C’est toujours amusant de choisir des bandes dessinées et des auteurs avant Angoulême. Certes, on ne fait pas tout cela au hasard mais les quatrièmes de couverture et les dossiers de presse ne sont pas toujours assez explicites pour aider à faire son choix. Or, ce choix devient lecture, interview et article… Heureusement, les attachées de presse qui nous connaissent, le hasard qui fait parfois de bien belles choses et le thème annoncé qui réveille en nous des envies incroyables, tout cela donc, nous emmène dans des univers pleins de satisfaction et alors on ne regrette rien !J’ai donc choisi Collaboration horizontale parce que l’album était dessiné par Carole Maurel, une dessinatrice que je connaissais, que j’avais rencontrée à Angoulême et que je voulais continuer à suivre. J’ai choisi Collaboration horizontale car c’était une bande dessinée sur un épisode de l’histoire que je connaissais peu et qui me posais de nombreuses questions : pourquoi avoir tondu des femmes à la fin de la guerre ? Enfin, j’ai choisi Collaboration horizontale parce qu’il était question de la vie quotidienne d’un immeuble pendant l’occupation et que je suis persuadé que la vie quotidienne est le révélateur de la vie réelle d’un peuple même en pleine guerre !Et me voilà avec cet album et d’entrée je constate qu’il est impossible de le reposer avant d’avoir terminé la lecture de la vie de Rose, du moins de cette portion de vie durant l’occupation. Rose est devenue par la suite une bonne grand-mère et la voilà qui raconte à sa petite fille Virginie comment elle est tombée amoureuse… Comme le dit l’autrice, on n’imagine pas que sa grand-mère a été amoureuse un jour…Navie raconte une histoire forte, la sienne certainement car la petite fille Virginie c’est elle d’une certaine façon, dans un contexte très banal durant l’occupation. Un immeuble, des familles avec beaucoup plus de femmes que d’hommes – certains ne sont pas rentrés de captivité – avec des enfants et aussi avec des Juifs… Tout pourrait aller pour le mieux si chacun ne s’occupait que de ses oignons, si la peur n’existait pas, si un homme de la police ne pensait pas avoir la responsabilité de sauver le monde entier, si certaines jeunes femmes n’étaient pas si jeunes et en manque d’affection…
Par ailleurs, tout irait bien si les occupants étaient tous des sauvages, des horribles militaires, vieux et alcooliques… Mais, parmi les Allemands occupants, il y avait de jeunes gens sympathiques et romantiques, potentiellement attirants, aimables, agréables…
Rose va connaitre le coup de foudre ! Et je n’ai pas envie de vous en dire beaucoup plus sur la vie quotidienne dans cet immeuble parisien… la grand-mère va se souvenir de tout cela et elle ne pourra que dire à sa petite Virginie : « Alors, je t’en prie, ma chérie, sois heureuse d’aimer, choisis toujours la vie… ».
Carole Maurel est la dessinatrice de cet album et sa narration graphique est d’une force incroyable. Elle met tout son talent au service de ce récit intime, sobre, profond, humain… L’esthétique est effacée et gommée pour laisser les mots nous toucher. Chaque personnage est crédible, chaque scène nous plonge en entier dans une vie pourtant si éloignée de nous et si proche à la fois… j’ai même le sentiment que Carole Maurel est tellement au service de son histoire qu’elle s’est entièrement approprié le récit… Carole devient Virginie, enfin Navie si vous voulez…
J’espère réellement que ces deux autrices vont encore travailler ensemble dans les années à venir car elles nous proposent là une très bonne bande dessinée ! Mille fois merci !!!