Certaines personnes me demandent souvent comment définir les romans graphiques ? C’est un roman ? C’est une bande dessinée ? C’est un livre illustré ? Je peux comprendre l’angoisse de ceux qui sont nés comme moi le siècle dernier et qui ont vu arriver ce terme sans explication particulière… Le roman graphique…
Tout est arrivé en plusieurs temps et il semble que le premier terme entendu soit américain, graphic novel. En fait, le problème est né surtout du fait que le terme de bande dessinée signifie très vite en Occident, livre pour la jeunesse avec plein de dessins… Les premiers arrivés dans cette catégorie – Tintin et Spirou en particulier pour orienter notre regard vers la bédé franco-belge – illustrent totalement cet aspect littérature pour la jeunesse. Du coup, comment classer les livres utilisant le même mode narratif mais destinés aux adultes ? Dans les années soixante-dix, il y eut la BD érotique mais c’est l’adjectif érotique qui la distinguait. Puis cela ne suffit pas car il fallait classer le fruit du travail des auteurs de ces revues pour adultes, L’écho des savanes, Fluide glacial, Métal hurlant… Le libraire mettait ces albums à part sans leur donner de nom…On voit alors un certain nombre d’éditeurs mettre en place des nouvelles collections : Romans (à suivre) chez Casterman, Romans BD chez Dargaud, Encrage chez Delcourt, Tohu Bohu aux Humanoïdes associés, Romans graphiques au Seuil et Denoël Graphique chez Denoël… C’est au cœur de ces collections que certains talents vont éclore, qu’une nouvelle narration graphique se construit et se met en place, que les adultes vont trouver des titres d’une très grande qualité…Un roman graphique est donc, d’une façon générale, une bande dessinée, au format libre, au sujet libre, destiné principalement aux lecteurs adultes. Les récits – pas toujours fictionnels – peuvent être beaucoup plus longs que dans le format traditionnel de la bande dessinée, les thèmes plus ambitieux, plus sérieux sans que ce soit une obligation…Deux éléments peuvent compléter cette tentative de définition du roman graphique. Depuis quelques années, on voit beaucoup de bande dessinée de reportage et des biographiques arriver en librairie et ces deux catégories entrent elles aussi dans les romans graphiques. Les reportages bédés ont transformé certains auteurs en journalistes bédés tandis que les biographiques les ont poussés vers les historiens ! Attention, dans les deux cas, certaines spécificités ont bien été conservées et respectées avec des coauteurs journalistes et historiens.
S’il fallait, maintenant, vous conseiller – je sens que je vais me faire des ennemis – quelques titres pour faire vos premiers pas dans le monde du roman graphique, je vous pousserais vers :
- en fiction, Thomas ou le retour du tabou d’Hervé Bourhis, éditions Humanoïdes associés
- en histoire, Kiki de Montparnasse de Bocquet et Catel, éditions Casterman
- en autobiographie, Pilules bleues de Frederik Peeters, éditions Atrabile
- en politique, Saison brune de Philippe Squarzoni, éditions Delcourt
- en surréalisme, L’heure des lames de Rob Davies, éditions Warum
Mais, bien sûr, cette liste n’est qu’une porte d’invitation à la lecture pas une limitation à la découverte !