai des Bulles à Chalon. Mais, heureusement, Benoît Cousin arriva avec cinq minutes de retard. L’interview peut commencer sans que je l’aie fait attendre…
L’éditeur ? On se soucie surtout de l’illustrateur, éventuellement du scénariste, voire du coloriste… Mais l’éditeur ? On ne connait rien sur lui et son nom s’efface de notre mémoire instantanément… D’ailleurs, à quoi peut bien servir un éditeur comme Benoît Cousin ? Il fait parti du pôle éditorial de la nouvelle série Conan. Les deux autres membres sont Jean-David Morvan, l’instigateur de ce projet et Patrice Louinet le spécialiste international de Robert Howard le créateur originel de Conan. Son rôle spécifique, en tant qu’éditeur, est de trouver les dessinateurs, les scénaristes, en somme les bonnes combinaisons de créateur pour que la création de chaque tome soit réussie, que la lecture fonctionne et que les lecteurs s’y retrouvent…
Passionné de littérature de genre, il est intarissable sur Conan. Il m’expliqua les enjeux et les objectifs de la réadaptation française de cette œuvre de 1932. Avec beaucoup d’honnêteté et de réalisme, il expliqua qu’un des enjeux était économique. En effet, le personnage de Conan possède déjà une communauté de fans fidèles prêts à acheter cette nouvelle série. De plus, Conan s’inscrit dans les goûts culturels actuels : Games of Thrones, Viking, Seigneur des anneaux, Harry Potter… Ainsi les éditions Glénat s’assurent une base d’acheteurs solide et peuvent se permettre de se lancer dans leur ambitieux projet.
Effectivement, ils ont décidé d’explorer les différents traits et aventures de Conan décrits par les écrits de Robert Howard. Les gens sont habitués à la représentation budibuilder de Schwarzenegger dans le film culte de John Milius. Ici, les éditions Glénat désirent offrir une vision nouvelle et plus profonde du personnage jusque là laissée au rang de montagne de muscle sans cervelle dans l’imaginaire collectif. Chaque tome montre une nouvelle facette de Conan sous la plume d’un artiste diffèrent. D’un style cartoonesque à un style plus brut, le personnage reste toutefois le même : le barbare sauvage et félin, le guerrier impitoyable et indomptable.
Toutefois, malgré le parti pris audacieux et engagé, certains fans de Conan ne semblent pas prêts à accepter de voir l’image de leur héros évoluer. En effet, Benoît Cousin a dû se rendre compte qu’adapter un personnage culte c’est aussi se frotter aux «gardiens du temple» comme il le dit. Ce sont ces fans qui n’acceptent aucune autre représentation que celle qu’ils connaissent. Mais malgré le manque d’ouverture d’esprit de certain, d’autres se montrent au contraire agréablement surpris de découvrir «un autre» Conan !
Nouveau projet phare de l’année 2018 pour Glénat, la série Conan ne semble pas prête de s’arrêter, pour mon plus grand plaisir. Et il nous reste plus qu’à attendre novembre prochaine pour la sortie du prochain Conan au sous-texte apparemment plus érotique. »