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Et si on parlait patrimoine…
Ce week-end, en Europe, on va regarder le patrimoine d’une façon plus affinée, avec un peu plus d’attention, de considération et cela me semble capital. Mais il ne faudrait pas imaginer que le patrimoine ne serait constitué que de pierres, de vieilles pierres, si belles soient-elles… certes, l’architecture appartient bien au patrimoine mais elle n’est pas la seule à le constituer et le faire exister…
Le patrimoine est beaucoup plus large et c’est ce que finalement nous laissons aux générations futures… On peut tenter de définir le patrimoine comme étant un ensemble de biens matériels et immatériels que nous avons reçus en héritage par ceux qui nous ont précédés et que nous allons protéger, enrichir, faire vivre et transmettre à ceux qui vont nous suivre… Il n’est donc pas question de se limiter à l’architecture et on pourrait dire que ce patrimoine humain (certains disent culturel) comporte :
- La planète (y compris les couches qui l’entourent…)
- Les richesses de cette planète (renouvelables ou pas…)
- Les paysages (nature, géologie, espaces agricoles…)
- Les constructions (architecture, urbanisme…)
- Mobiliers, œuvres artistiques…
- Industrie et artisanat (machines, ateliers, outils…)
Mais aussi des choses plus immatérielles ou difficiles à cerner :
- Traditions orales, contes, légendes, mythologies
- Gastronomie et art de vivre
- Musique, chant
- Danse, jeux, sports
- Savoir-faire
Et on comprend bien que cette liste peut nous emmener très loin car elle n’est pas du tout limitative. On y incorpore donc, sans aucun souci, les arts de la rue, patrimoine de Chalon sur Saône… N’oublions pas que Chalon-sur-Saône, bien avant l’arrivée de Chalon dans la rue, fut un lieu de rencontre, de foire et d’échange commercial. Or, dans ces temps lointains, à chaque foire, il y avait des gens de spectacle qui venaient chanter, jouer, faire rire, faire peur… L’animation culturelle était déjà là et y est encore !
Donc, aujourd’hui, quand vous allez profiter des visites organisées à l’occasion de ces journées européennes du patrimoine, n’oubliez jamais que le patrimoine va bien au-delà de quelques murs et qu’il est de notre responsabilité à chacun d’entre nous de le faire vivre et de la transmettre… Le patrimoine est notre affaire à tous !!!
Une petite anecdote en passant, une histoire vraie… Nous sommes dans le sud-ouest, dans une crèche. Une des responsables est très portée sur la diététique et elle demande à chaque enfant ce qu’il a mangé, discute avec les mamans sur les mêmes thèmes tous les jours… Une fois, elle a la discussion suivante avec un papa :
- Votre fille m’a parlé de cassoulet. Elle a l’air de dire que c’est important…
- Oui, c’est parce que la semaine dernière, nous avons eu le week-end cassoulet de la famille…
- Oui, mais vous ne lui en avez pas donné, c’est beaucoup trop lourd, c’est gras…
- Bien sûr qu’elle a eu le droit à en prendre. Pourquoi aurait-elle été la seule à en être privée ? Comment pourrait-elle comprendre qui elle est si elle n’a pas la possibilité de vivre avec sa famille, y compris en prenant du cassoulet. Notre cassoulet !
Je connais le même genre d’histoire avec la choucroute, le couscous, la potée lorraine… Oui, nous sommes tous de bassins culturels différents et chacun a le droit de garder ses liens culturels et gastronomiques ce qui ne signifie pas du tout manger du cassoulet tous les jours mais manger du cassoulet tous ensemble ! Très différent !
L’étape suivante sera de partager ces coutumes avec les autres pour élargir notre vision culturelle et manger un cassoulet avec des amis du sud-ouest quand on est Lorrain, Bourguignon ou Breton est une découverte que je vous invite à faire le plus rapidement possible…
Bonnes journées du patrimoine à tous !!!
A la découverte des Rois mages…
Souvent, les premières galettes des rois arrivent en vitrine de boulangerie à partir du 20 décembre… et, pourtant, on est encore loin de l’Épiphanie, cette fête qui donne lieu au fameux tirage des Rois dans les familles. Aujourd’hui, je serais tenté de dire que cette fête s’est transformée en fête de la frangipane tant le côté religieux semble avoir disparu… Religieux, mais catholique ou pas… Il est bien temps de se pencher sur la question car tout n’est pas très clair…
Quand j’étais petit, reprenons bien aux origines, il s’agissait de l’arrivée des Rois mages dans la crèche. De Noël à l’Épiphanie, pas de roi mage dans la crèche. Puis, le matin de l’Épiphanie, l’Étoile de Bethléem avait bien dû briller car ils étaient là, Balthazar, Melchior et Gaspard. D’ailleurs, on me disait même qu’ils représentaient à eux trois les continents : Melchior pour l’Europe, Gaspard pour l’Asie et Balthazar pour l’Afrique. Tant pis pour les Amérindiens et les autochtones d’Océanie, ils n’avaient pas été invités à la fête…
Cette tradition des Rois mages remonte assez loin dans l’histoire car dans certaines catacombes, on en trouve peints sur les murs… Mais si on remontait encore plus loin ?
Quand on cherche, on trouve, au moins partiellement. On trouve chez les antiques Grecs et Romains des fêtes très particulières en l’honneur de Dionysos pour les uns, Saturne pour les autres. A chaque fois, il s’agissait de se réjouir du retour des beaux jours après le solstice d’hiver. Ces fêtes étaient bien souvent excessives, arrosées et même sexuelles. Chez les Romains, lors des Saturnales qui se déroulaient à cheval sur décembre et janvier, on tirait au sort un esclave qui était nommé roi d’un jour… Parfois c’était une élection, parfois une fève dans un gâteau qui désignait arbitrairement ce roi du jour…
On a beaucoup jasé sur le devenir du roi d’un jour. Il pouvait exaucer des vœux dans la journée, pour lui ou d’autres, mais que devenait-il à la fin de la journée ? Certains disent qu’il était mis à mort, et cela arrivait quelques fois. Mais dans la majorité des cas, il était tout simplement renvoyé à son sort, certains diraient à son triste sort…
Revenons au tirage au sort ! Vous ne serez pas surpris d’apprendre que parfois le plus jeune allait sous la table pour désigner de façon assez arbitraire et neutre la part de galette que chacun allait recevoir. Comme quoi nos traditions remontent toujours très loin même si elles ont été christianisées à un moment car il n’est plus question de tuer notre roi à la fin de la journée, bien sûr !
Cette tradition de tirer les rois est restée et on a fait le lien avec ces rois mages qui venaient adorer Jésus dans sa crèche… Quelques anecdotes sont restées dans notre histoire même s’il est très difficile de leur donner du crédit… On dit, par exemple, que François 1er dont la légitimité n’était pas établie avec solidité, s’était fâché très sévèrement contre un jeune prince de la cour qui avait eu la fève et s’était proclamé roi. Il en fut pour ses frais car le jeune roi et quelques amis avaient ravagé une partie de son domicile… Lèse-majesté en quelque sorte !On dit aussi que Louis XV avait tiré les rois avec ses petits-enfants et que la fève s’était fractionnée en trois parties dont les futurs Louis XVI, Louis XVIII et Charles X avaient chacun récupéré un bout. Ils se proclamèrent tous trois rois dans l’euphorie de la jeunesse tandis que le sage Louis XV y voyait là un signe de drame… Effectivement, les trois jeunes hommes allaient devenir chacun à leur tour roi… mais rien ne dit que cette histoire comporte la moindre parcelle de vérité !
Pendant la période de la Révolution Française, il était bien délicat de parler de galette des rois, on eut donc la galette du bon voisinage… mais la tradition perdura et arriva ainsi jusqu’à nous !
Quant à la frangipane, il est assez délicat d’avoir une version fiable, là encore, mais j’aime à penser qu’elle arriva en France avec une certaine reine, Catherine de Médicis. Au moins, cette reine noire laissa à la France une recette délicieuse car vous l’aurez bien compris, j’aime la frangipane.
La tradition est donc bien en place même si certains Réformés et Catholiques n’apprécient pas trop cette coutume venue du monde païen, même si certains Républicains se lassent d’entendre toujours parler de Roi…
Mais, justement, cela nous a considérablement éloignés de la fête de l’Épiphanie et de son sens religieux…
En fait, l’Épiphanie est une très grande fête, certains théologiens chrétiens seraient même tentés d’affirmer une des plus grandes fêtes de la vie chrétienne. Avant cette « révélation » – Épiphanie signifie paraitre dans sa gloire – Jésus n’est que le fils de Marie et de Joseph. A partir du moment où des mages représentant la population du monde et même sa partie la plus cultivée et savante, Jésus devient le Messie, celui qui est là pour l’humanité entière et non pas simplement pour un peuple donné. Jésus n’appartient plus à ses parents, à son clan et ou son peuple, il est le fils de Dieu envoyé pour tous !
Les chrétiens d’Orient ont très rapidement compris que cette fête devait dépasser le simple folklore, elle porte un symbole fort et absolu. Cette fête est le début du ministère public de Jésus même s’il est encore enfant et dépendant de ses parents. Les Orthodoxes fêtent là quasiment toute la jeunesse de Jésus qui fait sens : présentation, visite aux prêtres du Temple, Baptême… avec cette fête Jésus est prêt à nous parler, à nous montrer le chemin qui mène au Père, à nous sauver…
Pour les Catholiques, l’Épiphanie est fixée au 6 janvier ou au dimanche entre le 2 et le 8 janvier. Trois phases de la vie de Jésus sont évoquées, ce qui nous rapproche considérablement des Orthodoxes : l’adoration des mages, le baptême de jésus, les noces de Cana même si ce sont bien les mages qui retiennent l’attention et la curiosité…
Pour redonner du sens et de la force à l’Épiphanie, l’Église catholique a créé une fête spécifique, le dimanche suivant, centrée sur le baptême du Christ. Mais reconnaissons bien que l’Épiphanie est installée dans le cœur des occidentaux, que les galettes font leur petit effet, et que cela semble assez raisonnable d’évoquer le sens de cette fête avec une vision générale. Quelques jours plus tard, une grande partie des chrétiens par intermittence et non pratiquants auront oublié tout cela et seront dans l’attente de Pâques et de ses chocolats…
Donc, si on veut garder un peu de sens à tout cela disons que l’Épiphanie est la grande fête qui révèle Jésus et sa mission à tous les hommes, à tous les peuples, à toutes les cultures… C’est une grande fête qui va bien au-delà de l’arrivée de trois personnages mystérieux qui offrent à Jésus et sa famille les richesses de l’époque : or, encens, myrrhe…
Il y a là, beaucoup de symbolique, dont la première est de faire venir dans la crèche après les bergers – symbolisant le peuple du bas – les mages – le peuple du haut. Tout le monde est donc bien venu adorer Jésus, il est reconnu par tous et nous sommes donc invités, nous aussi, à venir adorer Jésus dans son dénuement et sa simplicité.
Voilà le sens profond de cette fête et si elle est l’occasion d’une bonne galette en famille, profitez-en car la convivialité et l’affection familiale ne sont pas un frein à l’adoration de Jésus sauveur du monde !
On sent dans le sens théologique de cette fête un aspect proche de la Pentecôte… On pourrait dire que l’Épiphanie est une pré-Pentecôte !
Mais, croyants ou pas, chrétiens ou pas, je vous souhaite à tous une bonne galette !!!
Quai des bulles 2016, épisode 1 avec Alexe
La première rencontre est toujours importante pour donner le ton à un travail de reportage durant un week-end entier. Alexe était la première sur ma liste d’auteurs à interviewer mais comme elle avait peu de temps libres il fallait réaliser l’entretien durant une dédicace avec le public. Ce type d’opération est toujours délicat car il faut arriver à voler un peu de temps aux lecteurs parfois impatients sans qu’ils se fâchent… Heureusement, Alexe était là pour proposer la bonne solution… Elle me donnait une petite dizaine de minutes, à l’extérieur, au soleil en faisant sa pause, elle l’a annoncé à ses lecteurs avec le sourire et tout s’est très bien passé…Alexe est une artiste qui s’est formée au fil des ans, des expériences et des projets. C’est la passion qui la motive et elle s’est déjà retrouvée dans des projets de dessin, d’arts, de musique et bien sûr de bande dessinée !!! Après des études – oui les jeunes amis, il faut toujours faire des études même quand on a du talent et que l’on veut faire de l’art – musicales (sax alto), en arts plastiques, en graphisme et en 3D, il a bien fallu travailler. Comme beaucoup elle a commencé par aller d’ici à là et réciproquement en faisant de la communication, de la publicité puis du jeu vidéo. Elle fut graphiste dans ce dernier domaine (lead graphiste) puis chef de projet. En 2002, elle se lance à son compte…On la voit illustratrice puis coloriste, dans des fanzines/magazines et dans l’édition (Khimaira, Semic…)… C’est en participant à la coloration de bandes dessinées avec des auteurs variés qu’elle apprend les fondamentaux de la bande dessinée. C’est progressif, de la passion à la pratique amateur, les débuts professionnels, le désir de devenir dessinatrice de bédés, les grands débuts professionnels en 2015…Sa première série sera Lancelot avec un scénariste expérimenté pour ne pas dire plus, Jean-Luc Istin… Elle reçoit un prix « jeune talent » pour le tome 1 de Lancelot par le festival « Abracadabulles » en 2009. C’est bien lancé !!! Les projets s’enchainent, elle est bien une auteure de bandes dessinées à part entière !!!En juin 2016 sort le tome 22 de La Geste des Chevaliers Dragons, Alexe entre dans le club des dessinateurs ayant participé à cette grande épopée écrite par « Ange »… Un beau coup de cœur et, surtout, un grand moment car cette dessinatrice répond aux questions avec simplicité, douceur, précision et gentillesse. On découvre une passionnée de cette série La geste des Chevaliers Dragons et une auteure qui a dû résoudre un problème fondamental quand il a fallu dessiner son dragon… Mais, cela, vous le découvrirez en lisant cet album, La porte du Nord.Il semblerait que la collaboration avec les scénaristes Ange se soit si bien passée qu’elle sera suivie très prochainement pas une nouvelle association dans cette très belle série…
Il faut maintenant que je vous précise un petit détail… Le lecteur qui attendait le premier dans la file d’attente, celui qui gardait le sourire en attendant son tour, celui qui était un lecteur passionné de la série… était un charmant monsieur d’une bonne soixantaine d’années ! Oui la bande dessinée de ce genre-là – entre héroïque fantaisie et fantastique – n’est pas du tout réservée à une classe d’âge, elle touche des lecteurs de sept à soixante-dix-sept ans pour reprendre le slogan classique du Journal de Tintin qui fête cette année ses soixante-dix ans !!!
Art, création, festivals et visages d’artistes… Que du bonheur !!!
Depuis le début de l’été, on est un certain nombre à fréquenter les festivals, moments très particuliers de la vie culturelle, en particulier en France. En effet, durant deux ou trois jours dans le plus grand nombre des cas, le public profite d’un très grand nombre de spectacles, avec des vedettes de qualité, avec des programmations osées, avec des conditions tarifaires très souvent hors normes… Mais tout cela n’est possible que parce que sur toutes ces scènes, il y a des artistes de qualité !!!Avant d’être sur scène, avant la mise en place des décors et costumes, avant l’histoire, avant la musique, avant la rencontre avec le public… il y a le visage porteur d’émotions, surface médiatique par excellence, passage des échanges…Un festival, comme par exemple celui de Chalon dans la rue, ce sont des dizaines et des centaines de visages d’artistes croisés, avec une multitude d’émotions à capter… Toute la palette des arts de la rue ! Le festival est une occasion d’observer tous ces visages d’artistes et de les aimer comme signe de notre diversité, créativité, bonheur…C’est un peu comme une collection mais en mieux : on les cherche, on les regarde, on les admire, on les range dans sa boite mais ils restent tous en Liberté !!!
Un bel album à découvrir en famille : Le plus beau jour de ma vie…
En lisant ce bel album, Le plus beau jour de ma vie, on mesure que le bonheur est bien souvent à notre portée mais que l’on n’ose pas l’attraper…
Le plus beau jour de la vie d’un de vos proches, enfants, petits-enfants, neveux ou filleules… ce sera, peut-être, quand vous lirez ce texte de Béatrice Ruffié Lacas et regarderez ces magnifiques dessins de Zaü en donnant un peu de temps à cet enfant qui attend tellement de vous… Non ?
Seul engagement à prendre dès le départ, au-delà de la lecture, c’est d’accepter de prolonger l’échange avec cet enfant qui ne manquera pas comme Louis d’attendre une bonne partie de jeu… Jouer ensemble, c’est si agréable !!!
Bon, ce n’est pas tout, j’ai une partie de Mille sabords à finir !!!
Chalon dans la rue : de l’entreprise au spectacle, Clowns d’affaires !!!
J’ai eu le plaisir, un peu par hasard, de voir jouer la compagnie Batchata durant le dernier festival Chalon dans la rue. Il s’agissait d’un spectacle de clowns, que dis-je de Clowns d’affaires !Alexandre Aflalo et Carine Bonan jouent les formateurs en entreprise avec un certain talent et, aussi, une bonne connaissance du sujet. Si on veut faire rire avec un thème pareil, il faut que chacun reconnaisse un petit quelque chose de vécu, d’expérimenté… surtout au début car après la séance de formation part en vrille pour le plus grand plaisir des spectateurs…Pour moi, si j’enlève le fait d’avoir ri de bon cœur ce qui fait toujours du bien dans ces temps difficiles, ce spectacle a été la preuve que l’on peut avoir, avec une forme relativement courte de spectacle (20 minutes), une tonicité et une énergie incroyables, faire rire avec du sérieux ou faire réfléchir avec du léger, emmener le public dans son délire et, tout cela, sans qu’il y ait la moindre frustration ! Oui, le court fonctionne bien quand il est fait de mains de maîtres !Quant à Carine Bonan, elle se révèle une excellente clownesse que j’ai appréciée tout particulièrement. Son métier n’est pas simple, nous vivons une période délicate et elle embarque le public avec brio. On devrait rendre ses séances de clowns obligatoires dans toutes les entreprises car je suis certain qu’après l’ambiance au travail serait bien meilleure… Non ?Donc si la compagnie Batchata passe près de chez vous (bientôt Libourne en France et Ecaussinnes en Belgique) ne les manquez sous aucun prétexte !!!
Edouard II s’invite à Chalon dans la rue…
Il y a quatre ou cinq jours, si on m’avait demandé de parler d’un certain Christopher Marlowe, j’aurais été très gêné car je ne savais que deux ou trois petites choses. Oui, il s’agissait d’un dramaturge anglais, presque contemporain de William Shakespeare… et probablement que je cessais là mon exposé. Je n’avais jamais vu de pièce de Marlowe, je ne l’ai jamais lu, silence total sur lui lors de mes études littéraires lointaines…
Mais il y eut Chalon dans la rue 2016, la pièce Edouard II jouée par Ring-Théâtre et une merveilleuse soirée malgré quelques gouttes de pluie… Maintenant, je n’en sais peut-être pas beaucoup plus sur Marlowe mais je connais une de ses pièces ou, plus exactement, ce qu’en ont fait ces artistes jeunes et talentueux qui sont venus la jouer à Chalon dans la rue…La compagnie Ring Théâtre est constituée de jeunes acteurs et professionnels du théâtre, tous formés dans de grands lieux de formation et dotés d’une intention forte. C’est eux qui le disent, ils veulent faire du théâtre populaire ! Qu’à cela ne tienne, je suis prêt à aller voir du théâtre populaire même s’il n’est pas toujours facile de définir ce que peut bien être le théâtre populaire ou un théâtre populaire… Mais, en fait, on s’en fiche un peu de savoir si ce que l’on va voir est populaire… Imaginez un spectateur de l’époque de Molière, le Molière en tournée en France, dans les villes de taille moyenne. Se posait-il des questions ? Pensait-il aller voir une pièce populaire ? Savait-il seulement ce qu’il allait voir ?D’ailleurs, quand je regarde Edouard II, je ris, je tremble, je crains le pire pour ce cher Edouard, j’ai pitié de lui quand il est en prison tandis que j’ai envie de le ramener à l’ordre quand il part en guerre contre Mortimer, Lancastre ou Warwick… A quel moment est-ce du théâtre populaire ? Quand je pleure ou quand je ris ? Ou, pourquoi pas, est-ce que cela devient populaire quand Gaveston fuit la cour en scooter ? Quand les grands de la cour entament une petite danse écossaise au son de la cornemuse ? Ou mieux, est ce que cela deviendrait populaire quand les guitares électriques se font entendre avec une certaines violence assez baroque ?Non, si être populaire se limitait à ce type de petite blagounette de la compagnie, la réflexion stopperait immédiatement là et ne présenterait aucun intérêt. Seulement, voilà, il se pourrait bien qu’être populaire soit beaucoup plus complexe… Etre populaire de mon point de vue, c’est par exemple être capable de remettre sur des gradins en plein Chalon dans la rue, un public multiforme, de tous les âges et de toutes les cultures, pour regarder une pièce de l’époque de Shakespeare, qui de surcroît dure presque trois heures, nécessite une quinzaine d’acteurs et touche un épisode de l’histoire d’Angleterre que nous ne connaissons pas beaucoup… Oui, et cela fonctionne bien, plutôt même très bien !J’ai été enchanté par le jeu des acteurs, par la qualité technique du spectacle – musique, lumière, bruitage, costumes – et par l’appropriation du lieu. Jouer une telle pièce est déjà un défi étonnant, la jouer dans un festival d’arts de la rue relève presque de la gageure !On ne voit pas le temps passer, on rigole de très bon cœur, on est surpris par la façon dont metteur en scène et scénographe ont travaillé ensemble pour proposer une pièce cohérente, intelligente, fine, humoristique, surprenante et dramatique, car, ne l’oublions pas, nous sommes bien dans une tragédie, une tragédie pure et dure comme l’époque a su en engendrer et comme Shakespeare a pu en écrire !
Certains sujets sont extraordinairement d’actualité comme le regard sur les homosexuels – on croyait en avoir terminé avec ces faux problèmes mais encore récemment en France on a pu mesurer que chez certains cela restait un point de blocage – ou la corruption politique, l’argent et le pouvoir, le pardon… franchement, c’est un très grand spectacle aussi pour tous ces liens avec nos vies quotidiennes…
Et c’est peut-être bien cela être populaire : rester au contact de la vraie vie, celle qui est quotidienne et qui rend le théâtre concret… On aurait presque pu vivre comme Edouard II, avec peut-être un peu moins de violence… quoi que !
J’ai apprécié les acteurs, le metteur en scène, les techniciens et comme tout le monde est à féliciter j’ai envie de ne pas citer les noms car en oublier serait trop injuste !
Si donc Edouard II par la compagnie Ring Théâtre passe à côté de chez vous, vous savez ce qui vous reste à faire ! Sachez que déjà que le 10 janvier 2017, la pièce sera jouée à Saint-Jean de Védas, près de Montpellier… et, puisque nous avions commencé notre article en parlant de Marlowe, sachez qu’à la médiathèque Jules Verne de cette même ville, il y aura le 13 janvier une conférence débat sur Marlowe et le théâtre élisabéthain…
Voilà, Chalon dans la rue n’est pas seulement une culture légère avec des saltimbanques – à mes yeux et mes oreilles le mot n’est pas péjoratif, loin de là mais j’ai bien compris que cette position n’était pas partagée par tous, même à Chalon – et des cracheurs de feu, c’est un festival majeur de la culture française où tout se mélange pour un enrichissement total de toutes nos cultures ! Et l’illustration par Ring Théâtre en est que plus forte même si le spectacle a été créé en 2014 dans un autre cadre !
Chalon dans la rue : du cirque à la poésie et vice-versa !!! avec Impact de la compagnie (rêve)2
La compagnie (rêve)2 est une compagnie qui propose ses créations depuis 2006. A l’origine, deux artistes ayant suivi l’école supérieure des arts du cirque, oui, le cirque ce n’est pas un truc sous chapiteau pour enfants, c’est bien un art qui a ses traditions mais aussi ses fulgurance modernes et contemporaines comme tous les arts… Naïma et Tico se sont rencontrés et ont décidé de créé ensemble, de surprendre, d’embarquer le public dans des voyages de beauté, de talent, de magie, de poésie…Fidèles aux arts du cirque, ils ont cherché ces chemins originaux qui prennent le public pour ne pas le lâcher. Quand le spectacle est terminé, les âmes secouées continuent à voyager… C’est là d’ailleurs la magie du spectacle et c’est pour cela que les spectacles de (rêve)2 ne sont pas des accumulations de performances mais bien des spectacles construits comme le dernier, celui présenté dans le cadre de Chalon dans la rue…Au départ, tout commence par du classique de l’acrobatie avec une femme et quatre hommes, cinq athlètes, cinq danseurs, cinq artistes… Oui car ces personnes qui sont là devant nous sont tout à la fois et c’est pour cela que l’on ne voit pas le temps passer, que l’on est émerveillé et qu’une fois Impact terminé, on reste là encore ébahi à attendre non pas un retour des artistes, mais plutôt notre retour sur terre…Je n’ai pas envie de vous en dire trop car je souhaite que vous puissiez découvrir ce spectacle pleinement et que vous soyez, vous aussi, conquis par (rêve)2 !!!Ils jouent jusqu’à la fin du festival, si les conditions météo sont compatibles avec ces arts du cirque, à 20h20 devant l’église Saint Pierre, place de l’Hôtel de ville…
Chalon dans la rue : un beau spectacle pour toute la famille, Ma Terre !!!
Dans l’imaginaire collectif – et il faut s’en méfier comme de la peste – les arts de la rue sont pour les adultes, pour ceux qui sont capables de s’assoir sur la chaussée, qui acceptent de se salir un peu… Bref, on pourrait croire que c’est une zone artistique interdite aux familles ou presque !!!Pourtant, à Chalon dans la rue, depuis toujours, on a conçu des espaces de spectacles pour bébés, enfants et familles. Cela peut paraître surprenant, mais c’est ainsi que l’on peut voir en bas d’une affiche : de 3 mois à 120 ans ! On est très proche du slogan du Journal de Tintin, de 7 à 77 ans… Mais comme chacun le sait bien, aujourd’hui on est mûr plus tôt et on vieillit plus tard…La compagnie Raz’Bitumes, compagnie de Rouen, propose un beau spectacle pour toute la famille. Au départ de ce travail d’Amy Wood, la volonté de redonner du sens à un des éléments de la planète, de la vie, du monde… la Terre !Une danseuse arrive avec un peu de terre dans son sac et quand elle étend la terre sur le sol, elle s’autorise à la découvrir, la toucher, la respirer, avec tout son corps…La musique d’Alice Wood accompagne le spectateur dans ce contact à mi-chemin entre la danse, la contemplation, le mime… Les plus jeunes sont fascinés, les plus âgés intrigués… On a tous tellement envie de toucher cette terre, nous aussi !Spectacle pour enfant, pour famille, mais aussi spectacle physique, écologique, politique, artistique, poétique, gestuel, musical… On est sonné car si on est entré dans le spectacle, si on ose se dire que l’on voudrait bien, nous aussi, marcher pieds nus dans cette terre, alors on n’en sort pas indemne !
J’ai beaucoup aimé ce travail et ce spectacle, Ma Terre, et je recommanderais bien à tous les organisateurs d’évènements pour les familles de faire appel à cette compagnie car le spectacle est touchant et profond, porteur de sens, ouvert à un très très large public… Et il ne nécessite que peu d’installation, juste un peu de terre…