En 2005, dans les anciens locaux des éditions Delcourt, rue Hauteville à Paris, je rencontrais une jeune autrice – on ne disait pas encore cela à l’époque – pour sa première bande dessinée, le volume 1 de la Rose écarlate. Pendant plus de trente minutes, de façon hésitante mais naturelle, avec la fraicheur et l’innocence d’une jeune femme, elle me parlait de son héroïne, Maud, de ses influences graphiques et scénaristiques asiatiques – mangas à la télévision en tout premier – et je découvrais qu’elle avait été aidée par un certain Philippe Ogaki pour les couleurs… Maud était une sorte de Zorro du XVIIIème siècle et sa bande dessinée avec un côté cape et épée… Dès le départ, elle avait posé des jalons d’avenir avec un secret qui pesait sur les frêles épaules de Maud…En 2017, dans l’espace presse des éditions Delcourt, je reçois Patricia Lyfoung pour le douzième album de la série, Tu m’as ouvert les yeux. Ce n’est plus la première rencontre, je rencontre Patricia presque chaque année, à Paris, à Montreuil ou à Angoulême. J’ai suivi son travail, constaté son évolution, sa maturité, sa maitrise. Sans renier ses influences, elle ne fait plus du « à la manière de » mais du « Patricia Lyfoung ». La rose écarlate est devenue une belle série, elle a son public, il y a même une série dérivée, La Rose écarlate, Missions.Pourquoi les étudiants ne m’ont-ils pas accompagné dans cet entretien ? Tout simplement, comme l’a dit immédiatement l’un d’eux, parce que La Rose écarlate c’est la série que lisait sa petite sœur ! Non mais…En fait, moi j’aime bien ce type de lecture. Paisible, sereine, de qualité, cette lecture fait du bien et montre que l’on peut raconter de belles histoires sans pour autant tout baigner dans le sang, la violence ou la haine… Maud, le personnage central et un peu romantique au départ, a évolué, elle s’est épaissie au niveau du caractère, le scénario de la série est beaucoup plus complexe, les personnages sont en quête de leurs origines et le lectorat de la série a vieilli lui aussi quelque peu… La petite sœur a grandi en quelque sorte !Au départ, le thème principal était certainement la justice mais, au fur et à mesure, on parle amour, amitié, trahison, fidélité, souffrance, origine, maladie, courage, vieillesse, mort… Oui, Patricia propose une série plus complète, plus riche, plus humaine et cela devient meilleur !